Furia Azteca
c'est-à-dire, je jure sur elle.
Oc ye nechca : " II était une fois ", diriez-vous, notre pays était une terre o˘ rien n'allait plus vite que la course de nos rapides messagers, sauf lorsque les dieux se déplaçaient, et il n'y avait pas de bruit plus sonore que le cri de nos hérauts, sauf quand les dieux parlaient. Le jour appelé sept Xochitl ou Sept Fleur, dans le mois du Dieu Ascendant, au cours de l'année du Treizième Lapin, Tlaloc, le dieu-pluie, se faisait entendre de toute sa voix dans un orage fracassant. C'était quelque chose d'inhabituel, vu que la saison des pluies aurait d˚ prendre fin. Les esprits Tlaloques qui sont au service du dieu Tlaloc frappaient le ciel de leurs b‚tons à éclairs fourchus, pour faire crever le gros ventre des nuages qui éclataient en rugissant et en grondant et crachaient de violentes bourrasques de pluie.
L'après-midi de ce jour, dans le tumulte de la tempête et dans une petite maison de l'île de Xaltocan, je sortis du ventre de ma mère et commençai mon chemin vers la mort.
Afin que votre chronique soit plus claire - vous voyez que j'ai également pris la peine d'apprendre votre
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calendrier-, j'ai calculé que le jour de ma naissance correspondait au vingtième jour de ce que vous appelez le mois de décembre de votre année mille quatre cent soixante-six. Cela se passait sous le règne de Motecuzoma Ilhuicamina, ce qui signifie Seigneur Vengeur, Celui qui lance des Flèches vers le Ciel. C'était notre Uey tlatoani, c'est-à-dire, notre Orateur Vénéré, titre qui correspond à vos rois et vos empereurs. Mais à
l'époque, le nom de Motecuzoma ou de quiconque ne me disait pas grand-chose.
A ce moment, tout chaud sorti du ventre de ma mère, je fus sans doute bien plus frappé par le fait d'être immédiatement plongé dans un récipient d'eau glacée. Jamais aucune sage-femme n'a pu m'expliquer la raison de .cette coutume, mais je suppose qu'elle se fonde sur la théorie que si le nouveau-né peut survivre à ce choc effroyable, il sera capable de survivre à tous les maux qui l'assailliront au cours de son enfance. En tout cas, j'ai certainement d˚ protester violemment tandis que la sage-femme m'emmaillotait, que ma mère dégageait ses mains de la corde à nouds pendant du toit, qu'elle avait agrippée en s'agenouillant pour m'expulser sur le sol, et que mon père enroulait soigneusement mon cordon ombilical sectionné
autour d'un petit bouclier de guerre en bois qu'il avait sculpté.
Ce témoignage, mon père le donnerait au premier guerrier Mexicatl qu'il rencontrerait pour que celui-ci l'enfouisse quelque part sur le prochain champ de bataille o˘ il se trouverait. A partir de ce moment, mon tonalli -
le sort, la fortune, le destin - quel que soit le nom que vous lui donniez
- aurait d˚ toujours me commander d'être soldat, le plus noble des métiers pour notre classe, et de mourir sur le champ de bataille, mort la plus honorable pour nos pareils. J'ai dit " aurait d˚ ", car bien que mon tonalli m'ait appelé et poussé vers des directions singulières, même au combat, je n'ai jamais souhaité me battre ou périr de mort violente avant mon heure. Je signalerai que selon la coutume pour les petites filles, le cordon ombilical de ma sour Neuf Roseau avait été enfoui moins de deux ans avant, sous l'‚tre de la pièce o˘ nous naquîmes tous deux. Son cordon enterré
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fut enroulé autour d'un petit rouet d'argile afin qu'elle devienne une bonne ménagère banale et dure à la t‚che. Ce ne fut pas le cas. Le tonalli de Neuf Roseau fut aussi capricieux que le mien.
Après m'avoir baigné et emmaillotté, la sage-femme s'adressa directement à
moi en termes solennels - si toutefois je lui en laissai le loisir. Point n'est besoin de dire que je ne raconte pas de mémoire les événements de ma naissance, mais que j'en connais tout le déroulement. Ce que me dit la sage-femme, cet après-midi-là, je l'ai par la suite entendu déclarer à
maints nouveau-nés, comme cela se fait toujours pour les enfants m‚les.
Cela faisait partie des rites accomplis et jamais négligés depuis des temps immémoriaux : les ancêtres morts depuis longtemps transmettaient ainsi, par les vivants, leur sagesse au nouveau-né.
La sage-femme me nomma " Sept Fleur ". Je devrais porter le nom du jour de ma naissance jusqu'à ce que j'aie survécu aux aléas de l'enfance, jusqu'à
l'‚ge de sept ans, ‚ge auquel je serais supposé devoir continuer à
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