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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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appel,
insista Cicéron, maintenant vraiment inquiet. On ne peut pas exécuter un
citoyen romain sans un procès en bonne et due forme.
    — Oh, que si ! fit Hortensius avec amertume. Si
Rabirius est déclaré coupable, il aura bien entendu le droit de faire appel. Il
y a pourtant un problème. Il ne pourra pas le faire devant une cour – seulement
devant le peuple assemblé en comices tributes, sur le Champ de Mars.
    — Vous imaginez le spectacle ! intervint Catulus.
Un sénateur romain qui risque la peine de mort jugé devant la plèbe. Ils ne
voteront jamais l’acquittement – cela les priverait d’une trop belle
distraction.
    — Ce sera le début d’une guerre civile, assura
Isauricus, parce que nous ne le tolérerons pas, Cicéron. Tu entends ?
    — J’entends bien, répondit Cicéron en parcourant
rapidement l’assignation des yeux. Quel est le tribun qui porte l’accusation ?
(Il trouva le nom au bas du document.) Labienus ? C’est un des hommes de
Pompée. Il n’est généralement pas du genre à créer des problèmes. À quoi
joue-t-il ?
    — Apparemment, son oncle aurait été tué avec
Saturninus, dit Hortensius avec le plus grand mépris, et l’honneur de sa famille
réclamerait vengeance. Tout cela n’est qu’un prétexte pour que César et sa
clique s’en prennent au sénat.
    — Alors, que proposes-tu, Cicéron ? demanda
Catulus. Nous avons voté pour toi, tu te rappelles ? Contre l’avis de
certains d’entre nous.
    — Que voulez-vous que je fasse ?
    — D’après toi ? Sauver la vie de Rabirius !
Dénoncer ce scandale en public et puis te joindre à Hortensius pour assurer sa
défense quand l’affaire sera portée devant le peuple.
    — Eh bien, ce serait une grande première, commenta
Cicéron en observant son grand rival, de nous voir apparaître du même côté.
    — Cette perspective ne me plaît pas davantage qu’à toi,
rétorqua froidement Hortensius.
    — Allons, Hortensius, ne le prends pas mal. Je serais
honoré de plaider un jour avec toi. Mais inutile de tomber dans leur piège.
Voyons d’abord si nous ne pouvons pas régler cette question sans procès.
    — Comment pourrait-on l’éviter ?
    — Je vais parler à César. Découvrir ce qu’il cherche.
Voir si nous pouvons arriver à un compromis.
    À la simple mention du terme compromis, les trois anciens
consuls se mirent tous à protester. Cicéron leva les mains.
    — Il doit vouloir quelque chose. Il ne nous coûtera
rien d’entendre ses conditions. Nous le devons à la république. Nous le devons
à Rabirius.
    — Je veux rentrer chez moi, fit la voix plaintive de
Rabirius. S’il vous plaît, est-ce que je peux rentrer maintenant ?
     
    Cicéron et moi quittâmes la maison moins d’une heure plus
tard, la neige inhabituelle craquant et crissant sous nos pas tandis que nous
descendions la rue déserte en direction de la ville. Cette fois encore, nous
étions seuls, et cela me paraît, avec le recul, incroyable – en fait
ce devait être la dernière fois que Cicéron put s’aventurer dans Rome sans un
garde du corps. Il remonta cependant la capuche de son manteau afin d’éviter d’être
reconnu : cet hiver-là, les rues les plus animées n’étaient plus sûres,
même de jour.
    — Il faudra qu’ils acceptent un compromis, dit-il. Cela
ne leur plaira pas, mais ils n’auront pas le choix.
    Il poussa alors un juron et donna un coup de pied dans la
neige avec emportement.
    — Tiron, mon consulat va-t-il se résumer à cela ?
Une année passée à faire la navette entre les patriciens et les plébéiens pour
essayer de les empêcher de s’écharper ?
    Comme je ne trouvai pas de réponse encourageante, nous
poursuivîmes notre chemin en silence.
    À cette époque, César habitait le quartier de Subura, un peu
plus bas que là où vivait Cicéron. Cette maison appartenait à sa famille depuis
plus d’un siècle et avait sans doute eu belle allure en son temps. Mais lorsque
César en avait hérité, le voisinage avait considérablement décliné. Même la
neige virginale, tachée par la suie de feux de bois consumés et piquetée d’excréments
humains lancés par les fenêtres des habitations, ne faisait qu’accentuer encore
la misère de ces rues étroites. Les mendiants réclamaient de l’argent d’une
main tremblante, mais je n’en avais délibérément pas pris sur moi. Je me
rappelle qu’une vieille prostituée vociférait en se faisant bombarder de

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