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Dernier acte à Palmyre

Dernier acte à Palmyre

Titel: Dernier acte à Palmyre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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vu le tueur ? insinuai-je en riant.
    Tranio rit à son tour, d’un rire aussi faux que le mien, et reprit sur le même ton :
    — Est-ce qu’il l’a vu ?
    — Non, répondis-je brièvement.
    Et pour autant que je le sache, c’était la vérité.
    Voyant Grumio attiser le feu, je ramassai une petite branche et me mis également à remuer les braises.
    Comme le silence paraissait devoir s’éterniser, j’ajoutai :
    — Est-ce que vous allez me raconter pourquoi Heliodorus était si impopulaire ?
    Ce fut Tranio qui, prétendant philosopher, inventa une belle réplique qu’il débita en agitant élégamment les mains :
    — Nous étions tous en son pouvoir.
    Ce salopard se moquait de moi. Il me laissait le choix entre le flatter, ce dont je me sentais incapable, ou essayer de l’acheter, ce qui était encore plus impossible. Ou encore, attendre que quelqu’un d’autre le saisisse par les couilles et serre jusqu’à ce qu’il tombe raide. Étant donné son attitude envers ses collègues, il était surprenant que personne n’ait encore cédé à la tentation ! À mon avis, il suffisait d’attendre un peu, et j’étais même prêt à prendre des paris sur qui craquerait le premier.
    — Ce que tu viens de dire me paraît un peu exagéré, commentai-je sereinement.
    — Les gens dont le gagne-pain dépend d’un plumitif vivent en état de stress permanent, continua-t-il, toujours aussi grandiloquent. (Devenu par la force des choses leur nouvel auteur, je refusais de me laisser impressionner par ses déclarations.) Pour trouver son meurtrier, me conseilla-t-il, cherche le malheureux acteur qui a hérité d’un mauvais rôle de trop.
    — Toi, par exemple ?
    Il baissa très vite les yeux, mais j’eus le temps d’y lire de l’inquiétude. Il se reprit rapidement.
    — Non, pas moi. Je n’ai pas besoin d’un texte écrit. S’il avait « oublié » de m’écrire un rôle, j’aurais improvisé. Grumio aussi, bien sûr. Et il le savait.
    J’observai son partenaire dont le visage n’exprimait qu’une sorte de neutralité réjouie. Puis, rompant le silence, il murmura :
    — Ce mec était un vrai porc.
    — Pourquoi ? insistai-je.
    — Un tyran. Il maltraitait les plus faibles. Et ceux qu’il n’osait pas attaquer physiquement, il les martyrisait d’une façon plus subtile.
    — Est-ce qu’il courait après les femmes ?
    — Ça, tu devras le demander aux femmes, répondit Grumio soudain en verve. (Il dissimulait mal un certain sentiment de jalousie.) Il y en a d’ailleurs une ou deux que j’aimerais bien t’aider à interroger !
    Pendant que j’y étais, mieux valait vérifier toutes les possibilités.
    — Ou est-ce qu’il courait après les jeunes gens ?
    Ils me répondirent tous les deux par un haussement d’épaules. En fait, aucun homme dans cette troupe n’était assez jeune pour exciter le genre d’amateur qui fréquente les thermes pour y lorgner les garçons. Si des relations existaient entre adultes, je devrais peut-être commencer par chercher des preuves en ce qui concernait les jumeaux. Ils vivaient en assez étroite compagnie pour éveiller les soupçons. Mais Grumio m’avait donné le sentiment d’être intéressé par les femmes, et ma question avait fait sourire Tranio.
    Une fois encore, ce fut ce dernier qui se lança dans une tirade assez emphatique :
    — Heliodorus pouvait détecter un complexe d’infériorité, ou une trace d’acné chez un adolescent, à vingt pas. Il flairait aussi facilement les amoureux transis. Il savait ce que chacun de nous attendait de la vie et n’avait pas son pareil pour faire croire à quelqu’un que ses petites faiblesses étaient de terribles défauts, et son but inaccessible.
    Quel peut bien être sa propre faiblesse ? me demandai-je en l’écoutant parler. Et quels sont, ou quels étaient, ses espoirs ?
    — Un tyran, je veux bien. Pourtant, les membres de cette troupe me sont apparus comme des gens capables de tenir tête à n’importe qui.
    Les jumeaux éclatèrent de rire.
    — Alors pourquoi acceptiez-vous son attitude sans réagir ?
    — Chremes le connaissait depuis longtemps, indiqua Grumio d’un ton las.
    — Il n’était pas facile à remplacer. Seul un imbécile accepte ce genre de travail, ajouta Tranio, en m’insultant avec une satisfaction aussi évidente que déplacée.
    C’était vraiment un drôle de couple. À première vue, ils m’avaient semblé étroitement liés, mais j’avais maintenant deviné qu’ils

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