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Dieu et nous seuls pouvons

Dieu et nous seuls pouvons

Titel: Dieu et nous seuls pouvons Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Folco
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l’arme dans tous les sens.
    — J’en ai un plus grand, un
webley army express calibre 45, mais il pèse un kilo huit. Celui-ci ne pèse que
trois cent dix grammes et mesure moitié moins.
    Arrivée rue de la Folie-Régnault, la
Darracq s’immobilisa devant le 60 bis. Ils entrèrent dans une cour où
étaient entreposées des poubelles. Du linge pendait aux fenêtres. Anatole
frappa au carreau de l’une d’elles, au rez-de-chaussée. Une femme sans âge
apparut.
    — Bon après-midi, madame
Clarence. J’ai un nouveau à vous présenter, dit-il en faisant signe à Saturnin
de s’approcher.
    — Voici Mme Clarence. C’est elle
qui garde le double des clefs du hangar. Comme ça, si tu en as besoin un jour
et que je ne suis pas là, tu sauras à qui demander.
    Cela dit, il ouvrit les portes du
local avec son trousseau de clefs. Une guillotine apparut. Une autre, démontée,
était appuyée contre l’un des murs.
    — Vous la gardez toujours
montée ? s’étonna Saturnin.
    — C’est la meilleure façon de
ne rien oublier quand on la déplace.
    Saturnin s’approcha de l’engin. Ils
le virent promener sa paume sur l’un des montants, puis glisser son doigt sous
la lunette, examiner la fermeture et grimacer. Il se redressa et en fit le tour
complet sans plus la toucher.
    Gros Louis brisa le silence.
    — Alors ? Que pense mon
adjudant de notre bécane ?
    — Elle est sale et les nœuds
des garcettes ne sont pas les bons.
    Il leur aurait craché sur les
chaussures qu’il ne les aurait pas plus vexés. Même Anatole perdit son calme.
    — Qu’est-ce qui t’autorise à
dire ça ?
    Saturnin posa son doigt sur la
lunette.
    — Voyez par vous-mêmes. Les
glissoirs, comme la fermeture, n’ont jamais été nettoyés à fond. Du sang s’est
introduit et, à la longue, il a pourri : c’est ça qui sent si mauvais.
Pour les nœuds, c’est facile à voir que ce ne sont pas les bons. Il faut un
étrésillon à la manette et un plein poing au mouton.
    — Le pire, c’est qu’il a
raison, admit Henri qui avait la responsabilité technique des bois de justice.
Ce ne sont pas mes nœuds.
    Pour l’odeur, chacun l’avait
remarquée depuis longtemps sans pour autant se l’expliquer. Et voilà que ce
blanc-bec, en moins de trois minutes…
    Le front plissé par la contrariété,
Anatole vérifia lui-même les nœuds et dut en convenir. L’idée qu’Hippolyte
n’allait pas manquer d’apprendre que sa guillotine était mal entretenue le
gênait dans son amour-propre professionnel.
    — C’est la pipelette, j’en suis
sûr, accusa Yvon. Au bureau de tabac du coin, y m’ont dit plusieurs fois
qu’elle faisait visiter quand on n’était pas là. Elle fait même casquer cinq
francs par personne et cinq autres pour faire tomber le couperet.
    Le patron sortit du hangar et ils
l’entendirent frapper de nouveau contre les carreaux de la loge. Pendant qu’il
passait un vigoureux savon à Mme Clarence, Yvon désigna la guillotine en
disant :
    — Tu dis qu’elle est sale, tu
devrais la nettoyer pour nous apprendre notre métier.
    Avisant un tournevis sur l’établi,
Saturnin les étonna une fois de plus en s’agenouillant devant la lucarne et en
dévissant les boulons à la vitesse grand V.
    — Tu en as déjà démonté
une ?
    — Oui, la nôtre, à l’oustal.
Quand on a su que je venais ici, mon grand-père me l’a fait démonter et
remonter une fois par semaine.
    Les adjoints n’en croyaient pas
leurs oreilles.
    — Vous avez une bécane à vous,
une vraie ? insista Yvon.
    — Ben oui, une vraie. C’est un
de mes ancêtres qui l’a fabriquée lui-même. Elle est d’ailleurs bien mieux que
celle-ci. Elle pèse cinq cent dix kilos, mouton inclus. Tandis que la vôtre
doit peser six cents ou plus.
    Tout en parlant, il alignait les
éléments démontés sur la planche à bascule. Chacun de ses gestes était utile et
s’enchaînait sans à-coup au suivant.
    Les joues encore chaudes d’avoir
houspillé l’indélicate concierge, Anatole revint dans le hangar. Son nouvel
aide était en train de gratter avec la pointe du tournevis le sang séché
infiltré dans les rainures.
    — Remonte tout immédiatement sinon
nous allons arriver en retard au cirque. Qui t’a dit d’y toucher ?
    — C’est moi, patron. C’était
pour voir s’il s’y connaissait. Dites, c’est-y vrai qu’ils ont une bécane
personnelle ?
    — C’est vrai. On peut même y
fixer les roues et un timon pour la

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