Comment le jeune et ambitieux Einstein s'est approprié la Relativité restreinte de Poincaré
domaine.
Chapitre 6 :
Einstein s’approprie les travaux de Poincaré
Les fondements de la Relativité restreinte de Poincaré sont
éparpillés dans divers textes publiés au fur et à mesure de l’avancée de ses
recherches. Elles commencent avec La mesure du temps, paru en 1898, et
se poursuivent jusqu’à son résumé Sur la dynamique de l’électron du 5
juin 1905, dont le détail des calculs est donné en juillet.
Ainsi qu’on vient de le voir, les idées de Poincaré
aboutissent à une nouvelle mécanique dont il pose les fondements. Une telle
découverte ne s’est faite que de manière chaotique et erratique, comme s’effectue
toute recherche originale qui ne peut être programmée puisqu’elle explore l’inconnu.
« Zur Elektrodynamik bewegter Körper »
Par contre, un jeune physicien ambitieux, Albert Einstein (1879-1955)
va reprendre les travaux de recherche publiés par Poincaré en les rassemblant
dans un texte unique intitulé « Sur l’électrodynamique des corps en
mouvement ». Cette publication paraît dans le journal Annalen der
Physik [Ei1] où le manuscrit est reçu le 30 juin 1905, soit 25 jours après
la publication du 5 juin de Poincaré dans les Comptes rendus de l’Académie
des Sciences, et sept ans après sa première publication sur le temps. Dans
son article, Einstein ne mentionne aucune référence, ni aux travaux de Poincaré,
ni à ceux de Lorentz, alors qu’il les connaît parfaitement.
Ainsi que son contenu permet d’en juger, l’article d’Einstein
n’apporte rien de fondamentalement nouveau par rapport aux publications de
Poincaré. Malgré cette évidence, la première partie de cet article, intitulée « Partie
cinématique », a longtemps été considérée comme le seul véritable acte fondateur
de la Relativité restreinte.
Contrairement d’ailleurs à ce que les exégètes, et à leur
suite la plupart des physiciens, retiennent comme interprétation de cet article,
Einstein, ainsi qu’il le dit nettement dans l’introduction, ne prétend pas
faire une théorie du temps et de l’espace mais plus précisément résoudre les
problèmes posés par l’électrodynamique.
Dans cette introduction, Einstein pose que le principe de
relativité doit s’étendre aux lois de l’électrodynamique et il introduit le
postulat d’invariance de la lumière :
Nous voulons élever cette supposition (dont le contenu
sera appelé par la suite « principe de relativité ») au rang d’une
hypothèse et introduire également l’hypothèse, qui n’est qu’en apparence incompatible
avec ce principe, que la lumière se propage toujours dans le vide avec une
certaine vitesse V indépendante de l’état de mouvement de la source
lumineuse. Ces deux hypothèses permettent de construire, en s’appuyant sur la
théorie de Maxwell pour des corps au repos, une Électrodynamique des corps en
mouvement, simple et sans contradiction.
Cette dernière phrase précise donc bien l’objectif qu’Einstein
poursuit dans sa publication, et, afin qu’il n’y ait pas d’ambiguïté, nous
reproduisons le texte d’origine :
Diese beiden Voraussetzungen genügen, um zu einer
einfachen und widerspruchsfreien Elektrodynamik bewegter Körper zu gelangen
unter Zugrundelegung der Maxwellschen Theorie für ruhende Körper.
Einstein termine son introduction en faisant remarquer une
nouvelle fois qu’il va traiter d’électrodynamique :
La théorie que nous allons développer s’appuie – comme
toute autre théorie d’Électrodynamique – sur la cinématique des corps rigides, car
les énoncés de toute théorie visent au rapport entre des corps rigides (systèmes
de coordonnées), des horloges et des processus électromagnétiques.
LES HYPOTHÈSES
Afin de bien mettre en évidence le parallélisme entre les
publications de Poincaré et celle d’Einstein [Ei1], nous reprenons l’ordre des
sous-titres utilisés au cours du chapitre précédent. Cet ordre ne coïncide pas
avec celui de la publication d’Einstein mais les comparaisons seront ainsi
facilitées.
Nous reprenons l’article d’Einstein [Ei1] traduit par
Maurice Solovine, un ami d’Einstein, et M. A. Tonnelat. La première
édition avait été revue par Einstein.
Premier postulat : principe de
relativité
Einstein énonce le principe de relativité sous la forme
suivante :
Étant donné deux systèmes de coordonnées en translation
uniforme l’un par
Weitere Kostenlose Bücher