Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Du sang sur Rome

Du sang sur Rome

Titel: Du sang sur Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Saylor
Vom Netzwerk:
que moi de quitter le bourg
de Narnia. Je la talonnai sans relâche durant la dernière étape. Arrivée à une
fourche juste au nord de la ville, elle parut renâcler.
    Il y avait une auge à l’embranchement ; je fis boire
Vespa en prenant soin de retenir les rênes après chaque lampée. Un crâne de
bouc était fiché sur un bâton. Sur le front blanchi, on lisait AMERIA au-dessus
d’une flèche pointée vers la gauche.
    Je quittai la voie Flaminia et pris le chemin qui serpentait
jusqu’à un plateau escarpé. Pour la première fois, ma monture donnait des
signes de fatigue ; quant à moi, mes reins me faisaient atrocement mal.
Seule consolation, le talus nous assurait une ombre propice.
    Arrivé presque au sommet, je tombai sur un groupe d’esclaves
autour d’un char à bœufs. Ils tentaient de le pousser sur la crête, serrés les
uns contre les autres. Le véhicule tanguait et dérapait. Je rattrapai le
conducteur et le saluai de la main.
    — Tu prends souvent cette route ?
    Le garçon sursauta à ma voix, puis me sourit.
    — Seulement quand il faut livrer de la marchandise au
marché de Narnia. C’est la descente qui est dangereuse.
    — Je le crois sans peine.
    — Nous y avons laissé un esclave l’année dernière. Il
est tombé sous les roues en aidant à freiner. La pente est moins raide vers
Ameria.
    — Voilà qui plaira à mon cheval.
    — C’est une bête superbe, fit-il avec un regard de
connaisseur.
    — Tu es d’Ameria ?
    — D’à côté, au pied de la colline. Juste en dehors de
la ville.
    — Pourrais-tu m’indiquer où se trouve la maison de
Sextus Roscius ?
    — Mais, oui. Sauf que Sextus Roscius n’y habite plus.
    — Tu parles du vieux Roscius ?
    — Celui qui s’est fait assassiner ? Si c’est lui
que tu cherches, tu trouveras ses restes dans le cimetière de famille. Il n’a
jamais vécu à Ameria, que je sache.
    — Non, je voulais dire son fils.
    — Son fils était le voisin de mon père, si c’est bien
le Roscius qui a deux filles.
    — C’est cela. Il en a une de ton âge à peu près ;
une très jolie fille.
    — Très jolie, et très gentille, aussi.
    Le garçon prit l’air avantageux. Je revis en un éclair le
corps de Roscia, vibrant de plaisir, son amant agenouillé à ses pieds. Tiron n’avait
peut-être pas été le premier.
    — Indique-moi sa maison.
    — Je veux bien, mais comme je te dis, ce n’est plus sa
maison. Ils en ont chassé Sextus Roscius.
    — Quand ça ?
    — Il y a deux mois.
    — Pour quelle raison ?
    — Une loi édictée par Rome. Son père a été proscrit. Tu
sais ce que ça veut dire ?
    — Je ne le sais que trop.
    Il se passa un doigt en travers de la gorge.
    — Et après, on te prend toutes tes terres et ton
argent. Rien n’est laissé à la famille. Il y a eu des enchères, là-bas à Rome.
Mon père aurait bien voulu y participer, surtout pour les terrains mitoyens des
nôtres, mais à quoi bon ? Il dit que tout est pipé. Il faut être un ami d’ami
de Sylla, ou graisser la patte à l’entrée.
    C’était la deuxième fois qu’on me servait cette histoire de
proscription. Elle n’avait pas de sens, mais si c’était vrai, cela aiderait à
innocenter Sextus.
    — Dis-moi, qui y habite maintenant ?
    — Le vieux Capito. Il a racheté la maison de famille et
les meilleurs champs. Mon père a craché par terre quand il a su qui on aurait
pour voisin. Capito a permis à la famille Roscius d’y passer l’hiver. Cela
semblait la moindre des choses, qu’il les prenne en pitié. Puis, il les a
expulsés pour de bon.
    — Et personne d’autre ne pouvait les recueillir ?
Sextus Roscius devait avoir des relations, tout de même ?
    — Tu serais étonné de la vitesse à laquelle on perd ses
amis, quand les ennuis viennent de Rome ; c’est ce que dit mon père. D’ailleurs,
c’était un solitaire. Au fond, mon père était ce qu’il avait de plus proche, en
tant que voisin et tout. Il a passé quelques jours sous notre toit, avec sa
femme et ses filles… (Le garçon baissa la voix. Je vis à son regard qu’il
pensait à Roscia.) Il n’est pas resté longtemps dans le pays ; il est
parti pour Rome. On dit que le vieux Sextus avait une protectrice influente et
qu’il s’est adressé à elle.
    Nous continuâmes en silence. Les roues du char à bœufs
grinçaient et claquaient dans les ornières ; les esclaves traînaient
derrière.
    — Tu dis qu’il a été

Weitere Kostenlose Bücher