Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
Vom Netzwerk:
d’éclaircir.
    – C’est un bien bon garçon, se dit-elle, mais il a l’esprit bizarre. C’est peut-être à cause de son nez ?
    – Alors, continua tendrement Jacquemin, vous ne voyez pas de mal à ce qu’il vous aime ?
    – Oh ! non, dit naïvement Denise. Aucun mal, certes. Vous pouvez en être sûr. Mais comment croire qu’un aussi haut personnage se soit épris de ma petite personne ?
    – Eh ! laissons là sa hauteur. Je conviens qu’il est un peu haut sur ses jambes, mais je puis vous assurer qu’il se fera petit, tout petit pour vous plaire !
    Et Jacquemin, pliant sur ses échasses, tenta de donner sur-le-champ une idée de ce que serait cette petitesse à laquelle il se vantait de descendre à son gré.
    – Comme il est bon ! soupira Denise. Et riche ? Dites-moi. Est-il riche ?…
    Jacquemin fut attristé, et une inquiétude le saisit, en même temps qu’un peu de mépris lui venait :
    – Ah ! pensa-t-il. Voilà ce qui lui tient au cœur. La richesse ? Riche ? Heu ! Il possède bien douze carolus d’or, voilà ce que je puis vous dire…
    – Qu’est-ce qu’un carolus ? Ce doit être une bien grosse somme, dites ?… Combien d’écus faut-il pour faire un carolus ? Des milliers, peut-être ?… Et vous dites qu’il en a douze ?
    – Douze bien comptés. Et en or pur ! Il lui fallut des années pour les amasser.
    – Il est donc riche. Mais peu m’importe. Ce n’est pas à son or que j’en veux. C’est pour lui-même que je veux l’aimer… pour sa bonté, pour sa noblesse !
    – Quelle joie ! s’écria Jacquemin dans un transport ! Ah ! c’en est une, d’aventure ! Un conte ! Un vrai conte !…
    – Un comte breton. Oh ! je sais qu’il est noble comme le roi. Cela se voit assez à son air et à ses manières.
    – Vous croyez ? fit Corentin. Au fait, c’est bien possible. Comme le roi ! C’est un peu trop, tout de même…
    – Oh ! C’est une manière de parler, dit Denise.
    – C’est bien ainsi que je l’entends, fit modestement Jacquemin.
    Ils étaient arrivés devant la porte de dame Jérôme Dimanche.
    Denise, gentiment, se haussa sur la pointe de ses petits pieds, et tendit sa joue :
    – Vous m’avez sauvée, dit-elle. Et puis… vous m’avez parlé de Jacquemin en des termes qui m’ont été au cœur. Vous pouvez donc m’embrasser…
    – Moi ? fit Jacquemin épouvanté. Que… je vous embrasse ?
    – Oui, fit-elle toute souriante, et toute rose. Vous en avez bien le droit…
    – Le droit ! Le droit ! songea Corentin exaspéré. Je le crois bien, puisqu’elle m’aime ! Le droit, oui ! Mais la possibilité ?…
    – Eh bien ? acheva Denise, vous n’osez pas ? Je vous permets d’oser, allez !
    – Remettons ! fit précipitamment Jacquemin. Remettons, je vous en supplie ! Je vous embrasserai plus tard… tenez… oui, tenez, après le mariage !
    – Soit ! dit Denise en riant. Je vous dois donc un baiser, et vous le promets de grand cœur pour le jour du mariage… dans trois jours !
    Là-dessus, elle eut un joli geste d’adieu qui acheva de griser Corentin, et de lui tournebouler la cervelle, – et elle disparut légèrement dans le logis.
    Corentin demeura là un bon quart d’heure, planté sur ses échasses, méditant, louchant, soupirant, invectivant son nez qui le privait du plaisir d’embrasser sa fiancée…
    Enfin, il entra à l’auberge de la Devinière, s’assit à une table dans le coin le plus sombre, se fit apporter un flacon de vin, et se mit à boire en méditant sur cette si jolie aventure à laquelle il n’osait croire.
    – Ma fiancée ! se disait-il. J’ai une fiancée ! Moi, Jacquemin Corentin ! Il s’est trouvé une fille, une jolie fille pour m’aimer ! Moi !… Pour me préférer à don Juan Tenorio !… Moi !… quelle aventure !… Mais que va dire le seigneur Juan quand il saura que ce n’est pas lui qu’on épouse, mais moi, moi, dis-je ! Moi, Jacquemin Corentin ! C’est moi qu’elle veut ! Par le ciel et la terre ! par l’air et le feu ! par les saints ! par l’enfer ! par le pape ! je la veux épouser sous trois jours, au nez de mon maître !…
    Ce mot le ramena à son propre nez sur lequel il se mit à loucher tantôt avec complaisance, tantôt avec tristesse, tantôt avec rage, tantôt avec attendrissement.
    Vers la troisième bouteille, Jacquemin Corentin en était à plaindre don Juan.
    – Pauvre diable ! se disait-il. Quel

Weitere Kostenlose Bücher