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George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Albert le Roy
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de la rive tant et de si brillantes petites nageoires de poissons espiègles ; les demoiselles s'envolaient par myriades si transparentes et si diaprées, que j'ai laissé courir mon esprit avec les insectes, avec l'onde et ses habitants. Que cette petite gorge est jolie avec sa bordure étroite d'herbe et de buisson, son torrent rapide et joyeux, avec sa profondeur mystérieuse et son horizon borné par les lignes douces des guérets aplanis ! comme la traîne est coquette et sinueuse ! comme le merle propre et lustré y court silencieusement devant moi à mesure que j'avance.»
    Quand George Sand écrivait au Malgache ces pages exquises, en mai 1836, elle portait depuis près d'un an le fardeau d'un procès auquel était suspendue toute sa tendresse maternelle. Vainement des amis lui avaient conseillé de se résigner et de «se rendre maîtresse de la situation en devenant la maîtresse de son mari.» Elle répugnait à un rapprochement sans amour. «Une femme, dit-elle, qui recherche son mari dans le but de s'emparer de sa volonté, fait quelque chose d'analogue à ce que font les prostituées pour avoir du pain et les courtisanes pour avoir du luxe.» Dès le milieu de 1835, George Sand était résolue à intenter l'instance en séparation de corps. Ses relations avec Michel (de Bourges), la confiance qu'il lui inspirait, les soins dont elle l'entoura au cours d'une bronchite aiguë contractée en plaidant devant la Chambre des pairs, ne firent que l'attacher plus étroitement à son dessein. L'ardent avocat avait été condamné par cette juridiction politique à un mois de prison, en raison de la lettre qu'il avait rédigée au nom des accusés d'avril. Il regagna Bourges, aussitôt rétabli, et George Sand, après l'avoir suivi, alla passer les vacances à Nohant. La vie pour elle y devint impossible. M. Dudevant était criblé de dettes, incapable de faire face à ses engagements. Il demanda une signature à sa femme, qui ne la refusa pas. C'était un vague palliatif. «Il avait acheté, dit-elle, des terres qu'il ne pouvait payer ; il était inquiet, chagrin. Quand j'eus signé, les choses n'allèrent pas mieux, selon lui. Il n'avait pas résolu le problème qu'il m'avait donné à résoudre quelques années auparavant ; ses dépenses excédaient nos revenus. La cave seule en emportait une grosse part.»
    Elle signala certaines friponneries flagrantes des domestiques. Il se fâcha, lui défendit de se mêler de ses affaires, de critiquer sa gestion et de commander à ses gens. Il la ruinait, et elle devait se taire.
    Aussi bien, après avoir souscrit, puis rompu le contrat qui réglait leurs intérêts financiers, il ne craignit pas de se livrer aux pires outrages et même à des sévices envers sa femme. Le 19 octobre 1835, survint une scène décisive, irréparable. Voici en quels termes Michel la relate et l'explique, dans la plaidoirie qu'il prononça pour George Sand devant la Cour de Bourges et qui fut reproduite par la Gazette des Tribunaux, du 30 juillet 1836 :
    «Les femmes seules ne sont pas capricieuses ; il y a des hommes qui ont aussi leurs caprices. Voilà que M. Dudevant veut mener la vie de garçon. Il fut question de procéder à l'exécution du traité de février, et de le mettre ainsi en position de satisfaire son nouveau caprice. Il y eut une entrevue entre les époux. Leurs amis communs furent invités. Il y eut un dîner. Après le repas, on prenait le café. L'enfant des deux époux, Maurice, demanda de la crème. «Il n'y en a plus, répondit le père ; va à la cuisine ; d'ailleurs, sors d'ici.» L'enfant, au lieu de sortir, se réfugia auprès de sa mère ; M. Dudevant insista de nouveau pour qu'il sortît, et madame Dudevant dit elle-même à son fils : «Sors, puisque ton père le veut.» Il s'éleva alors une altercation entre les époux, altercation dans laquelle l'épouse montra le plus grand calme et le mari la plus grande violence. Il alla même jusqu'à dire à sa femme : «Sors, toi aussi.» Il fit mine de la frapper ; il en fut empêché par les personnes qui étaient présentes.
    Il se retira pour aller prendre son fusil, qu'on parvint à lui retirer des mains.»
    Cette version n'a pas été contredite par l'avocat de Casimir Dudevant. Elle est exacte de tous points et n'aggrave aucunement les faits. Ce fut chez cet égoïste, qui sentait qu'une partie de ses revenus allait bientôt lui échapper, une véritable crise de folie furieuse.
    Les amis présents,

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