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Du sang sur Rome

Du sang sur Rome

Titel: Du sang sur Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Saylor
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était-il un meilleur
maître que Capito ?
    Il avait l’air mal à l’aise, comme un homme à la vessie trop
pleine. Il eut un hochement imperceptible.
    — Accepterais-tu de m’aider si je te disais que je suis
un ami de Sextus ? Peut-être le seul ami qu’il lui reste ? Il faut
absolument que je le sache : où sont Félix et Chrestus ?
    Il eut l’air encore plus malheureux comme s’il allait m’annoncer
leur mort. Il regarda derrière lui.
    — À Rome. Mon maître les a échangés avec son associé,
celui qui a pris possession de la fortune de Sextus Roscius.
    — Tu veux dire Magnus ?
    — Non, l’autre. (Il baissa la voix.) Le richissime.
Félix et Chrestus sont à Rome. Ils appartiennent à la maisonnée d’un homme du
nom de Chrysogonus.
    En grec, cela veut dire « recouvert d’or » !
Un instant, le nom flotta à mes oreilles et revint soudain me frapper de plein
fouet. Sans le vouloir, l’esclave m’avait remis une clef, une clef en or pour
ouvrir le mystère du meurtre de Sextus Roscius.
    Capito continuait à brailler et sa femme à crier en retour.
    — Ne dis rien à ton maître. Tu m’entends ? Pas un
traître mot.
    Je remontai en selle. Croyant que nous étions arrivés à
destination, Vespa s’ébroua et broncha en signe de rébellion. Je lui parlai à l’oreille
et chevauchai en surveillant mes arrières. Il ne fallait pas que Capito me
voie. Nul ne devait savoir que j’étais passé par ici, ni où j’allais.
Chrysogonus, me répétai-je, consterné par l’énormité de la chose. Je tremblai
de peur. Certes, le danger me menaçait depuis le début, mais j’avais maintenant
des yeux pour le voir.
    Je retrouvai la route qui menait chez Titus Megarus. Dans le
ciel assombri, le tortillon de fumée s’élevait comme une promesse de confort et
de repos. Je pris une petite montée et vis soudain deux cavaliers arriver de la
voie Flaminia. Leurs montures allaient au pas, elles paraissaient aussi
fourbues que la mienne. Les hommes semblaient somnoler. Ils relevèrent la tête
l’un après l’autre à mon approche, et je vis leurs visages.
    C’étaient deux grands gaillards, dont la tunique légère
laissait à découvert les épaules musclées. Ils avaient le menton rasé. Celui de
droite avait les cheveux bruns, des yeux sombres et une bouche cruelle. Il
tenait les rênes dans la main gauche. L’autre avait une tignasse couleur paille
et l’allure pesante d’une grosse brute. Sur une de ses joues apparaissaient trois
griffures rouges parallèles.
    Mon cœur se mit à cogner si fort dans ma poitrine que j’eus
peur qu’ils ne l’entendent. Ils me regardèrent passer froidement. Je réussis à
leur faire un timide salut. Ils ne répondirent pas, gardant les yeux sur la
route. Je hâtai le pas. Quand j’osai me retourner en haut de la côte, je vis qu’ils
prenaient le chemin de la maison de Capito.

3
    — Le brun, dit mon hôte, oui, ça doit être Magnus. Il
boite depuis des années ; personne ne sait pourquoi au juste. Il en a
donné différentes versions : parfois, c’est une catin prise de folie qui l’a
attaqué, parfois un mari jaloux, ou encore un ivrogne. Mais il prétend toujours
avoir tué le coupable. C’est sans doute la vérité.
    — Et l’autre, le grand blond hideux ?
    — Mallius Glaucia. Son ancien esclave, devenu son bras
droit. Magnus passe beaucoup de temps à Rome, tandis que Capito se consacre à
sa propriété ; Glaucia court de l’un à l’autre comme un chien après un os.
    La nuit foisonnait d’étoiles. Le clair de lune teintait les
collines d’argent à perte de vue. Nous étions assis sur la terrasse de Megarus.
Au-delà des hauteurs qui marquaient l’horizon, quelque part coulait le Tibre.
Plus près de nous, des lumières disséminées signalaient la ville d’Ameria. À
travers les arbres, on devinait l’étage supérieur, pas plus gros que l’ongle,
de la maison où Capito, Magnus et Glaucia s’étaient rassemblés pour la nuit.
Une unique fenêtre brillait, d’une pâle lumière ocre.
    Sans être mondain, Titus Megarus était un hôte parfait. Il
était venu m’accueillir en personne, et s’assura immédiatement que Vespa
trouverait place à l’écurie. Il évita toute discussion à table, prétendant qu’elles
étaient mauvaises pour la digestion. En revanche, chacun de ses enfants chanta
à tour de rôle. La nourriture était copieuse et fraîche, le vin excellent. Au
fur et à mesure, je me détendis,

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