Game Over - L’histoire d’Éric Gagné
aurait normalement dû me permettre de me tailler une place définitive dans la rotation. Mais je ne parvenais pas à régler mes problèmes de constance. Et mes difficultés ajoutaient aux nombreuses brèches que la direction tentait de colmater au sein de notre personnel de lanceurs.
à la mi-mai, après avoir subi une défaite de 3 à 1 à Montréal (jâavais accordé un circuit au premier frappeur du match, Orlando Cabrera), jâétais tombé dans une période creuse, une chute qui ne semblait plus vouloir finir.
Le 22 mai: six points et un circuit accordés au Colorado (en 4 1/3 manches) dans une défaite de 11 à  8.
Le 28 mai: sept points et un circuit accordés à Los Angeles (en 3 2/3 manches) dans une victoire de 11 à  10 sur les Rockies du Colorado.
Le 3 juin: huit points et deux circuits accordés à Houston (en 2 2/3 manches) dans une défaite de 9 à  8.
Qui dit mieux?
à bout de patience, Tracy avait fini par me sortir de la rotation et je mâétais retrouvé dans lâenclos des releveurs.
Pour les lanceurs partants, un séjour dans lâenclos des releveurs est habituellement synonyme de séjour en enfer. Ou peut-être plutôt de purgatoire où lâon écoule douloureusement le temps en attendant de retomber dans les bonnes grâces du gérant. Mais ce nâétait pas le cas pour moi! On ne me punissait pas lorsquâon mâenvoyait dans le bullpen parce que je mây sentais très bien.
Quand lâorganisation des Dodgers mâavait embauché à lââge de 19 ans, jâétais le releveur numéro un de lâéquipe canadienne. Le closer .
Jâadorais lâadrénaline que ce rôle me procurait. Et mon caractère cadrait parfaitement avec les exigences du poste. Le closer doit sâéchauffer assez rapidement, se concentrer à 100% et donner tout ce quâil a dans le ventre. Rien dâautre que 100%!
En tant que partant, câétait différent. Jâavais de la difficulté à mâinstaller tranquillement au monticule, à gérer le match et à étudier le comportement des frappeurs. Je nâétais pas du genre à gérer mes émotions et à préserver mes forces. Malgré les retentissants succès que jâavais connus dans les ligues mineures, je me savais incapable de lancer à 80% de mes capacités. Quand jâallais sur le monticule, il fallait que ce soit la totale. Je devais me retrouver dans une situation où il fallait tout donner.
Câest ce qui fait la différence entre les deux rôles. En tant que partant, tu te hisses sur le monticule en te disant que tu as cinq, six ou sept manches à lancer et quâil y a un plan à respecter. Je me sentais incapable de faire cela dans les majeures. Comme releveur, je me disais simplement que jâavais une manche à remporter et que jâallais y aller le plus intensément possible.
Comme partant, je mâéchauffais trop avant les matchs et mes lancers finissaient par perdre de la vélocité. En tant que releveur, on sâéchauffe plutôt en lâespace de 10 ou 12 lancers. Et lorsquâon est inséré dans le match, il nây a quâune quinzaine de lancers à faire.
Jâétais plus concentré dans les situations de sauvetages. Je sentais que jâavais plus à perdre et quâil fallait que je focalise encore plus. à mes yeux aussi, le releveur était par définition un joueur dâéquipe. Le releveur doit vraiment penser en fonction du groupe alors que le partant, lui, se dit quâil doit lancer cinq ou six bonnes manches afin de maintenir le pointage serré. Et quand il accomplit cela, il se dirige vers les douches avec le sentiment du devoir accompli.
Le closer , en revanche, sait parfaitement que sâil accorde un point, tout est fini et que la partie est perdue. Il sait que ses coéquipiers ont travaillé pendant huit ou neuf manches pour lui procurer une avance et une occasion de sauvetage. Et il ne veut surtout pas la bousiller. Câest lâaspect de ce rôle que jâaimais le plus. Cette grosse compétition. Lâadrénaline. Et le fait que si je perdais, ou si je nâavais pas de succès, tout le monde dans lâéquipe perdait le match.
Jâavais donc adoré remplir le
Weitere Kostenlose Bücher