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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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se réjouiront, dit-il avec un sourire. Je te félicite pour ce
coup de maître. Qu’en dit Caton ?
    — Oh, il n’est pas encore au courant.
    Le sourire de Cicéron se figea.
    — Tu as divorcé d’avec Mucia et coupé tes relations
avec les Metelli dans le simple but d’épouser une parente de Caton, et tu n’as
même pas cherché à savoir quelle sera la réaction de Caton ?
    — J’imagine qu’on peut présenter les choses comme ça.
Pourquoi ? Tu crois que ça pose un problème ?
    — Avec la plupart des gens, je dirais non, mais Caton…
eh bien, on ne sait jamais où la flèche inflexible de sa logique peut le
conduire. As-tu parlé à beaucoup de monde de tes intentions ?
    — À quelques personnes.
    — Dans ce cas, puis-je suggérer, imperator , de
suspendre momentanément cette discussion pendant que tu envoies le plus tôt
possible un émissaire à Caton ?
    Un nuage sombre passa sur le visage jusque-là affable de Pompée – il
ne lui était visiblement jamais venu à l’esprit que Caton pourrait refuser :
si tel était le cas, cela impliquerait pour Pompée de perdre gravement la face – et
c’est sur un ton distrait qu’il accepta la suggestion de Cicéron. Lorsque nous
partîmes, il s’entretenait déjà avec Lucius Afranius, son plus proche
confident. Dehors, la foule était plus dense que jamais et, bien que les gardes
de Pompée n’entrouvrissent les portes que juste assez pour nous laisser passer,
ils furent presque submergés par le nombre qui se pressait pour entrer. Alors
qu’ils se frayaient un chemin vers la cité, Cicéron et les consuls furent la
cible de questions incessantes : « Vous lui avez parlé ? »,
« Que dit-il ? », « Est-il vrai que c’est devenu un dieu ? »
    — Ce n’était pas un dieu la dernière fois que j’ai
regardé, répondit Cicéron d’un ton enjoué, même s’il n’en est pas très loin !
Il est impatient de nous rejoindre au sénat. Quelle farce, glissa-t-il du coin
des lèvres à mon intention. Plaute n’aurait pas trouvé argument plus absurde.
    Les choses tournèrent exactement comme Cicéron l’avait
redouté. Pompée convoqua le jour même l’ami de Caton, Munatius, qu’il dépêcha
chez Caton pour faire de la part du grand homme une proposition de double
mariage. La famille de Caton se trouvait justement tout entière rassemblée
autour d’un festin. Les femmes furent transportées à la perspective d’une union
avec celui qui passait pour le plus grand héros des guerriers romains et était,
disait-on, bâti comme un dieu.
    Caton, lui, entra aussitôt dans une colère formidable et,
sans même prendre le temps de réfléchir ou de consulter quiconque, donna la
réponse suivante :
    — Va, Munatius, va dire à Pompée que Caton n’est pas à
prendre par les femmes, qu’il se réjouit cependant de ses bonnes dispositions
et que, si Pompée se conduit en homme juste, il lui donnera une amitié plus
sûre que toutes les alliances de famille. Mais il ne livrera pas d’otages à la
gloire de Pompée contre la patrie !
    Pompée fut, aux dires de tous, abasourdi par la grossièreté
de la réponse (« si Pompée se conduit en homme juste » !), et
quitta sur-le-champ la Villa Publica de très mauvaise humeur pour se rendre
dans sa maison des Monts Albains. Néanmoins, là encore, il fut poursuivi par
des démons bien déterminés à s’en prendre à sa dignité. Sa fille, qui n’avait
pas plus de neuf ans et qu’il n’avait pas vue depuis qu’elle était en âge de
parler, avait appris du célèbre grammairien Aristodème de Nyssa des passages d’Homère
pour accueillir son père. Malheureusement, le premier vers qu’elle cita lorsqu’il
franchit la porte fut celui qu’adresse Hélène à Pâris : « Te voici
revenu du combat. Que n’y restais-tu, mort… », et il y avait trop de monde
présent ce jour-là pour que l’anecdote ne s’ébruite pas. Je crains d’ailleurs
que Cicéron ne la trouvât si drôle qu’il contribua largement à la répandre dans
tout Rome.
     
    Au milieu de tout ce tumulte, on aurait pu croire que l’affaire
des mystères de la Bonne Déesse serait oubliée. Plus d’un mois s’était écoulé
depuis le scandale, et Clodius avait pris soin de se faire discret. Les gens
commençaient à parler d’autre chose. Cependant, un jour ou deux après le retour
de Pompée, le collège des pontifes rendit enfin son jugement sur l’incident
devant le sénat. Pupius,

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