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En Nos Vertes Années

En Nos Vertes Années

Titel: En Nos Vertes Années Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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terrible : vous avez
tâché de rétablir l’Initiation que j’avais interdite.
    Ici Merdanson, frappé d’une pâleur
extrême, fit « oui » de la tête sans pouvoir un mot articuler, tant
il craignait, comme il me le dit plus tard, d’être exclu de l’École, aimant la
médecine de grande et passionnée amour, tout rustre qu’il fût ou parût.
    — Monsieur le Chancelier,
peux-je parler ? dis-je, sentant que l’affaire se gâtait fort pour
Merdanson et désirant avec lui recoudre et faire ma paix.
    — Vous le pouvez, Siorac.
    — Je confesse en vos mains que
j’ai beaucoup envenimé la disputation par des paroles dures et piquantes :
j’ai accusé Merdanson de confondre sa bouche avec son anus.
    Ici il se passa une chose fort
étrange : le Chancelier Saporta sourit. Et que le sourire fût sincère ou
calculé, je ne sais. En tout cas, comme pour encourager la bonace que
l’égaiement du Chancelier paraissait annoncer, d’Assas et Fogacer se hâtèrent,
à leur tour, de sourire, sans pour autant que les écoliers, tout confortés
qu’ils fussent, osassent encore les imiter.
    — Siorac, dit le Chancelier,
avec une sorte de gronderie bonhomme que je ne lui avais jamais vue, c’était
là, en effet, gausserie fort damnable et je la retiens comme atténuante, dans
les charges qui pèsent sur Merdanson. Je retiens également comme atténuant ces
charges le fait que Merdanson ait eu l’intention de rétablir l’Initiation sans,
cependant, l’avoir rétablie dans les faits.
    À ouïr ces paroles, aussi captieuses
et scolastiques en leur forme qu’habiles et clémentes en leur fond, Merdanson
poussa un profond soupir tant il se sentit plus léger d’avoir évité le pire.
    — Cependant, dit Saporta avec
un brusque et apparent retour d’implacable sévérité, Merdanson ne peut nier
avoir provoqué ce tumulte.
    — Monsieur le Chancelier, dit
Merdanson avec ce qui ressemblait fort à un élan de gratitude, je ne le nie
pas.
    — Voici donc mon verdict, dit
le Chancelier Saporta en ôtant son bonnet de docteur, en quoi incontinent
d’Assas et Fogacer l’imitèrent. Je condamne Merdanson à recevoir de la main de
M. le Bedeau Figairasse dix coups de verge. À quoi pour ce qu’il a suscité ce
tumulte, j’en ajoute dix autres. Je condamne Siorac à recevoir mêmement dix
coups de verge. À quoi j’en ajoute dix autres pour ce qu’il est mon fils.
    Ha ! pensai-je, ces dix-là,
pour être paternels, ne m’en feront pas moins mal !
    — Merdanson, poursuivit le
Chancelier, acceptez-vous mon verdict ?
    — Oui, Monsieur le Chancelier,
dit Merdanson.
    — Siorac, acceptez-vous mon
verdict ?
    — Oui, Monsieur mon père,
dis-je, trouvant cependant, à part moi, que le fils faisait un peu trop les
frais de la balance que le père entendait maintenir, dans le châtiment, entre
novices et anciens.
    — La punition, poursuivit
Saporta, sera purgée céans et sur l’heure sous l’œil des écoliers et en
présence du Docteur d’Assas et du bachelier Fogacer.
    Un silence suivit que Saporta, je
gage, savoura fort, mais que beaucoup moins je goûtai, et qui fut rompu, au
prodigieux étonnement de tous, par mon gentil Samson.
    — Monsieur le Chancelier,
peux-je parler ? dit-il de sa voix douce et zézayante, et sa belle face
empourprée et comme surprise de son émerveillable audace.
    — Qui êtes-vous ? dit
Saporta qui le savait fort bien, mais qui paraissait comme étonné de la
radieuse apparence de mon frère bien-aimé.
    — Monsieur le Chancelier, je me
nomme Samson de Siorac et je suis compagnon apothicaire.
    — Quoi ? dit Saporta. Vous
êtes compagnon apothicaire et vous demandez la parole en cette assemblée ?
    — En toute humilité, dit
Samson, et tel était l’ascendant de son éclatante beauté que Saporta ne parvint
pas à se courroucer bien que l’envie l’en démangeât.
    — En bien, parlez, dit-il.
    — Monsieur le Chancelier, dit
Samson. J’ai commandé dans la bataille le parti des apothicaires. Je dois donc
être châtié en même guise que mon frère.
    — Monsieur, dit Saporta avec un
demi-sourire, étant constant que vous n’êtes point écolier en cette école, je
ne peux à mon très grand regret vous en appliquer les statuts que, d’ailleurs,
vous n’avez pas juré de respecter. Vous ne serez donc pas fouetté, quelque
désir que vous en ayez.
    Là-dessus, il remit son bonnet carré
et sourit tout à fait, ce qui eut pour effet de

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