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Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie

Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie

Titel: Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnauld d'Abbadie
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unanimes à s'y opposer. L'un d'eux, l'Azzage Fanta, Biarque du Damote, fut choisi comme envoyé auprès d'Ali et de sa mère, pour leur représenter que le voyage du Dedjazmatch à Dabra Tabor, au plus fort de l'hiver, prêterait aux événements une importance exagérée, et, loin de rassurer le pays, l'inquiéterait; que le Dedjazmatch répondait de la conduite et des actes de Birro jusqu'au printemps, époque à laquelle il irait s'entendre avec eux, et que, jusque là, il convenait, selon lui, de ne pas tenir séparé Birro de sa jeune femme; qu'on pouvait la confier à l'Azzage Fanta, et que lui-même veillerait sur elle, comme sur sa propre fille.
    Le but de sa mission était de démêler les intentions secrètes du Ras à l'égard du Dedjadj Guoscho, comme aussi à l'égard des fils de Conefo, et si enfin, comme on le disait, le Ras serait bien aise de rompre le mariage de sa sœur avec Birro. Il devait, à tout prix, obtenir que la jeune femme fût renvoyée à son mari. Il devait en outre s'assurer de la sincérité des encouragements que la Waïzoro Manann faisait tenir secrètement à Birro.
    Le Dedjazmatch prévint le Ras Ali et sa mère, par un messager spécial, qu'il leur envoyait l'Azzage Fanta, un de ses plus intimes conseillers, pour leur expliquer toute sa pensée et pour le suppléer en tout auprès d'eux. Deux jours après, Fanta partit.
    Cet envoyé commençait alors une fortune qu'il devait tourner plus tard contre son maître. D'une belle prestance et doué d'une parole facile, souple, réservé, prudent, plein de ressources dans le conseil, cauteleux, ambitieux quoique peu fait pour la guerre, à la fois grave et spirituel, administrateur excellent, cupide, mais généreux à propos, habile à enlacer ceux qu'il voulait gagner, l'Azzage Fanta était le meilleur négociateur qu'on pût choisir.
    Le Ras se montra prêt à oublier les torts de Birro, mais il allégua ne pouvoir exposer sa sœur aux intempéries d'un voyage que la saison où l'on était rendait pénible même pour un homme; il la renverrait au printemps, et, jusque-là, pour prouver au Dedjadj Guoscho son désir de rester uni avec lui, il investissait Birro des districts importants de l'Ibaba et du Metcha, situés sur les frontières du Damote, où il serait davantage sous le contrôle paternel. Le Dedjadj Guoscho accueillit cette faveur avec une défiance que l'Azzage Fanta confirma pleinement à son retour. Néanmoins, Birro se rendit dans son nouveau gouvernement, après être venu passer deux jours à Goudara pour s'entendre avec son père.
    Trois semaines plus tard, le Ras Ali accrut encore les défiances, en conférant inopinément à Birro l'investiture du gouvernement de Conefo.
    Les motifs qu'il donnait ne déguisaient qu'imparfaitement sa perfidie. Il ne pouvait se résoudre, disait-il, à marcher contre les fils de son vassal regretté, aveuglés par les conseils de notables ambitieux et d'une armée turbulente; et comme leur père, en mourant, les avait recommandés au Dedjadj Guoscho, il ne doutait pas qu'ils ne missent bas les armes devant la volonté d'un si bon tuteur, pour céder la place à Birro, qui, de son côté, ne pouvait manquer d'agir envers eux comme un frère. Si son choix s'était détourné de tant d'illustres candidats pour confier à Birro un gouvernement si important, c'est qu'il se sentait assez généreux pour lui prouver, ainsi qu'aux enfants de Conefo, qu'il oubliait les torts des fils en considération de son affection pour les pères. Il comptait, du reste, que son beau-frère surtout s'efforcerait, par ses loyaux services, de dissiper le nuage qui s'était élevé entre eux.
    La répugnance du Ras à marcher contre le Lidj Ilma provenait bien moins de sa reconnaissance pour les services de Conefo, que de l'humiliation qu'il éprouvait à montrer que, malgré ses prétentions à la suzeraineté sur toute l'Éthiopie, il en était réduit à prendre lui-même les armes pour valider l'investiture d'une province contiguë à son domaine personnel. Les chefs du parti musulman que le Fit-worari Birro avait offensés par ses dédains durant la campagne en Idjou, voulaient profiter de la rancune assez légitime que le Ras nourrissait contre lui pour le perdre, et pour perdre du même coup le Dedjadj Guoscho, le Lidj Ilma, et amoindrir enfin l'ascendant de la Waïzoro Manann et du parti chrétien en Bégamdir. Ils représentaient au Ras, qui tenait encore au Dedjadj Guoscho, que le moyen

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