Dans le jardin de la bête

vous le demande, pourquoi nos diplomates seraient-ils payés ? Dans ce cas, la diplomatie ne serait plus un service, mais un plaisir. Et cela pourrait finir par un mariage ! »

Sources
et remerciements
     

     
    C e que je n’avais pas prévu en m’aventurant dans cette sombre période du régime hitlérien, c’était à quel point cette obscurité imprégnerait mon esprit. Je m’enorgueillis généralement de posséder le recul du journaliste, la capacité de déplorer une tragédie et en même temps d’en saisir le potentiel narratif, mais vivre parmi les nazis jour après jour s’est révélé une expérience exceptionnellement éprouvante. Pendant quelque temps, j’ai gardé sur mon bureau un exemplaire de Hitler, 1889-1936  : Hubris , de Ian Kershaw * , une œuvre majeure qui m’a servi de manuel sur la politique de l’époque. Sur la couverture de l’édition américaine figure un grand portrait d’Hitler qui est devenu pour moi si repoussant – mes excuses à sir Ian – que je devais conserver le livre retourné sur mon bureau, car commencer chaque journée en voyant ces yeux pleins de haine, ces joues flasques et ce bout de tampon Jex en guise de moustache était trop déprimant.
    Une vaste quantité d’écrits historiques sur Hitler et la Seconde Guerre mondiale a été publiée, qu’il faut lire quelle que soit l’envergure de l’épisode qu’on compte étudier. Toutes ces lectures ont approfondi mon malaise spirituel, non pas du fait de leur quantité, mais à cause des horreurs qu’elles m’ont révélées. Il est difficile de saisir l’ampleur et la profondeur du paysage guerrier créé par Hitler – les déportations de Juifs vers les camps d’extermination même après que la défaite de l’Allemagne fut devenue évidente pour tous ; les batailles de tanks contre les forces russes qui coûtèrent des dizaines de milliers de vies en quelques jours ; les représailles sanglantes pour lesquelles les nazis devinrent tristement célèbres, où, par un après-midi ensoleillé dans un village de France, une dizaine d’hommes de femmes furent arrachés à leurs maisons et leurs magasins, alignés devant un mur et fusillés. Aucun préambule, aucun adieu ; juste un chant d’oiseau et le jaillissement du sang.
    Certains livres, surtout le Hubris de Kershaw, se sont révélés exceptionnellement utiles pour détailler le large éventail de forces et d’hommes en jeu dans les années qui ont précédé la Seconde Guerre mondiale. J’inclus ici quelques vieux classiques qui gardent tout leur intérêt, Hitler ou les mécanismes de la tyrannie par Alan Bullock, et Le III e  Reich, des origines à la chute , de William Shirer, de même que des livres plus récents de l’égal de Kershaw dans le domaine de la recherche, Richard J. Evans, dont Le Troisième Reich en trois tomes volumineux qui abondent en détails intéressants, aussi bien que terrifiants.
    Plusieurs livres portant plus spécifiquement sur mon petit terrain de recherches se sont révélés fort utiles, dont Resisting Hitler : Mildred Harnack and the Red Orchestra , par Shareen Blair Brysac ; The Haunted Wood , par les historiens du KGB Allen Weinstein et Alexander Vassiliev ; et Spies : The Rise and Fall of the KGB in America , par Vassiliev, John Earl Haynes et Harvey Klehr.
    Les carnets de l’ambassadeur William Dodd, Ambassador Dodd’s Diary , édités par Martha et Bill Jr, et les mémoires de Martha, Through Embassy Eyes sont évidemment d’une valeur exceptionnelle. On ne peut entièrement se reposer sur ces deux textes ; ils doivent être traités avec prudence et toujours confrontés à d’autres sources qui les corroborent. Le livre de souvenirs de Martha présente nécessairement sa propre interprétation des gens et des faits qu’elle a rencontrés et, en tant que tel, il est indispensable pour découvrir ses pensées et ses sentiments, mais il contient des omissions notables. Nulle part, par exemple, elle ne désigne nommément Mildred Fish Harnack ou Boris Winogradov, sans doute parce que faire paraître leurs noms dans un livre publié en 1939 leur aurait fait courir de très gros risques. Cependant, des documents parmi les papiers de Martha à la Bibliothèque du Congrès révèlent par recoupements les passages dans son texte où Harnack et Winogradov font une apparition. Ses papiers comprennent le compte rendu détaillé et inédit de ses relations avec Boris et Mildred et sa