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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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résolution de
ne plus rien avoir à faire avec Clodia ou son frère, il ne tarda pas à se
retrouver aspiré par le tourbillon du scandale.
    Difficile, après toutes ces années, d’imaginer à quel point
l’affaire des mystères de la Bonne Déesse monopolisa la vie publique de Rome,
si bien que tous les travaux du gouvernement finirent par s’interrompre. En
apparence, la cause de Clodius semblait désespérée. Il avait de toute évidence
commis cette offense ridicule, et le sénat était pratiquement tout entier
décidé à le punir. Or il arrive, en politique, qu’une grande faiblesse soit
transformée en une grande force et, à l’instant où la motion de Lucullus avait
été votée, le peuple de Rome commença à protester. Quel crime ce jeune homme
avait-il commis en fin de compte, sinon pécher par excès d’enjouement ?
Fallait-il vraiment battre quelqu’un à mort pour une simple farce ?
Lorsque Clodius s’aventura dans le forum, il découvrit qu’au lieu de vouloir le
bombarder d’ordures, les citoyens avaient plutôt envie de lui serrer la main.
    Il y avait encore à Rome des centaines de plébéiens à qui l’autorité
renforcée du sénat déplaisait et qui repensaient avec nostalgie au temps où
Catilina régnait sur la rue. Clodius attirait massivement ces mécontents, qui
se rassemblaient autour de lui. Il prit l’habitude de sauter sur une charrette
ou sur l’étal d’un commerçant pour fulminer contre le sénat. Il avait retenu
les leçons de stratégies des campagnes politiques de Cicéron : toujours
faire court, se souvenir du nom de chacun, raconter des anecdotes amusantes,
faire le spectacle, et surtout, que chaque question, aussi complexe fût-elle, soit
présentée comme une histoire accessible à tous. Le récit de Clodius était on ne
peut plus simple : il incarnait le citoyen solitaire injustement persécuté
par l’oligarchie.
    — Prenez garde, mes amis ! criait-il. Si cela peut
m’arriver à moi, qui suis patricien, cela peut arriver à n’importe lequel d’entre
vous !
    Il organisa bientôt des réunions publiques quotidiennes où
le service d’ordre était assuré par ses amis des tavernes et des maisons de jeu
qui avaient été pour la plupart des partisans de Catilina.
    Clodius s’en prenait nommément à Lucullus, Hortensius et
Catulus, mais dès qu’il s’agissait de Cicéron, il se limitait à répéter la
vieille plaisanterie selon laquelle l’ancien consul se tenait « bien
informé ». Cicéron fut souvent tenté de répondre, comme Terentia l’en
pressait ; il tint pourtant la promesse faite à Clodia et parvint à se
retenir. Néanmoins, la controverse ne cessa d’enfler en dépit de son silence.
Je me trouvais avec lui le jour où la décision du sénat d’organiser un tribunal
spécial fut déposée devant le peuple en assemblée populaire. La bande de brutes
de Clodius prit le contrôle du rassemblement, occupa les allées et s’empara des
urnes. Leurs cris perturbèrent tant le consul, Pupius, qu’il finit par voter
contre son propre texte, en particulier la clause qui permettait au préteur
urbain de choisir le jury. De nombreux sénateurs se tournèrent vers Cicéron en
espérant qu’il prendrait le contrôle de la situation, mais il resta à sa place,
rouge de fureur et de confusion, et ce fut à Caton de prononcer une attaque
cinglante contre le consul. On renonça au rassemblement. Les sénateurs
regagnèrent promptement leur curie et votèrent à quatre cents contre quinze la
poursuite du projet de loi malgré les dangers de troubles civils. Un tribun, Fufius,
qui partageait les vues de Clodius, annonça qu’il s’opposerait à la
législation. L’affaire commençait à échapper aux sénateurs pour de bon, et
Cicéron quitta la chambre en hâte pour rentrer chez lui, le visage en feu.
    Le moment décisif arriva quand Fufius décida de convoquer
une assemblée publique hors les murs de la cité afin de pouvoir y faire venir
Pompée pour lui demander son avis. Non sans protester fortement devant ce qu’il
considérait comme une atteinte à son emploi du temps et à sa dignité, le
Gardien de la Terre et de la Mer n’eut d’autre choix que de se traîner des
monts Albains au cirque de Flaminius pour se soumettre à une série de questions
insolentes de la part du tribun, sous les yeux de la foule immense d’un jour de
marché qui, délaissant momentanément ses marchandages, s’était rassemblée
autour de lui pour

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