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En Nos Vertes Années

En Nos Vertes Années

Titel: En Nos Vertes Années Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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produire chez les écoliers les
rires et même les applaudissements, lesquels grandirent et grossirent jusqu’à
faire au Chancelier un véritable triomphe, tant anciens et novices étaient, en
leur for, infiniment soulagés que tout s’arrangeât si bien, et sur des fesses
qui n’étaient pas les leurs.
     
    *
    * *
     
    Après son verdict, le Chancelier
Saporta put une deuxième fois quitter les lieux, et cette fois sans projet d’y
revenir : son esprit ne nous quittait point, planant sur l’école que
maintenant il dominait et habitait en toutes ses parties.
    — Monsieur l’Écolier Merdanson
et vous aussi Monsieur de Siorac, dit Figairasse, qui, sa trogne rouge fort
réjouie, se paonnait de long en large tout en faisant sonner sa verge d’un air
friand sur le crochet de fer qui remplaçait sa main senestre, avant que de vous
dénuder et de vous agenouiller contre le banc que voilà, je vous ramentevois
que vous devez me bailler quelques sols pour prix de votre exécution.
    — Quoi ? dis-je, dois-je
payer pour être fouetté, et être atteint dans ma bourse autant que dans ma
chair ?
    — La coutume, dit le Docteur d’Assas
qui se trouvait à l’évidence bien marri d’avoir à présider cette exécution, la
coutume veut que le patient dédommage le bedeau du labour qu’il lui donne.
    — Eh bien donc, Monsieur le
Bedeau, dis-je, affectant un ton gaillard, puisque payer il faut, je paierai.
Quel est votre prix ?
    — Il n’y en a pas qu’un, dit
Figairasse, il y en a deux, selon le degré de fouettement que vous choisirez.
    — Révérend Docteur d’Assas,
est-ce là aussi la coutume ?
    — Je le crains, dit d’Assas qui
paraissait fort chagrin de me voir subir ces indignités. Sentiment dont je lui
sus gré, car bien à rebours, l’œil de Fogacer brillait excessivement, mais que
ce fût de compassion, j’en doutais fort, car je retrouvais ce même brillement
dans les yeux des écoliers qui se pressaient autour de Merdanson et de moi, et
sans vergogne se disputaient le premier rang tant ils étaient avides d’observer
le spectacle de notre châtiment.
    — Fort bien donc, dis-je,
Monsieur le Bedeau, quels sont vos prix ?
    — Les prix, dit Figairasse qui
prenait tout son temps et qui, parlant bien, aimait s’ouïr parler, les prix
marchent, comme j’ai dit, avec les degrés que je mets dans le fouettement, et
ces degrés sont au nombre de deux : le premier va jusqu’au sang et c’est
là que je suis censé aller selon la tradition de l’école.
    — Jusqu’au sang ? dis-je,
étonné que j’étais de soutenir seul ce dialogue, Merdanson restant coi, et la
mine fort sombre.
    — Vous m’avez bien ouï.
    — Mais n’est-ce pas
cruel ?
    — Ce l’est, dit Figairasse.
Aussi seuls les écoliers que j’appellerais chiche-faces et pleure-pain
choisissent ce premier degré pour ce qu’il ne coûte que cinq misérables sols.
Mais pour moi, je le tiens en grand déprisement, tant il est brute et sans
finesse.
    — Et le deuxième degré ?
dis-je.
    — Ha ! dit Figairasse, en levant
sa verge au ciel, celui-là demande un doigté infini…
    — Abrégez, Monsieur le Bedeau,
dit le Docteur d’Assas.
    — J’abrège, Révérend Docteur,
dit Figairasse. Encore faut-il expliquer le pourquoi. À ne considérer que
l’intérêt du patient, le deuxième degré n’a que des avantages. Le patient en
est quitte pour quelques zébrures et meurtrissures qui lui donnent pendant deux
jours à peine une petite incommodité à s’asseoir. Cependant, cette méthode ne
laisse pas de me fatiguer tant elle exige de retenue dans la fermeté. Et elle
vous coûtera dix sols, et pas un denier de moins.
    — Samson, dis-je, donne dix
sols pour moi à M. le Bedeau Figairasse.
    — Monsieur l’Écolier, dit
Figairasse, tandis que Samson, les larmes roulant sur sa belle face, lui
comptait l’argent dans le creux de la main – voilà qui est payé comme fils
de bonne maison, rubis sur ongle et sans barguigner. Je vous soignerai de mon
mieux. À vous, Monsieur.
    — Monsieur le Bedeau, dit
Merdanson sortant enfin de son silence, je suis au regret de vous décevoir.
Mais je fus hier avec mes compains chez les gouges de la rue des Etuves, et les
friponnes m’ont tout glouti : mon lait et mes pécunes. Je n’ai plus un
seul sou vaillant.
    — En ce cas, dit Figairasse, la
mine rembrunie et l’œil courroucé, la coutume veut que pour l’insolvable la
punition soit doublée. Ce sera

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