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En Nos Vertes Années

En Nos Vertes Années

Titel: En Nos Vertes Années Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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souffle.
    — Je parlerai, dit-il, en
premier de la bibliothèque de l’École. En 1534 elle était riche de 52 volumes.
Elle en compte à ce jour 86. Elle s’est donc accrue de 32 volumes en 36 ans.
Cet accroissement ne laisse pas d’être conséquent, les livres étant si coûteux,
mais j’aimerais que nous puissions acheter désormais deux volumes par an. Nous
allons donc dispenser l’écolier, qui est nouvellement promu bachelier, du
banquet qu’il doit à l’école pour peu qu’il fasse don d’un écu à la
bibliothèque.
    Ici, bien que contenue et comme
étouffée, l’indignation fut si vive et si unanime sur les bancs des écoliers
que Saporta tapa de son maillet sur la table et sans attendre que Figairasse
fît siffler sa verge, demanda d’un ton menaçant :
    — Qui veut parler ?
    — Moi, avec votre permission,
Monsieur le Chancelier, dit non sans courage Merdanson en se levant.
    — Merdanson, dit Saporta,
parlez-vous en votre nom seul ou êtes-vous mandaté par vos pairs ?
    Comme je le compris vite, c’était là
un piège insidieux, et Merdanson y vint donner du nez comme un étourneau.
    — J’ai reçu mandat de mes
pairs, dit-il. Ils m’ont élu Abbé des Écoliers.
    — Vous n’êtes rien de ce
genre ! s’écria le Chancelier d’une voix tonnante qui fit trembler les
vitres dans leur sertissage de plomb ; le titre et la charge d’Abbé des
Écoliers ont été supprimés par un arrêt des Grands Jours de Béziers, d’aucuns
de ces soi-disant abbés ayant vilainement abusé de leurs pouvoirs pour mener
les novices aux étuves, les accointer avec les gouges qui grouillent en ces
lieux et, par leur entremise, les dépouiller de leurs pécunes, voire même, de
leur vêture. Les beaux abbés que voilà !
    — Mais je n’ai rien fait de ces
abominations, dit Merdanson, fort honteux et vergogné, et le front devenant
aussi rouge que son flamboyant cheveu.
    — En effet, mais vous avez été
élu fort illégalement Abbé des Écoliers, et vous osez maintenant affronter vos
régents en excipant d’un titre que vous n’avez pas.
    — Mais, dit Merdanson, la
coutume de l’élection de l’Abbé s’était rétablie céans sous le Chancelier
Rondelet.
    — Je suis le Chancelier de
cette École, dit Saporta en se redressant avec un brillement farouche de l’œil,
et sous ma chancellerie, jamais coutume ne prévaudra contre loi. Merdanson,
vous n’êtes rien que vous-même, et si vous voulez parler, parlez en votre nom.
    — Monsieur le Chancelier, dit
Merdanson en faisant un visible effort pour regrouper ses forces, ayant été
taillé en pièces à la première escarmouche.
    — Je vous ois, dit Saporta d’un
ton qui montrait bien que son ouïe n’était ouverte qu’à demi.
    — Monsieur le Chancelier,
reprit l’écolier, voici ce que nous opinons…
    — Merdanson, coupa Saporta,
êtes-vous le Roi de France pour opiner au pluriel ?…
    — Monsieur le Chancelier, dit
Merdanson, rejeté une deuxième fois dans ses lignes, j’opine qu’il est
contraire à la tradition de supprimer le banquet que le bachelier promu doit à
l’école.
    — Débouchez vos grandes
oreilles, Merdanson, dit le Chancelier. Vous avez mal entendu le Doyen Bazin.
Le banquet n’est point supprimé. Le bachelier promu a le choix de le bailler à
l’école ou, en place du banquet, de bailler un écu à la bibliothèque.
    Par cette renarde réponse – car
enfin qui allait dépenser cinq livres tournois pour un banquet quand la
bibliothèque, elle, n’exigeait qu’un écu ? – Merdanson eut le bec
cloué, et défait, se rassit. Et combien que la victoire de Saporta n’eût pas
été acquise par d’irréprochables moyens, néanmoins j’admirais sa chattemitesse
ruse et aussi le bon sens des professeurs royaux, car, à ce que j’ai souvent
ouï dire à mon père, les écoles des médecins comme des légistes abusent par
tout le royaume de ces festins ruineux qui pourtant ne laissent rien le
lendemain qu’un tas de bren aux latrines, alors que les pécunes qu’ils coûtent
seraient mieux employées à fournir les studieux en livres.
    — Monsieur le Doyen,
poursuivez, dit Saporta avec un geste royal de la main qui irrita fort Bazin, à
ce qu’il m’apparut.
    — Secundo, dit le Docteur
Bazin, les dissections coûtent fort cher, et à l’école, et aux écoliers. Sous
le Chancelier Rondelet, on a poussé l’abus jusqu’à en pratiquer six par an,
alors que l’arrêt des

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