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Hannibal, Sous les remparts de Rome

Hannibal, Sous les remparts de Rome

Titel: Hannibal, Sous les remparts de Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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parole,
pesant soigneusement chacun de ses mots. Il savait que, le soir, autour des
feux, ses soldats, montrant du doigt les hauteurs escarpées qu’ils devraient
escalader, laissaient éclater leur colère. Ils maudissaient leur chef et
l’accusaient de ne pas se soucier de la vie de ses hommes. Jamais, disaient les
plus audacieux, Hamilcar se serait comporté de la sorte. Lui aurait fait venir
de Carthage des quinquérèmes et des trirèmes pour transporter ses troupes jusqu’aux
ports ligures. Il n’aurait pas défié la colère des dieux en tentant de violer
les cimes enneigées conduisant à leur domaine.
    Bien
décidé à prévenir toute mutinerie et les inévitables désertions, Hannibal
rivalisa d’éloquence pour rassurer ses troupes. D’une voix tantôt cajoleuse,
tantôt irritée, il leur dit :
    — Soldats
et mercenaires, j’ai peine à croire les propos apeurés que vous tiendriez à
l’idée de franchir les Alpes et ce sont sans doute de fausses rumeurs
colportées par des intrigants qui souhaitent vous nuire et me faire renoncer à
la confiance absolue que j’ai en vous. Depuis que le regretté Hasdrubal m’a
appelé à ses côtés, j’ai été le témoin de votre vaillance et de vos exploits
innombrables. Vous avez soumis à la bienveillante autorité de Carthage des
dizaines de tribus dont les guerriers combattent désormais dans nos rangs et se
sont illustrés lors de la traversée du Rhône. Quand Rome vous a reproché
d’avoir assiégé Sagonte et a exigé que notre Sénat me juge, vous avez été
blessés dans votre orgueil et dans votre honneur. Votre réaction a été
unanime : la justice commandait de châtier ces impudents, ennemis mortels
de la gloire de notre cité ; vous avez franchi l’Ebre et déjà parcouru
plus de la moitié du chemin qui nous sépare de l’Italie en marchant sous un
soleil de plomb ou sous les orages de l’été. Pas une plainte n’est sortie de
vos lèvres pas plus que vous n’avez rechigné à monter dans les barques et les
radeaux faisant la navette entre les deux berges du Rhône. Mieux, à peine
débarqués, vous avez, avec l’aide des troupes d’Hannon, mis en déroute les
Volsques. Cet exploit, soyez-en sûrs, est déjà commenté à Massalia, à Carthage
et dans tous les ports de la grande mer. Ceux qui en parlent ne tarissent pas
d’éloges à votre sujet. Bientôt, de notre mère patrie, arriveront des
émissaires chargés de distribuer aux plus méritants d’entre vous récompenses et
distinctions.
    Imaginez
leur déception s’ils apprenaient que les hommes dont ils sont si fiers sont
immobilisés par la crainte que leur inspirent les Alpes. Certes, je l’avoue,
ces montagnes sont plus hautes que les Pyrénées. Mais, contrairement à ce que
l’on veut vous faire croire, elles ne touchent pas le ciel et nul d’entre vous
ne risque de pénétrer par effraction dans le domaine des dieux. Ces hauteurs
prétendues terrifiantes sont habitées et cultivées par des tribus qui ne
redoutent pas d’y séjourner toute l’année, en été comme en hiver. Croyez-vous
que Magelos, l’envoyé des Boïens, soit venu en volant de Cisalpine ?
Jadis, ses ancêtres, avec leurs femmes, leurs enfants, leurs troupeaux et leurs
chariots ont franchi ce massif. Etait-ce à dos d’oiseaux gigantesques ?
Vous montreriez-vous incapables de les imiter, vous qui êtes les meilleurs
soldats du monde ?
    — Mais
nous pourrions prendre la route du littoral, fit une voix perdue dans la foule.
    — En
effet. C’est là que ces maudits Romains nous attendent et je n’entends pas leur
offrir ce plaisir. Je ne veux pas affronter leurs légions tant que nous ne
serons pas sur le sol italien. Nous devons consacrer toute notre énergie à les
surprendre dans la plaine du Pô. C’est là que nous balaierons les hommes de
Publius Cornélius Scipion et la route de Rome sera alors ouverte devant nous.
Pour cela, il faut franchir les cols des Alpes et je sais que vous le pouvez,
au prix de multiples sacrifices. Que cessent donc les vains murmures et les
récriminations ! N’ayez plus qu’un seul objectif en tête : la cité de
Romulus et faites confiance à votre chef qui ne vous a jamais déçus.
    Une
ovation formidable salua ses propos. Les soldats placés aux premiers rangs
rompirent l’alignement et, dans une bousculade joyeuse, entourèrent leur
général. À leur tour, les autres hommes de troupe se dispersèrent, scandant le
nom d’Hannibal tout en

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