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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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je
puisse prendre des notes.
    — « L’inculpé est accusé par la présente du
meurtre du tribun L. Saturninus et d’avoir violé l’enceinte sacrée du
sénat. »
    Il leva les yeux, visiblement stupéfait.
    — Saturninus ? Ce nom sort tout droit des livres d’histoire !
Il doit y avoir… quoi ? Quarante ans qu’il a été tué.
    — Trente-six, corrigea Catulus.
    — Et Catulus est bien placé pour le savoir, intervint
Isauricus, parce qu’il y était. Comme moi, d’ailleurs.
    — Saturninus ! grommela Catulus avec fureur. Une
belle fripouille ! Ce n’était pas un crime de le tuer – c’était
une mission de salut public.
    Il regardait au loin, comme s’il étudiait une grande fresque
historique sur le mur d’un temple : L’Assassinat de Saturninus au
sénat.
    — Je le vois aussi clairement que je te vois, Cicéron.
Un agitateur de la pire espèce, ce tribun. Il a assassiné notre candidat au
consulat et le sénat en a fait un ennemi public. Après ça, même la plèbe l’a
abandonné. Mais avant qu’on puisse lui mettre la main dessus, sa bande de
vauriens et lui se sont retranchés sur le Capitole. Alors nous avons coupé l’alimentation
en eau ! C’est toi qui en as eu l’idée, Vatia.
    — Effectivement, convint le vieux général, les yeux
brillant à ce souvenir. Je savais mener un siège, à l’époque.
    — Évidemment, ils se sont rendus au bout de deux jours
et ont été enfermés au sénat jusqu’à leur procès. On se doutait bien qu’ils
tenteraient à nouveau de s’échapper, alors nous sommes montés sur le toit, nous
avons arraché les tuiles et nous les avons bombardés avec. Il n’y avait nulle
part où se cacher. Ils couraient dans tous les sens en criant, comme des rats
dans un fossé. Quand Saturninus a arrêté de se tortiller, on aurait
difficilement pu le reconnaître.
    — Et Rabirius se trouvait avec vous deux sur le toit ?
s’étonna Cicéron.
    Je levai les yeux de mes notes pour regarder le vieillard :
son expression absente, sa tête qui tremblait légèrement – il était
impossible de l’imaginer participant à une telle action.
    — Oh oui, il y était ! confirma Isauricus. On
devait bien être une trentaine. C’est qu’on avait encore de la poigne à cette
époque ! ajouta-t-il en crispant les doigts en un poing noueux.
    — Le problème, intervint Hortensius, qui était plus
jeune que ses compagnons et en avait visiblement assez d’entendre toujours la
même histoire, n’est pas de savoir si Rabirius était ou non là-bas. C’est le
crime dont on l’accuse.
    — Qui est ?
    — Il est accusé de perduellio .
    Je dois avouer que je n’en avais jamais entendu parler, et
que Cicéron dut me l’épeler.
    — L’accusation de perduellio , expliqua-t-il,
correspondait autrefois à une accusation de haute trahison. Pourquoi, demanda-t-il
en se tournant vers Hortensius, invoquent-ils une loi si désuète ? Pourquoi
ne pas juste le poursuivre pour haute trahison et en avoir terminé avec ça ?
    — Parce que la sentence pour haute trahison est l’exil,
alors que pour perduellio , c’est la mort – et même pas par
pendaison, précisa Hortensius en se penchant en avant pour souligner ses
paroles. S’il est jugé coupable, Rabirius sera crucifié.
    — Qu’est-ce que c’est que cet endroit ? demanda
soudain Rabirius. Où suis-je ?
    Catulus le fit rasseoir avec douceur.
    — Calme-toi, Gaius. Nous sommes tes amis.
    Il y eut un silence.
    — Mais aucun jury ne le reconnaîtra coupable, objecta
tranquillement Cicéron. Le malheureux n’a visiblement plus toute sa tête.
    — Le crime de perduellio n’est pas jugé devant
un jury. C’est ça qui est si rusé. On le plaide devant deux juges spécialement
nommés pour l’occasion.
    — Nommés par qui ?
    — Notre nouveau préteur urbain, Lentulus Sura.
    Le visage de Cicéron se tordit en entendant ce nom. Sura
était un ancien consul, un homme d’une grande ambition et d’une stupidité sans
nom, deux qualités qui, en politique, font trop souvent la paire. On le
surnommait « le vieux fainéant ».
    — Et qui a-t-il choisi ? Le savons-nous ?
    — César pour l’un. Et César pour l’autre.
    —  Quoi ?
    — Caius Julius Caesar et son cousin Lucius ont été
choisis pour juger l’affaire.
    —  César est donc derrière tout ça ?
    — Naturellement, le verdict est joué d’avance.
    — Mais il doit y avoir une possibilité de faire

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