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Faux frère

Faux frère

Titel: Faux frère Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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ils quittèrent les bâtiments abbatiaux pour traverser à nouveau les jardins à la végétation trop touffue et pénétrer dans un petit verger.
    — Que se passe-t-il donc ici ? s’exclama Ranulf en un murmure peu discret. C’est l’abbaye royale, la demeure royale, mais tout s’en va à vau-l’eau !
    — En fait, c’est le roi qui est responsable ! le reprit Corbett à voix basse. Il est trop occupé en Écosse pour obtenir du pape Boniface {15} que de nouvelles élections aient lieu. Il a retiré sa Maison de Westminster. Il n’a plus de quoi payer maçons et jardiniers. Je ne crois pas qu’il se doute de l’ampleur du désastre. Quand j’en aurai fini avec cette affaire, j’éclairerai sa lanterne.
    — Et les autres s’en moquent comme d’une guigne ! renchérit Cade. Nos riches marchands considèrent Westminster comme un village tandis que les évêques de Cantorbéry et de Londres ne sont que trop heureux d’assister à son déclin.
    Le verger s’éclaircit pour laisser apparaître un petit enclos à la clôture brisée, entourant les ruines calcinées de la cabane du père Benedict. Corbett en fit lentement le tour. Ce n’était pas une construction en torchis, mais en briques découpées par des tailleurs de pierre, ce qui expliquait qu’il en restât plus qu’un tas de cendres. Corbett examina la fenêtre au châssis de bois, encastrée haut dans le mur à huit bons pieds au-dessus du potager.
    — C’est la seule fenêtre ? s’enquit-il.
    — Oui.
    — C’était un toit de chaume ou de tuiles ?
    — De tuiles rouges.
    Corbett s’approcha de la porte d’entrée, encore accrochée de guingois à ses gonds d’acier. Épaisse de deux pouces, elle était en chêne et renforcée de barres.
    — N’y avait-il qu’une porte ?
    — Oui, oui !
    Corbett la poussa et ils parcoururent les décombres noirâtres, fronçant les narines à cause de la puanteur du bois calciné et de la fumée âcre. Ce n’était plus qu’une carcasse vide, aux murs noircis et brûlés. La cheminée, au fond de la pièce, n’était plus que briques qui s’émiettaient.
    — Quel lieu dépouillé ! commenta Corbett à mi-voix. Le lit du père Benedict devait se trouver dans le coin, là-bas, près de la cheminée, non ?
    Warfield fit signe que oui.
    — C’est probablement ici qu’il dormait, étudiait et prenait ses repas, n’est-ce pas ?
    — En effet, Messire. Il n’y avait qu’une seule pièce.
    — Et par terre ?
    — Une simple jonchée.
    Corbett alla jusqu’au coin et fouilla les cendres répandues sur le sol. Il en retira quelques brins et les frotta entre ses doigts : oui, c’était bien une jonchée qui, très sèche, avait dû s’embraser rapidement.
    Il revint vers le centre de la pièce et examina le mur sous la fenêtre, là où l’incendie avait fait rage, transformant le châssis de bois en cendres légères comme de la plume. Le feu avait laissé de profondes cicatrices noires sur le mur et tout réduit en poussière. Corbett se dirigea vers la cheminée et les restes du châlit. Il resta un instant immobile sans se soucier des murmures d’impatience de ses compagnons et gratta les cendres du bout de sa botte.
    — Apporte-moi un bâton, Ranulf.
    Le serviteur sortit rapidement dans le verger et rapporta une longue baguette d’if qu’il tailla avec son poignard. Corbett farfouilla dans les cendres, creusant la terre compacte, se concentrant sur la traînée sombre qui partait directement de la fenêtre. Puis il rejoignit ses compagnons près de la porte.
    — Le père Benedict a été assassiné ! leur annonça-t-il.
    Le sacristain étouffa une exclamation.
    — Eh oui, frère Adam ! Redites-moi ce qui est arrivé lorsque vous avez essayé de combattre les flammes.
    — Eh bien, nous n’avons pas pu atteindre la porte, tellement la chaleur était intense. Nous avons jeté des seaux d’eau sur les murs et par la fenêtre, c’était tout ce qu’on pouvait faire !
    — Et ensuite ?
    — Heu... Le feu s’est éteint et nous avons forcé la porte.
    — Elle était encore verrouillée ?
    — Oui, mais elle branlait sur ses gonds.
    — Et vous avez trouvé le corps du père Benedict à demi calciné ?
    — Oui, juste derrière, avec le cadavre de son chat à côté.
    Le sacristain hocha la tête.
    — Je ne vois pas comment il a pu être assassiné. La porte était verrouillée et il n’y avait qu’une clé. On ne peut guère imaginer que

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