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Histoire De France 1618-1661 Volume 14

Histoire De France 1618-1661 Volume 14

Titel: Histoire De France 1618-1661 Volume 14 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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dépouille de son beau-frère, Montmorency, décapité. Puissance merveilleuse des maris sur les femmes. Condé dressa la sienne à faire sa cour au cardinal, à lui faire visiter, pour affaire et pour intérêt, les juges qui avaient envoyé son frère à la mort.
    Le serviteur du grand Condé, Lenet, nous apprend que cette famille, si mendiante auprès de Richelieu, tâchait pourtant à tout hasard de se créer contre lui des moyens de résistance. De temps à autre, sous différents prétextes, ils ajoutaient aux fortifications d'une bonne place qu'ils avaient en Bourbonnais au carrefour des routes de quatre provinces. Madame la princesse, par tout moyen, attirait la noblesse à sa cour. Quand le petit prince monta à cheval, on ouvrit à portée de la résidence un marché de chevaux, pour que, sous ombre d'achats, les gentilshommes vinssent, montassent au château pour faire leurs hommages, devinssent clients de la maison.
    L'enfant fut élevé d'une manière populaire et ambitieuse. On le mit au collége à Bourges, sous un Jésuite, parmi nombre d'enfants de gentilshommes qui s'attachèrent à lui. Il eut l'éducation variée, littéraire, que donnaient les Jésuites, sans fond moral, mais bien combinée pour l'effet; les langues, les exercices publics, des thèses où l'écolier brillait. Mais, après lecollége, son père voulut encore qu'il sût un peu d'histoire, de mathématiques. On entendait par là surtout la fortification, l'art de l'ingénieur.
    Son couronnement d'éducation fut d'être envoyé par son père pour tenir sa place en Bourgogne, pour s'informer de tout, et du militaire, et de la justice, pour caresser le Parlement.
    Il fut du premier coup très-brave (campagne d'Arras, 1640). Son père voulait le pousser au commandement et lui faire avoir une armée. C'est pour cela surtout qu'il lui fit épouser malgré lui mademoiselle de Brézé. Il avait vingt ans, elle douze. Il fut très-dur pour elle, vivant à côté d'elle sans en tenir compte et tout à fait à part. En réalité, maladif (il fut un moment à la mort), ambitieux comme sa mère, avare comme son père, il visait de loin la grande héritière, mademoiselle de Montpensier, l'énorme fortune d'argent que feraient les biens d'Orléans par-dessus les biens des Condé et des Montmorency. Seulement le roi y consentirait-il? Ce jeune homme d'aspect si sauvage, mais excellent calculateur, trouva moyen d'aller au cœur du roi en s'associant à sa mère, à sa sœur, dans leur zèle pour les Carmélites. Il quêta pour leur faire avoir un reliquaire fort riche. Chose rare qu'un jeune militaire eût une dévotion si précoce.
    Richelieu le voyait venir, et il en était indigné. Cette chasteté persévérante, ce divorce dans le mariage pour en préparer un plus riche, montraient en celui-ci un homme qui passerait son père. Il y avait là avarice, insolence, l'orgueil et la haine secrète qu'il avait sucés de sa mère, sœur de Montmorency. Quoi!le sang de Richelieu était-il donc si vil, qu'un prince d'une princerie fort douteuse dédaignât d'y mêler le sien? Qu'avait-elle fait, cette enfant innocente? Était-ce sa faute si elle était nièce du plus grand homme de l'Europe, et si le prévoyant ministre refusait d'armer les Condés de ces moyens de guerre civile dont tant de princes en notre histoire ont si cruellement abusé?
    Les cardinaux sont protecteurs des trônes. Richelieu, comme cardinal, avait la prétention de ceux d'Espagne et d'Italie, qui passent devant les princes. Visité par la reine, il restait assis devant elle. La pourpre qu'il portait, lui et son frère, l'archevêque de Lyon, lui semblait l'égaler aux rois.
    Haï de Richelieu et le lui rendant bien, Enghien eut pourtant la prudence de se garder de l'affaire de Cinq-Mars. Il ne varia pas, ne douta pas un moment de la victoire du cardinal, à ce point qu'il quitta le siége, laissa le roi et revint à Tarascon.
    C'était s'offrir à Richelieu. Mais celui-ci n'en était pas moins envenimé. L'injure faite à son sang lui cuisait d'autant plus, qu'il se sentait mourir. Que serait-ce après lui si, lui vivant, on méprisait les siens? Il voulut à tout prix que le rang supérieur des cardinaux, admis par les Condés, les menât à avouer qu'il n'y avait point mésalliance du sang d'un cardinal au sang d'un prince. Pour la même raison, Enghien se réservait cette cause de divorce. Quand il passa à Lyon, il évita de voir l'archevêque, frère de Richelieu et cardinal,

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