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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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que lui en le concédant. Malheureusement, voilà
qu’il vient de tout gâcher avec ses allégations insensées. J’ai bien peur de
devoir lui redonner des cours.
    — Je sais que c’est vrai, lui rétorqua Rufus avec un
sourire encore plus large, parce que c’est toi-même qui me l’as dit.
    Cicéron hésita pendant à peine une fraction de seconde, et
je m’aperçus avec horreur qu’il avait complètement oublié sa conversation avec
Rufus, plusieurs années auparavant.
    — Misérable petit ingrat, bredouilla-t-il. Je n’ai rien
fait de tel.
    — Lors de la première semaine de ton consulat, assura
Rufus, deux jours après les fériés latines, tu m’as fait venir chez toi pour me
demander si Catilina avait jamais parlé de te tuer en ma présence. Tu m’as
confié qu’Hybrida avait avoué avoir avec Catilina prêté serment de t’assassiner
sur le corps d’un enfant sacrifié. Tu m’as demandé d’ouvrir grand mes oreilles.
    — C’est un mensonge absolu ! s’écria Cicéron, mais
son éclat fut loin de dissiper l’effet du souvenir froid et précis évoqué par
Rufus.
    — Voici l’homme à qui tu as fait confiance quand tu
étais consul, poursuivit Rufus avec un calme implacable tout en désignant
Hybrida. Voici l’homme que tu as imposé comme gouverneur au peuple macédonien – un
homme dont tu savais qu’il avait pris part à un meurtre bestial et qui avait
voulu ta propre mort. Et cependant, c’est bien l’homme que tu défends aujourd’hui.
Pourquoi ?
    — Je n’ai pas à répondre à tes questions, mon garçon.
    Rufus s’avança à grandes enjambées vers le jury.
    — Voilà bien la question, citoyens : pourquoi
Cicéron, entre tous, qui a construit sa réputation en s’attaquant à des
gouverneurs de province corrompus, salit maintenant son nom en défendant
celui-ci ?
    Cette fois encore, Cicéron tendit la main vers le préteur.
    — Clodianus, pour l’amour du ciel, je te demande de
contrôler ton tribunal. Le plaignant est censé interroger mon client, et non
faire un discours à mon sujet.
    — C’est vrai, Rufus, convint le préteur. Tes questions
doivent avoir un rapport avec l’affaire en cours.
    — Mais c’est le cas. Mon propos est de dire que Cicéron
et Hybrida sont arrivés à un arrangement.
    — Il y a aucune preuve de cela, assura Cicéron.
    — Au contraire, rétorqua Rufus. Moins d’un an après
avoir envoyé Hybrida au peuple si patient de Macédoine, tu t’es acheté une
nouvelle maison. Là, dit Rufus en désignant la demeure qui étincelait au soleil
de printemps sur le Palatin, et tous les jurés tournèrent la tête pour la
regarder. Une demeure semblable s’est vendue peu après pour quatorze millions
de sesterces. Quatorze millions ! Interrogez-vous, citoyens !
Où Cicéron, qui se targue de ses origines modestes, s’est-il procuré une telle
fortune, sinon par l’intermédiaire de l’homme qu’il a à la fois protégé et fait
chanter, Antonius Hybrida ? N’est-il pas vrai, questionna-t-il en se
retournant vers l’accusé, que tu as détourné une partie de l’argent que tu as
extorqué à ta province pour ton associé dans le crime, à Rome ?
    — Non, non, protesta Hybrida. J’ai pu envoyer un cadeau
de temps en temps à Cicéron, mais rien de plus.
    (C’était l’explication qu’ils avaient mise au point la
veille au soir, au cas où Rufus aurait des preuves qu’il y avait eu transfert d’argent
entre les deux hommes.)
    —  Un cadeau ? répéta Rufus.
    Avec une lenteur exagérée, il contempla à nouveau la maison
de Cicéron en levant la main pour se protéger du soleil. Une femme tenant une
ombrelle arpentait la terrasse, et je pris conscience qu’il devait s’agir de
Terentia.
    — C’est un beau cadeau !
    Cicéron restait immobile. Il observait attentivement Rufus.
Plusieurs membres du jury secouaient la tête. Des huées se faisaient entendre
dans le public du comitium .
    — Citoyens, reprit Rufus, je crois que j’ai présenté
tous mes arguments. J’ai démontré comment Hybrida avait perdu toute une région
de notre empire de par sa négligence scélérate. J’ai montré sa lâcheté et son
incompétence. J’ai révélé que l’argent qui aurait dû aller à l’armée se
retrouvait dans ses coffres personnels. Les fantômes de ses légionnaires
abandonnés par leur chef et cruellement massacrés par les barbares nous
réclament justice. Ce monstre n’aurait jamais dû être en

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