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Complots et cabales

Complots et cabales

Titel: Complots et cabales Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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rien, Bellone me confia innocemment qu'il était arrivé la veille du Milanais pour fortifier les barricades, et qu'il espérait bien qu'il n'y aurait pas la guerre, car il n'aimerait pas qu'elles fussent détruites. Le voyant alors si peu suffisant dans le métier qui était le sien, je lui demandai, feignant la naÔveté, s'il comptait fortifier la montagnette abrupte qui, sur notre droite surplombait la barricade. " Ma no ! ma no !
    dit-il en riant, qui voudrait passer par le Gravere o˘ il n'y a que monts et vallons, des sentiers muletiers disparaissant en hiver sous la neige, alors qu'il peut venir à nous, sans se perdre et sans encombre, par une route aussi facile que celle qui longe la Dora Riparia ? " Je ne suis pas moimême, comme l'on sait, un homme de guerre, mais c'est àce moment-là que j'appris, et appris une fois pour toutes, que rien n'est plus fatal à un général qu'un raisonnement a priori.
    Là-dessus, qui apparut pour me mener au ch‚teau ducal, sinon il bello Conte di vrrua ? lequel, m'ayant vu deux ou trois fois à Briançon, devait penser que nous étions, de ce fait, grands amis, car il me bailla une forte brassée, que je lui rendis sans chicheté, aimant fort son caractère ouvert et chaleureux. Il commanda qu'on ouvrît les grandes portes pour me laisser passer, ainsi que mon escorte, laquelle, pénétrant dans la ville, fut cause que toutes les fenêtres se garnirent en un battement de cils d'un grand nombre de curieux, hommes et femmes, lesquels nous envisagèrent sans la moindre hostilité, mais tout le rebours, avec faveur, comme si nous étions pour eux un spectacle agréable et brillant qui les égayait d'être clos en leur ville.
    J'étais fort curieux de connaître enfin de visu ce duc de Savoie, dont on avait tant parlé. Comme bien on s'en ramentoit, ce roitelet, qui voulait être roi, attaqua successivement et sans succès ses voisins pour s'agrandir à leurs dépens : la Suisse, la France et Montferrat; il était pour cela fort peu en odeur de sainteté à la Cour de France. Et Richelieu disait de lui en termes déprisants : " Depuis cinquante ans qu'il règne, il ne s'est étudié à autre chose qu'à se tirer par art, ruses et 89
    tromperies des mauvais pas o˘ son injustice et son ambition l'ont porté.
    Je trouvai, assis, tassé sur une chaire pauvrement dorée, un vieil homme, podagre, impotent et mal allant qui se faisait appeler Charles-Emmanuel "
    le Grand", sans avoir réussi às'agrandir, du moins autant qu'il l'e˚t voulu. Il avait un visage fort long, allongé encore par une toque de velours très haute, laquelle une grande plume blanche allongeait encore à mon sentiment, toutes ces hauteurs superposées étaient comme le symbole d'un puéril orgueil.
    Comme il s'était d'évidence donné à lui-même, comme à l'ambassadeur qu'il nous avait dépêché, l'instruction di trattare ma di concludere nulla, et comme, de mon côté, j'avais de Richelieu reçu la même, notre entretien ne pouvait être qu'une sorte de gioco, et puisque c'était un jeu, m'apensai-je, il ne m'était pas défendu de m'ébaudir un peu. J'eus donc la malice de faire au duc les mêmes propositions de paix et passage en ses …tats que le comte di Verrua avait suggérées en son nom à Louis, et sans hésiter le moindre, comme bien je m'y attendais, le duc les repoussa.
    J'en conclus que les mérangeoises de Charles-Emmanuel étaient, se peut, presque aussi engourdies que ses pieds et, comme d'un autre côté, j'éprouvais pour ce vieil homme un étrange mélange d'antipathie et de compassion qui me rendait ce bec à bec assez pénible, je décidai que cet entretien, n'étant plus qu'une sorte de buffonata 1, je ferais mieux d'y mettre un terme en demandant mon congé au duc.
    Il parut surpris, et comme déquiété, que notre inutile transaction ne dur‚t pas aussi longtemps qu'il s'y était préparé, et me bailla mon congé d'un air excessivement hautain que je trouvai bien étonnant de la part d'un duc s'adressant à un autre duc, mais que je reçus sans ciller, ni sourciller le 1. Bouffonnerie (ital.).
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    moindre, lui faisant au départir un profond salut, suivi d'une bonnetade d'une courtoise ampleur.
    Les dés étaient jetés ! Et, pour le pauvre sire, n'allaient point rouler du bon côté ! Mais après tout, qu'allait-il y perdre? Son fils étant le beau-frère de Louis, on ne lui prendrait rien, et même très probablement, on lui baillerait pécunes pour qu'il nous prête ces "

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