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Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie

Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie

Titel: Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnauld d'Abbadie
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d'éprouver la fidélité de ce prince était de donner le Dambya à Birro. Ils espéraient ainsi déterminer le Dedjazmatch à se coaliser ouvertement avec les fils de Conefo, auquel cas le Ras serait dans l'obligation de marcher contre eux; ou bien, en engageant son amour-propre paternel, ils espéraient le pousser à livrer bataille à une armée nombreuse qui les gênait. Si le Dedjadj Guoscho était vaincu, ce serait un ennemi de moins pour eux; s'il était vainqueur, il se serait affaibli par sa victoire même, puisqu'il aurait dispersé l'armée du Conefo, qui ne demandait qu'à faire cause commune avec lui. De plus, Birro, que le Ras, sans l'avouer, tenait surtout à atteindre, en prenant possession du gouvernement du Dambya, province ouverte et contiguë au Bégamdir, se trouverait ainsi à la discrétion du Ras. Ils cherchaient fort justement, à leur point de vue, à précipiter ces événements, afin d'empêcher une coalition présumable entre le Dedjadj Guoscho, le Lidj Ilma et le Dedjadj Oubié, que son indécision seule empêchait de se joindre à la ligue chrétienne, dont les forces réunies pouvaient presque sans combat balayer du Bégamdir la puissance du Ras, qui ne devait sa durée qu'à la division du parti chrétien.
    Sitôt que le Lidj Ilma fut informé de la publication à Dabra Tabor du ban qui investissait Birro du gouvernement du Dambya et de l'Agaw Médir, il offrit au Dedjadj Guoscho de se mettre sous ses ordres pour marcher incontinent contre le Ras qu'ils pouvaient combattre avec avantage en l'attaquant à l'improviste.
    La position du Dedjadj Guoscho devenait embarrassante. Malgré le ban publié à Dabra Tabor, Birro était impuissant à prendre sans aide possession de son investiture que l'armée de Conefo ne céderait pas sans combat; et s'il refusait d'aller installer son fils en Dambya, il froissait l'ambition de ce dernier, rompait avec le Ras, se réduisait à marcher contre lui avec Ilma; et dans le cas où le sort des armes leur serait favorable, l'ambitieux Dedjadj Oubié ne manquerait pas l'occasion de l'attaquer avec son armée déjà prête, sans lui laisser le temps de réunir les ressources militaires des provinces nouvellement conquises. D'autre part, s'il battait l'armée d'Ilma, il détruisait une force imposante, prête à servir ses propres desseins, et dont la connivence éventuelle réduisait actuellement le Ras à compter avec lui. D'ailleurs Birro, en possession de son nouveau gouvernement, serait contraint de séjourner loin de lui en Dambya, où il serait en butte à l'hostilité de vassaux mécontents du dépouillement de leur bien-aimé Conefo, et à la discrétion du Ras qui, avec sa nombreuse cavalerie, pourrait l'atteindre à l'improviste en une seule nuit. Enfin, s'il échouait devant l'armée d'Ilma, un peu plus nombreuse que la sienne, et la plus aguerrie de l'Éthiopie, il se ruinait, confirmait la position du Ras en le débarrassant de lui, et il justifiait l'opinion publique contraire à la dépossession de ses pupilles, sans sauver ces jeunes princes contre lesquels le Ras marcherait le lendemain.
    Parmi ses conseillers, quelques-uns, mettant en première ligne l'intérêt de sa gloire, voulaient que plutôt que d'encourir les reproches d'orphelins qui lui étaient confiés, il affrontât les péripéties d'une lutte inégale contre le Ras; mais la majorité du conseil soutenait spécieusement l'opportunité d'une conduite opposée. Les fils de Conefo pouvaient céder à la première sommation du Prince: dans ce cas, il les abriterait chez lui, en attendant des circonstances meilleures; si au contraire il était réduit à les dompter par les armes, il les recueillerait de même, car s'il refusait de les déposséder en faveur de Birro, le Ras marcherait lui-même peut-être contre eux, et il était préférable que le Dedjadj Guoscho se chargeât de ce soin, afin d'éviter au moins à ses pupilles le danger de tomber en d'autres mains. Pour ce qui était de s'en faire des alliés contre le Ras, leur inexpérience, leur ambition et l'instabilité de leur conseil les rendaient trop accessibles à l'offre, que le Ras ne manquerait pas de leur faire, de les confirmer dans l'investiture de leur père, à condition qu'ils déserteraient leur tuteur. Enfin, cette considération que l'opinion publique s'était prononcée en faveur des fils du Dedjadj Conefo, ne devait pas arrêter cette fois: quelque respectable que fût l'opinion publique, il ne fallait

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