Hamilcar, Le lion des sables
jurer
de ne plus jamais porter les armes contre Carthage. La plupart optèrent pour la
seconde solution.
Hamilcar
profita de cette victoire pour faire prendre du repos à ses hommes. Il savait
que la campagne serait longue et ne voulait pas les fatiguer inutilement. Un
matin, alors qu’il inspectait les abords du camp, il aperçut un groupe de deux
cents cavaliers numides s’approchant à distance raisonnable. Ne sachant pas
trop quelles étaient leurs intentions exactes, le général se replia avec ses
officiers derrière la palissade. À la surprise générale, un cavalier numide se
détacha de ses compagnons après avoir jeté à terre sa lance et son glaive.
Juché sur son cheval, il galopa allègrement et entra fièrement dans le camp
sous l’œil médusé des sentinelles. Hamilcar ne put alors retenir un cri de
joie. Ce soldat audacieux n’était autre que Nahrawas, le frère de Juba, qu’il
salua chaleureusement :
— Merci
d’être venu à ma rencontre. Je suppose que tu as parlé avec le fils d’Himilk.
— Le
fils de ton intendant est chez nous et nous aurons besoin de lui pour quelques
mois encore. C’est un bon organisateur et il a toute la confiance de Juba.
Celui-ci me dépêche auprès de toi pour te confirmer que son amitié t’est
toujours acquise. Tu nous as appelés à ton secours et nous ne manquerons pas à
la parole donnée jadis. Sous peu, deux mille cavaliers viendront me rejoindre.
Indique-moi l’endroit où je puis les installer dans ton camp.
— Mes
officiers te le diront. Sache que je n’oublierai jamais votre geste. Les
Numides sont les alliés les plus loyaux et les plus fidèles de Carthage.
Le
ralliement de Juba constitua la seule bonne nouvelle qu’Hamilcar put faire
parvenir au Conseil des Cent Quatre. Celui-ci, par contre, l’informa
d’événements catastrophiques. Ainsi, en Sardaigne, les mercenaires s’étaient
révoltés contre leurs officiers carthaginois et les avaient massacrés sans
pitié. Une armée de secours commandée par Hannon avait été décimée dans un
guet-apens et son chef crucifié après avoir été cruellement torturé. Pour Carthage,
c’était là un véritable drame. Après la Sicile, la ville perdait la Sardaigne,
l’une de ses plus riches possessions, sans espoir de pouvoir la reconquérir
rapidement.
***
Spendios,
Autaritos et Matho apprirent également l’insurrection des mercenaires en
Sardaigne par des messagers que leur envoyèrent les rebelles. Après avoir
vaincu l’armée carthaginoise, ils avaient pillé sans vergogne le pays et
s’étaient rendus tellement insupportables aux habitants que ces derniers les
avaient chassés. Obligés de trouver refuge sur les côtes italiennes, ils
étaient à la recherche d’une terre d’asile et proposaient à leurs compagnons de
s’engager à leurs côtés pour combattre Carthage. Les chefs rebelles y
consentirent et les émissaires repartirent pour apporter la bonne nouvelle à
leurs frères d’armes.
Leur
présence n’était pas passée inaperçue dans le camp et Spendios crut habile de
l’utiliser. Un matin, les trompettes retentirent, appelant les hommes à se
rassembler. Le Campanien s’adressa à eux sur un ton dur et autoritaire :
— Vos
officiers me rapportent que certains d’entre vous ont été favorablement
impressionnés par la générosité dont Hamilcar a fait preuve envers nos
prisonniers en les recrutant dans son armée ou en leur rendant la liberté. Ce
maudit général a atteint le but qu’il s’était fixé : nous diviser et nous
démoraliser. Mercenaires, mes frères, vous connaissez mieux que moi ceux qui,
le soir, autour du feu, tiennent des paroles conciliatrices et apaisantes. Vous
pensez qu’ils défendent leurs intérêts et les vôtres. N’en croyez rien. Une
lettre de nos frères de Sardaigne nous a appris que ces hommes agissaient sur
ordre de Giscon. Ce dernier leur a promis la vie sauve et une grosse quantité
d’argent s’ils parvenaient à vous convaincre de le libérer.
— Oui,
c’est vrai, fit une voix isolée. On nous dit que Giscon, libéré, pourrait
plaider notre cause auprès des sénateurs. Il est même question de soumettre à
notre vote cette proposition.
— Vous
le voyez, fit Autaritos, la trahison rôde autour de nous. Admettons que nous
libérions Giscon. Que ferait-il selon vous ? Il expliquerait à ses pairs
que la discorde règne chez nous et qu’il faut en profiter pour lancer contre
notre camp
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