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Faux frère

Faux frère

Titel: Faux frère Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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prieur Roger. Adam of Warfield ne semblait pas très affligé.
    — Nous en avons informé Rome ! précisa-t-il d’une voix rauque. Mais nous n’avons pas encore reçu l’aval pour élire un nouveau prieur.
    Il eut un sourire d’excuse.
    — Je fais ce que je peux !
    — Je n’en doute pas ! rétorqua Corbett.
    Le clerc supportait mal l’air doucereux de son interlocuteur et parcourait du regard la pièce austère, chichement meublée. Il ne pouvait se défaire de l’idée que Warfield cachait son jeu. Il remarqua des restes de sucre fin sur l’habit sombre et décela, sur la table, la tache ronde laissée par un gobelet de vin. Il eut alors la certitude que le sacristain, tout comme le curé de St Laurent, appréciait la bonne chère.
    — Et la mort du père Benedict ? demanda-t-il à brûle-pourpoint.
    Adam of Warfield se raidit :
    — J’ai déjà tout dit à Messire Cade, récrimina-t-il. Nous étions dans notre dortoir lorsque Messire Senche, l’intendant du palais, nous a réveillés. Nous avons fait de notre mieux, mais la maison fut entièrement dévastée par l’incendie.
    — Ne trouvez-vous pas étrange que ce jour-là le père Benedict ait envoyé un message à Cade lui révélant qu’un acte épouvantable, un sacrilège, était en train de se commettre ? Je vous le demande solennellement, Adam of Warfield : que se passe-t-il dans l’abbaye royale qui ait pu ainsi bouleverser ce saint homme ?
    Le sacristain soupira profondément. Corbett sentit des relents de vin.
    — Notre souverain roi, reprit Corbett, aimait beaucoup le père Benedict. Je veux savoir ce qui inquiétait ce digne prêtre, et, croyez-moi, vous ne m’arrêterez pas : je satisferai ma curiosité.
    Le sacristain était manifestement désarçonné, ses mains tiraillaient nerveusement son habit.
    — Le père Benedict était âgé, balbutia-t-il. Il était porté quelquefois à l’affabulation.
    Il étira son cou maigre et Corbett vit soudain une faible marque violette sur le côté de sa gorge. « Comment se fait-il, s’étonna le clerc, qu’un moine de Westminster et un prêtre ordonné, qui plus est, puisse avoir un suçon dans le cou ? » Il l’examina plus attentivement : ce n’était pas une coupure de rasoir ou une écorchure ! Il se leva et alla regarder par la petite fenêtre en losange.
    — Que savez-vous des Dames de sainte Marthe, frère Adam ?
    — Ce sont des dames fort dévotes et généreuses qui se réunissent tous les après-midi dans notre chapitre. Elles consacrent leur temps à prier et à faire le bien, surtout parmi les prostituées de cette ville.
    — Vous approuvez cette activité ?
    — Bien sûr !
    Corbett se retourna à demi.
    — La mort de Lady Somerville vous a-t-elle surpris ?
    — Naturellement !
    — J’ai cru comprendre qu’elle travaillait à la buanderie. Que faisait-elle exactement ?
    Corbett observa le sacristain par-dessus son épaule. Il était livide. Et n’étaient-ce pas des gouttelettes de sueur qui perlaient à son front ?
    — Lady Somerville lavait et prenait un soin particulier des nappes d’autel, linges, chasubles et autres vêtements liturgiques ainsi que des habits monastiques.
    — Savez-vous ce qu’elle voulait dire par «  Cucullus non facit monachum » ?
    — L’habit ne fait pas le moine ?
    Le sacristain eut un sourire caustique.
    — C’est une expression souvent employée par ceux qui ne nous aiment guère pour dire que porter un habit de moine ne suffit pas pour être un bon moine.
    — Vraiment ? intervint Ranulf. Et vous n’êtes pas d’accord, mon frère ?
    Warfield lui lança un regard méprisant et Corbett tambourina sur le rebord de la fenêtre.
    — Donc, vous ignorez à quoi elle faisait allusion ?
    — En effet. Mes relations avec les Dames de sainte Marthe étaient des plus rares. J’ai assez de travail par ailleurs. Je les rencontre quelquefois au chapitre, c’est tout.
    — Bien, bien, bien !
    Corbett revint à son banc.
    — Personne à Westminster ne semble être au courant de rien. N’ai-je pas raison, mon frère ? Bon ! Je voudrais d’abord voir la maison du père Benedict et la porte de la crypte, et ensuite j’aimerais rencontrer les Dames de sainte Marthe. Vous m’avez bien dit qu’elles se réunissaient tous les après-midi ?
    Le sacristain le confirma d’un signe de tête.
    — Alors, mon cher frère, allons-y ! Commençons cette enquête !
    Précédés de Warfield,

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