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George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Albert le Roy
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pleuré est désarmé et conquis.
    A noter aussi cette appréciation d'un Italien que madame d'Agoult interrogeait sur les célébrités littéraires : «Conoscete i libri di George Sand ?-Si, Signora (ici une moue indéfinissable voulant dire à peu près : ce n'est pas le Pérou) mi piace di più...», je crus entendre Victor Hugo ; pourtant, pour plus de sûreté, et comme par un pressentiment de la joie qu'il allait me donner, je lui fis répéter le nom : «Mi piace molto di più, Paul de Kock.» Et madame d'Agoult a beau s'écrier : «O soleil, voile ta face ! O lune, rougis de honte,» on se demande si elle n'a pas éprouvé quelque contentement à informer George Sand qu'on lui préfère Paul de Kock. N'est-ce pas bien d'une femme, à tout le moins d'une femme de lettres ?
    A Paris, le bruit courait que Liszt était à Genève, non pas avec madame d'Agoult, mais avec George Sand. Celle-ci, fort occupée à plaider, trouve plaisir à leur communiquer ce racontar extravagant, qui circule à travers la petite ville cancanière de La Châtre. Elle envie leur sort d'êtres libérés des servitudes mondaines, tandis qu'elle supporte l'inquisition des curiosités provinciales, et, travailleuse nocturne, elle termine ainsi sa lettre : «Bonjour ! il est six heures du matin. Le rossignol chante, et l'odeur d'un lilas arrive jusqu'à moi par une mauvaise petite rue tortueuse, noire et sale.» Ce bonjour, elle le leur apporte en personne, dès qu'elle peut sortir de l'antre de la chicane et disposer de trois cents écus. Elle part de Nohant, le 28 août 1836, avec Maurice et Solange, et passe en Suisse tout le mois de septembre.
    Son arrivée à Genève est plaisante. En descendant de la diligence, elle demande au postillon le domicile de M. Liszt, en disant que c'est un artiste : l'un veut la conduire chez un vétérinaire, un autre chez un marchand de violons, un troisième chez un musicien du théâtre.
    Ce mois de séjour fut charmant. Piffoëls et Fellows s'étaient rejoints à Chamonix. La troupe joyeuse et folle s'égayait de tout, mais d'abord des effarements d'Ursule, la servante berrichonne, qui, à Martigny, croyait être à la Martinique et tremblait de traverser la mer pour revenir au pays. La famille Piffoëls-surnom tiré du long nez de George Sand et de son fils-s'inscrivait ainsi sur un registre d'hôtel : Domicile, la nature ; d'où ils viennent, de Dieu ; où ils vont, au ciel ; lieu de naissance, Europe ; qualités, flâneurs.
    Au mois d'octobre, George Sand rentre à Paris, après avoir touché barre à Nohant. Elle s'installe à l'Hôtel de France, rue Laffitte, où viennent également habiter Liszt et madame d'Agoult. Les deux femmes ont un salon commun. Au bout de deux mois de cette cohabitation de phalanstère, George Sand, fidèle à ses préférences pour la campagne, regagne son Berry : elle y travaille plus à l'aise. Elle était éblouie, fatiguée du mouvement intellectuel et mondain où se complaisait sa tumultueuse amie et où tournoyaient toutes les célébrités littéraires de l'époque : Lamennais, Henri Heine, Lamartine, Berryer, Pierre Leroux, Eugène Sue, Mickiewicz, Ballanche, Louis de Ronchaud. C'était un kaléidoscope, une lanterne magique.
    L'intimité cependant subsistait. A la fin de janvier 1837, madame d'Agoult-autrement dit, «la Princesse» ou «Mirabelle»-se rendit à Nohant. Elle y passa plusieurs semaines, amenant derrière elle Franz Liszt et plusieurs amis, tels que Charles Didier, Alexandre Rey et l'acteur Bocage. Frédéric Chopin, l'émule de Liszt, avait été invité. Il ne vint pas.
    L'illustre compositeur polonais, alors âgé de vingt-huit ans-de six ans plus jeune que George Sand-était récemment entré en relations avec elle. Dans quelles conditions ? On a peine à le préciser. Il a raconté, et ses biographes répètent, que ce fut à une soirée chez la comtesse Marliani. Le comte Wodzinski, dans son livre, les Trois Romans de Chopin, a singulièrement dramatisé l'aventure : «Toute la journée, il crut entendre de ces appels mystérieux qui jadis, aux temps de son adolescence, le faisaient souvent se retourner, au milieu de ses promenades ou de ses rêveries, et qu'il disait être ses esprits avertisseurs... Le soir, arrivé à la porte de l'hôtel Marliani, un tremblement nerveux le secoua ; un instant, il eut l'idée de retourner sur ses pas ; puis il dépassa le seuil des salons. Le sort en décidait ainsi.» Il ne tarda

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