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Gondoles de verre

Gondoles de verre

Titel: Gondoles de verre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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l’efficacité de la police – serait à coup sûr venue au bal.
    Soudain, le commissaire se rappela les propos de la princesse au sujet de Sivry, de l’intérêt qu’il aurait à faire passer l’original pour un faux. Tron avait de bonnes raisons d’exclure cette hypothèse. En poursuivant le raisonnement, on constatait toutefois à quel point la frontière était ténue, presque invisible entre un original et une copie. Dans de pareils cas, la conviction d’avoir affaire à un original relevait quasiment du point de vue.
    Si la copie en question était aussi parfaite que Sivry le prétendait, et le dos – conformément à la méthode de Küfner – encore plus parfait, qu’est-ce qui empêchait de la faire passer pour l’original ? Spaur n’aurait rien contre cette variante du moment qu’elle ne compromettait pas le grand-prince. Et Sivry ferait preuve de compréhension pour ce léger travestissement de la réalité. Au bout du compte, c’était le principe qu’il appliquait à ses propres affaires. En outre, Tron ne lui avait pas demandé d’expertise officielle.
    Bien entendu, dans ces conditions, il n’achèterait pas le tableau – du moins pas au prix que la reine en attendait. Marie-Sophie serait par conséquent contrainte de s’adresser à un autre marchand d’art. Les chances qu’on découvre l’escroquerie semblaient (contrairement à ce que Tron avait toujours cru jusque-là) faibles, très faibles. Et quand bien même on finirait par s’apercevoir que le Titien était un faux , où était le problème ? La reine serait rentrée à Rome depuis longtemps, après avoir assisté à leur bal évidemment. Bref, conclut le commissaire, il tenait la solution. La solution parfaite , reflet d’une copie non moins parfaite . L’œuf de Christophe Colomb en quelque sorte.
    Il se leva, défit sa redingote et l’accrocha avec soin au dossier de sa chaise. Puis il desserra sa cravate et s’approcha de la fenêtre. Ici aussi, la chaleur avait repoussé les habitants chez eux. Dans la lumière éblouissante de midi, les façades de l’autre côté du rio San Lorenzo semblaient bizarrement fausses – presque comme un décor de théâtre.
    Il se retourna et regagna sa chaise pour prendre des notes en vue du rapport final. Au moment où il trempa sa plume en acier dans l’encrier, il constata que l’euphorie éprouvée quelques instants plus tôt à l’idée de faire passer la copie pour l’original était retombée. Le sergent, prisonnier des profondeurs de l’ investigation policière , parviendrait-il à comprendre la complexité de son raisonnement ? Sans doute aurait-il du mal à admettre que la distinction entre vrai et faux vacillait quand on la considérait avec une certaine hauteur. En effet, le sergent Bossi croyait dans les photographies du lieu du crime et les chaînes d’indices tandis que le commissaire, lui, croyait en son bon droit d’interpréter la réalité d’un point de vue subjectif – et en son devoir d’attirer la reine de Naples au bal Tron.
     
    Dix minutes plus tard, Bossi entra dans son bureau avec l’expression tragique d’un homme qui a sondé des abîmes insoupçonnés. Il traînait les pieds et un regard sans illusion émanait de ses yeux bleus, rappelant la couleur de son uniforme. Même son nez, pourtant sur la voie de la guérison, semblait de nouveau avoir souffert ; il se dressait au milieu de son visage, à la Cyrano, et lui donnait un côté dramatique. Tron écarquilla les yeux de peur.
    — Que s’est-il passé, sergent ?
    — J’avais donné rendez-vous hier soir à Mlle Alberoni pour avancer dans mon enquête, dit-il. Dans un café de la place Santa Margherita.
    Tron jugea que ce n’était pas le moment de poser des questions sur l’enquête. Il se pencha au-dessus de son bureau d’un air attentionné.
    — Et alors ?
    — Elle n’est pas venue, dit Bossi avec rancune. Mais à sa place, M. Alberoni.
    — Son frère ? s’enquit le commissaire en toussotant.
    Le sergent soupira et roula des yeux.
    — Son mari !
    — Vous saviez qu’elle était mariée ? Qu’elle s’appelait en vérité Mme Alberoni ?
    — Non, commissaire.
    — Et que voulait-il, M. Alberoni ?
    — Il s’est approché de ma table et m’a demandé si j’étais bien le sergent Bossi.
    — Vous étiez en uniforme ?
    Le sergent secoua la tête.
    — Non, en civil. Ce n’était pas tout à fait un rendez-vous professionnel. C’était plutôt semi -professionnel.
    —

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