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Emile Zola

Emile Zola

Titel: Emile Zola Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edmond Lepelletier
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différent à sa conception.
    Je me souviens qu'entre modernistes, lorsque nous nous préoccupions de rechercher et de signaler les monuments, les oeuvres susceptibles d'affirmer la grandeur et la poésie du présent, sans nier ni rabaisser pour cela les belles et grandes choses du passé, nous parlions souvent des Halles. J'étais l'un des admirateurs du hardi et élégant palais de fer érigé par Baltard sur les plans de Hauréau. J'avais formulé cet enthousiasme pour la modernité architecturale, dans le premier article qui sortit de ma plume naïve : cet article, dont j'ai perdu le texte, mais retenu le titre et la donnée, s'appelait : l'Art et la Science. J'y indiquais un rajeunissement des formules épuisées, un renouvellement des conceptions usées, par l'adjonction de la science. C'était surtout l'architecture, qui me paraissait avoir fait son temps, et réclamer du neuf.
    Les ogives et les arceaux gothiques n'avaient-ils pas magnifiquement et longuement rempli leur rôle d'utilité et de beauté ? Il s'agissait, maintenant, puisque l'homme moderne avait besoin de gares, de docks, de théâtres, d'hôpitaux, comme le contemporain de Philippe-Auguste réclamait des cathédrales et des monastères, de concevoir et d'élever des édifices modernes, traduisant le voeu, l'enthousiasme, la foi des générations scientifiques, positivistes et industrielles du siècle de la vapeur et de l'électricité.
    Sans contester le charme de Saint-Séverin, la délicatesse de Saint-Julien-le-Pauvre, et la majesté compacte de Saint-Eustache, j'exaltais, peut-être avec excès l'Opéra de Garnier et les Halles de Baltard. Avec Zola, nous parlions souvent de la beauté intrinsèque de cet art tout récent, que nos contemporains semblaient ne point voir, et dont la plupart se refusaient à admettre le double caractère utilitaire et esthétique. L'idée lui était venue, flottant en l'air, éparse dans nos propos, sommairement indiquée dans nos articles, discutée, combattue, approuvée, commentée, d'écrire un livre ayant les Halles pour décor et pour scène. Ce thème l'enchantait. Son système des milieux et des grands cadres participant à l'action, s'y incorporant, allait trouver là un propice sujet d'application. Le Ventre de Paris fut le premier de ses romans ayant le «milieu» pour sujet principal, presque pour intrigue. Comme, dans les tragédies antiques, le choeur intervient dans l'action. Il mêle son âme à celle des personnages. Il les anime. Il les explique. Participant à leurs passions, à leurs douleurs, il prend une part si importante aux événements, qu'il semble jouer un premier rôle.
    Dans plusieurs des volumes de la série des Rougon-Macquart, le lieu où se passe le drame, le décor des scènes, le cadre des tableaux deviennent ce qu'est, dans les romans d'imagination, dans les récits d'aventures, dans les péripéties de cape et d'épée, le Héros.
    Dans Germinal, c'est la mine qui est le véritable protagoniste de la tragédie souterraine, et successivement ainsi nous aurons le roman de la Maison Bourgeoise, de la Maison Paysanne, de la Maison Ouvrière, de la Bourse, des Grands Magasins, des Chemins de fer, de l'Usine, enfin du Camp, et du Champ de bataille.
    Le Ventre de Paris, c'est donc avant tout le roman des Halles Centrales.
    Zola fut attiré par le spectacle bigarré, fourmillant, ultra-vivant de ce quartier alimentaire qu'il fréquentait, qu'il observait au passage, qu'il se mit à étudier et de près, toujours avec son pince-nez de myope ardemment fixé sur les êtres et sur les choses. Oh ! rien ne lui échappa du bazar de la mangeaille. Avec sa méthode d'investigation patiente et de vérification documentaire, dont il commençait à user avec une sûreté surprenante, et une précision presque infaillible, doué d'une faculté de perception quasi-instantanée et d'une puissance prompte d'assimilation, il inspecta, posséda ses halles. Paul Alexis a très bien raconté les promenades préparatoires, pour le roman en gestation, qu'il fit, à diverses époques, avec Zola, dans les Halles et par les rues environnantes :
       Une fois, dit-il, en nous en allant, arrivés à un certain endroit de la rue Montmartre, il me dit tout à coup : «Retournez-vous et regardez !» C'était extraordinaire : vues de cet endroit, les toitures des halles avaient un aspect saisissant. Dans le grandissement de la nuit tombante, on eût dit un entassement de palais babyloniens empilés

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