Game Over - L’histoire d’Éric Gagné
bien déroulée pour moi. Lorsque je lançais à 85% ou 90% de mes capacités, lâintervention chirurgicale que jâavais subie en juin 2005 semblait être un total succès.
Toutefois, les choses ont commencé à se gâter dans ma phase de préparation finale. Dès le moment où jâai commencé à ouvrir la machine pour aller chercher les six ou sept milles à lâheure supplémentaires dont jâallais avoir besoin durant les matchs, la douleur au coude est réapparue. à chaque lancer, je ressentais une douleur semblable à celle qui nous afflige lorsquâon se cogne le coude sur le coin dâune table.
Jâétais vraiment inquiet. Dâautant plus que le niveau de douleur sâaccroissait de jour en jour.
Comme cela avait été le cas après ma greffe de tendon en 1997, les médecins mâencourageaient à lancer malgré la douleur.
â Il nây a aucune inquiétude à avoir. Ce sont des tissus cicatriciels qui te font mal. Il faut simplement continuer à lancer pour les briser, disaient-ils.
Je savais que quelque chose clochait et, contrarié, je mâobstinais avec eux:
â Je ne suis pas fou. Je sais comment je me sens!
La douleur nâétait pas la même. Et je la ressentais 24 heures sur 24, peu importe les activités auxquelles je me livrais. à la fin, je nâétais même plus capable de dormir la nuit. Câétait insupportable.
Je nâai donc pas été en mesure dâentreprendre la saison 2006. Et dès le début dâavril, les orthopédistes ont décidé de mâopérer à nouveau afin de voir de quoi il en retournait. Leur investigation a révélé que le nerf quâils avaient déplacé durant lâété 2005 avait considérablement grossi et quâil était pour toujours susceptible de provoquer ce genre de complication. Ils mâont donc offert de régler le problème en le coupant et en le retirant, tout simplement.
Jâai accepté, tout en sachant que cette ablation allait aussi avoir pour effet de me faire perdre toute sensibilité à lâavant-bras.
La période de rééducation qui a suivi cette nouvelle intervention sâest prolongée jusquâà la fin mai. Puis, après un très court séjour de remise à niveau avec le club-école AAA de Las Vegas, je suis revenu chez les Dodgers.
Little mâa utilisé une première fois le 2 juin, alors que nous tirions de lâarrière 6-8 contre les Phillies en neuvième. Et les choses se sont très bien déroulées.
Puis le 6 juin, alors que nous détenions une avance de trois points face aux Mets, on mâa demandé de mâéchauffer afin de préserver une première victoire en 359 jours. Jâétais fébrile. Ce sauvetage, en plus, allait écrire une nouvelle page de lâhistoire du baseball québécois. Ainsi quâun petit paragraphe de lâhistoire du baseball majeur.
Russell Martin, qui avait fréquenté la même école secondaire que moi et qui avait fait son apprentissage au sein des mêmes programmes que moi au Québec, était désormais le receveur numéro un de lâorganisation. Mais parce quâil était parvenu à sâaccaparer ce poste pendant mes longues périodes de convalescence, nous nâavions pas encore eu lâoccasion de jouer ensemble dans le cadre dâun match des ligues majeures.
Avec une immense fierté, je me préparais donc à aller rejoindre Russell sur le terrain et à former avec lui la toute première «batterie» francophone de lâhistoire du baseball majeur.
Mais très tôt durant ma période dâéchauffement, jâai commencé à ressentir une douleur atroce au coude droit. Jâai tout de suite su que jâétais fini.
Quand les portes de lâenclos se sont ouvertes, je me suis rendu au monticule la mort dans lââme. Et quand je me suis retrouvé seul sur le monticule, jâai pleuré. Mon corps tombait en morceaux. Ma carrière allait probablement finir ce soir-là et jâétais totalement écÅuré.
Dans ma tête, je ne cessais de répéter:
«Fuckinâ stick to it! Stick to it! Just throw as hard as you can!»
Donne tout ce qui te reste, et si ça casse, ça cassera. Câest tout.
Les trois
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