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George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Albert le Roy
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luttes, entre son coeur et son imagination créaient sans cesse à cette organisation de poète. Je passai dix-sept jours à son chevet, sans prendre plus d'une heure de repos sur vingt-quatre.»
    C'est bien une fièvre typhoïde que relate George Sand, et il n'est pas permis de transformer la nature de la maladie, comme l'a fait sans aucune preuve l'écrivain russe Wladimir Karénine, en une note ainsi conçue : «Il a été beaucoup parlé dans la presse de la maladie de Musset que personne, à commencer par le médecin, n'a jamais osé appeler de son vrai nom. Le médecin l'a poliment appelée «fièvre typhoïde», mais en réalité c'était le «delirium tremens», effet final de la vie de débauches de Musset. [George Sand, sa vie et ses oeuvres, par Wladimir Karénine (madame Komarof), II, 67.]»
    Il y a là une assertion que rien ne justifie ni n'étaie. Les excès indéniables d'Alfred de Musset ne l'avaient pas conduit jusqu'à un accès de delirium tremens, auquel d'ailleurs il n'aurait pas survécu vingt-trois ans. La nature et les progrès du mal peuvent se noter d'après les lettres que George Sand adressait à ses divers correspondants. Le 4 février, elle écrit à Boucoiran : «Je viens encore d'être malade cinq jours d'une dysenterie affreuse. Mon compagnon de voyage est très malade aussi. Nous ne nous en vantons pas, parce que nous avons à Paris une foule d'ennemis qui se réjouiraient en disant : «Ils ont été en Italie pour s'amuser et ils ont le choléra ! quel plaisir pour nous ! ils sont malades !» Ensuite madame de Musset serait au désespoir si elle apprenait la maladie de son fils, ainsi n'en soufflez mot. Il n'est pas dans un état inquiétant, mais il est fort triste de voir languir et souffroter une personne qu'on aime et qui est ordinairement si bonne et si gaie. J'ai donc le coeur aussi barbouillé que l'estomac.» Le lendemain, autre lettre plus sombre au même Boucoiran : «Je viens d'annoncer à Buloz l'état d'Alfred qui est fort alarmant ce soir, et en même temps je lui démontre qu'il me faut absolument de l'argent pour payer les frais d'une maladie qui sera sérieuse et pour retourner en France. Comme au bout du compte c'est un assez bon diable et qu'il a de l'attachement pour Alfred, je crois qu'il comprendra ce que notre position a de triste et qu'il n'hésitera plus... Adieu, mon ami, je vous écrirai dans quelques jours, je suis rongée d'inquiétudes, accablée de fatigue, malade et au désespoir. Embrassez mon fils pour moi. Mes pauvres enfants, vous reverrai-je jamais ? Gardez un silence absolu sur la maladie d'Alfred, à cause de sa mère qui l'apprendrait infailliblement et en mourrait de chagrin.»
     Trois jours après, le 8 février, encore à Boucoiran : «Mon enfant, je suis toujours bien à plaindre. Il est réellement en danger et les médecins me disent : poco a sperare, poco a disperare, c'està-dire que la maladie suit son cours sans trop de mauvais symptômes alarmants. Les nerfs du cerveau sont tellement entrepris, que le délire est affreux et continuel. Aujourd'hui, cependant, il y a un mieux extraordinaire. La raison est pleinement revenue et le calme est parfait ; mais la nuit dernière a été horrible. Six heures d'une frénésie telle que, malgré deux hommes robustes, il courait nu dans la chambre. Des cris, des chants, des hurlements, des convulsions, ô mon Dieu ! mon Dieu ! quel spectacle ! Il a failli m'étrangler en m'embrassant. Les deux hommes ne pouvaient lui faire lâcher le collet de ma robe. Les médecins annoncent un accès du même genre pour la nuit prochaine, et d'autres encore peut-être, car il n'y aura pas à se flatter avant six jours encore. Aura-t-il la force de supporter de si horribles crises ? Suis-je assez malheureuse, et vous qui connaissez ma vie, en connaissez-vous beaucoup de pires ? Heureusement j'ai trouvé enfin un jeune médecin, excellent, qui ne le quitte ni jour ni nuit, et qui lui administre des remèdes d'un très bon effet.»
    Ce jeune médecin, qui va aider George Sand à soigner et à sauver Alfred de Musset, s'appelait le docteur Pietro Pagello. Il a vécu soixante-quatre ans après ces événements qui lui ont valu une notoriété extra-professionnelle, et c'est seulement entre la quatre-vingtième et la quatre-vingt-dixième année qu'il s'est décidé à parler et à ouvrir ses archives, sous les sollicitations qui l'obsédaient.
    Né à Castelfranco Veneto en 1807, Pagello venait de

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