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Fiora et le Pape

Fiora et le Pape

Titel: Fiora et le Pape Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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où nous ferions échouer ses projets ?
    – Il
est absent, vous dis-je ! Et ceux de mes serviteurs qui vous verront sont
venus avec moi de Milan : ils me sont tout dévoués. Hâtez-vous, je vous en
prie ! Si vous voulez vous sauver vous-même tout en préservant la vie de
vos amis, vous n’avez pas le choix. Je vous en dirai plus dans ma litière.
    Cette
fois, Fiora se rendit. Le costume de paysan qu’avait préparé Anna ne pouvait
lui être d’aucun secours et elle choisit de reprendre les habits de dona Juana
qui avaient l’avantage d’être d’une grande discrétion. La Juive les compléta d’un
voile noir, celui que Fiora portait lors de sa fuite étant demeuré attaché aux
balustres du palais Borgia. Puis, au moment de lui rendre l’aumônière, elle
profita de ce que Catarina s’intéressait à une statuette antique placée dans
une niche pour montrer à Fiora, au creux de sa main, un tout petit flacon
enveloppé d’une gaine de plomb et soigneusement bouché qu’elle glissa dans la
poche de velours en murmurant :
    – Si
ton ennemie boit cela, dans du vin ou dans n’importe quoi, elle mourra dans la
semaine sans que personne puisse savoir de quelle maladie. Que Jehovah te garde !
    Fiora
hésita un instant à prendre ce qu’on lui offrait. Le poison était, à ses yeux,
une arme indigne, mais elle ne voulait pas désobliger son hôtesse. Elle chercha
la médaille d’or qui avait appartenu à Juana et voulut la lui donner, mais Anna
refusa :
    – Non.
Tu ne me dois rien puisque l’hospitalité t’a été mesurée. Donne ceci à quelqu’un
qui en aura un plus grand besoin.
    Les
deux femmes s’embrassèrent sous l’œil impatient de Catarina. Khatoun, à qui
elle avait ordonné de rester en bas, venait de monter à son tour, inquiète de
voir le temps passer et craignant peut-être que Fiora ne se fût pas laissé
convaincre.
    – Il
faut venir vite ! Tu peux avoir confiance, tu sais ?
    – J’ai
confiance. Pour que donna Catarina soit venue en personne jusqu’ici, et en
pleine nuit, alors qu’elle devrait être dans son lit où elle va enfanter, il
faut que son intérêt pour moi soit grand.
     
    Confortablement
garnie de matelas de plumes et de coussins épais, fermée par des rideaux de
velours brun doublés de satin blanc et protégée des intempéries par des volets
de cuir armorié, la litière qui attendait donna Catarina possédait toutes les
qualités nécessaires pour couvrir agréablement les plus longs trajets. Les
trois femmes y prirent place. La jeune comtesse avec une satisfaction qui
disait assez sa fatigue. Elle s’étendit de tout son long dans le fouillis
soyeux tandis que Khatoun prenait dans un petit coffre doré un flacon de
liqueur dont elle versa quelques gouttes dans deux gobelets. Elle tendit l’un à
Fiora et fit boire l’autre à sa maîtresse dont les traits venaient de se tirer
et qui fermait les yeux.
    – Vous
auriez dû me laisser venir seule, Madonna ! reprocha-t-elle doucement. C’eût
été plus prudent. De toute façon, votre litière est respectée jusque dans les
endroits les plus dangereux.
    Catarina
rouvrit les yeux, prit le gobelet et avala le reste d’un trait, puis se
redressa un peu :
    – Il
fallait que je vienne. Donna Fiora ne t’aurait peut-être pas suivie sans mon
insistance. Et nous avons à parler.
    – Vos
gardes ne risquent pas d’entendre ? murmura Fiora qui avait bu avec
plaisir l’excellent vin de Chypre qu’on lui avait offert.
    – La
litière est bien close. En outre, le bruit des roues et le pas des chevaux sont
suffisants. D’autant que nous n’allons pas crier. Nous sommes assez près l’une
de l’autre pour que même le cocher n’entende rien. La raison pour laquelle mon
époux a monté ce complot...
    – Je
la connais depuis longtemps, coupa Fiora. Nous savons tous, à Florence, que le
pape souhaite que votre époux devienne seigneur de la ville.
    – Oui,
mais le problème est devenu plus aigu depuis que nous possédons Imola, c’est-à-dire
que nous sommes voisins. Les Médicis morts, Girolamo, mon époux, n’aurait plus
à se soucier d’eux et son pouvoir s’étendrait largement vers la mer. Quant à
Francesco Pazzi...
    – Là
aussi nous sommes au courant. Exilé, il a perdu une partie de sa fortune et,
bien qu’il soit devenu le banquier du pape, il a toujours rêvé de revenir en
force à Florence.
    – Où
demeurent encore la tête de la famille et quelques-uns de ses

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