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Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Titel: Histoire De France 1715-1723 Volume 17 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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faisaient son procès. Dînant au Palais même, ils reçoivent l'auteur et l'acteur, et la serviette sur lebras, les mènent voir le héros du jour, le font jaser, lui font dire son argot, de quoi faire rire après sa mort.
    Cartouche, bien traité, bien nourri, et même recevant sa maîtresse, eut la galanterie de ne nommer personne.
    La torture (ménagée peut-être) ne le fit pas parler. Mais, quand il fut en Grève, et qu'il ne vit qu'une roue au lieu de cinq, il crut qu'on sauvait ses complices et se fâcha. Il déclara qu'il allait tout dire; il parla vingt-quatre heures de suite. Ces aveux et tous ceux des gens qu'on roua après lui, taillèrent de la besogne aux juges pour plus d'un an. On arrêtait de tous côtés, souvent fort au hasard. En juillet 1722, il y avait encore cinq cents complices de Cartouche au Châtelet, des gens de toutes classes, plusieurs superbement vêtus.
    Mais combien de crimes secrets, privilégiés, que l'on n'osait poursuivre! Plusieurs éclataient par hasard.
    Les puissants, ou les hommes abrités par un corps puissant, se passaient d'odieuses fantaisies, qui les menaient souvent au meurtre.
    Un conseiller du Parlement attire, garde, enferme chez lui une infortunée demoiselle, l'accable de traitements barbares, honteux. Elle échappe, fort heureusement; car la satiété, la crainte, lui auraient fait pousser les choses à mort. Il tua son cocher, qui sans doute était son complice; puis, se sentant perdu, il se fit justice à lui-même.
    L'exemple part de haut. Le jeune frère du duc deBourgogne, Charolais, préludait à l'amour par les coups, n'aimait les femmes que sanglantes. Il était demi-fou.
    M. le Duc lui-même, le futur maître du royaume, donnait (comme avaient fait ses pères) maints signes d'un esprit dérangé ( Barbier ), d'une mauvaise bête sauvage.
    Les amusements de ces princes frisaient de près l'assassinat. On a vu la façon dont leur père, ce nain singulier, s'amusa du pauvre Santeuil. Les occasions ne leur en manquaient pas.
    Il tomba dans leurs mains, chez madame de Prie, que tout le monde alors recherchait, comme le soleil levant, une dame étourdie, imprudente, madame de Saint-S. ( Barbier , Marais ). Elle était jolie, encore jeune, d'une bonne famille de robe. Veuve d'un homme d'affaires, elle avait des enfants, et sans doute, dans ce moment, sous la Terreur du Visa, elle avait grand besoin d'une haute protection pour couvrir le résidu de leur fortune. Elle ne songea point que la vipère, pour amuser les princes, pouvait se divertir à ses dépens cruellement.
    Cette bonne madame de Prie l'invite en effet à souper. Nulle défiance. Elle s'y rend. On l'amadoue, on la caresse, on la fait boire. On s'en fait un jouet. Cela arriva par deux fois. La première, on la dépouilla, et Charolais la roula dans une serviette. Une telle honte devait tout finir. Mais la pauvre mère, n'ayant sans doute rien obtenu encore, croyant qu'une femme, après tout, aurait quelque pitié de sa triste aventure et voudrait réparer, osa y retourner, surune invitation nouvelle de madame de Prie. Cette fois, M. le Duc eut la cruelle idée de la flamber comme un poulet. Brûlée (et dehors, et dedans!), la pauvre femme fut près d'en mourir, et n'en revint qu'après plusieurs années. [Retour à la Table des Matières]
CHAPITRE XXII
DUBOIS ABANDONNE TOUTE RÉFORME—APPROCHE DE LA MAJORITÉ
1722
    M. le Duc paraît à l'horizon. Deux ans entiers il approche, il avance, comme une comète sinistre. On va regretter le Régent, que dis-je? regretter Dubois même. Le baroque et barbare gouvernement du borgne, la sauvage administration qui veut marquer les pauvres, qui codifie les dragonnades, par la comparaison canonise le fripon Dubois.
    À la mort de Dubois, Paris ne se réjouit point. Qui le croirait? les gens du Parlement, qu'il écrasa, le barreau, l'avocat Barbier, commencent à trouver que ce drôle eut du bon. Il avait de l'esprit. Il n'a pas fait de grands établissements aux siens. «S'il eût vécu, il eût voulu punir les coquins de tout état .»
    De tout état. Aux seigneurs tout honneur. Au premier rang les princes, et le premier, M. le Duc.
    Si Dubois eût eu la vue nette, si, averti par l'âge,par ses vilaines maladies, par les apoplexies avortées du Régent, il se fût avisé d'avoir une pensée pour ce pauvre royaume qui (après tout) lui échappait; s'il eût, en s'en allant, fermé la porte au Duc,—il aurait fait un coup de maître, eût terriblement remonté;

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