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Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Titel: Histoire De France 1715-1723 Volume 17 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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il eût embarrassé l'histoire. La France, faible et bonne, lui eût gardé un souvenir.
    Il ne fallait pas être lâche, ne pas laisser brûler les papiers du Système et les documents du Visa, ne pas permettre cette cage de fer qui, dans la cour de la Banque, dévora, effaça le passé, rendit toute enquête impossible, brûla la justice et l'histoire.
    Il ne fallait pas être lâche, mais éclaircir, imprimer, publier. Ce qu'on savait déjà devait faire désirer de savoir davantage. Sur un de ces registres qu'on brûla si soigneusement, on avait lu qu'un seul commis avait directement délivré en or à M. le Duc dix-sept cent mille louis. Mais, indirectement et par ses prête-noms, les agents de l'agiotage, qui, jour par jour, instruits des Arrêts du Conseil, travaillaient à coup sûr, combien purent-ils réaliser, lui, madame de Prie, madame la Duchesse et Lassay son mari, les entours de cette maison? c'est ce qu'on ne peut plus calculer.
    Il ne fallait pas se laisser marcher sur les pieds comme firent Dubois et le Régent, n'avoir pas peur des gros souliers de Duverney, ni des plumets du Camp de Condé ; mettre à jour tous ces braves, crottés de la rue Quincampoix. Il fallait dominer la réaction et s'en servir, subalterniser Duverney, ne pas permettre que sa Terreur du Visa fût une farce, larendre sérieuse, atteindre au plus haut même,—et, ce qui était capital pour l'avenir: déshonorer M. le Duc .
    Dubois, je le sais bien, n'était pas net, ni le Régent. Le Régent avait gaspillé. Dubois avait reçu ou pris. Mais ni l'un ni l'autre n'était le patron solennel, le général des deux armées du vol,—du Système, de l'Anti-Système, de la Bourse et de la Maltôte. Ce rôle étrange faisait la force de M. le Duc. D'une part, il plaidait pour les amis de Law, la défunte Compagnie des Indes. D'autre part, il se rattachait les vieilles dynasties financières, le triumvirat du Visa, la féodalité des Fermiers généraux. Tout en condamnant le Visa, il s'arrange avec Duverney, dont il va faire son factotum. Double rôle, assez compliqué, dont le jeune brutal eût été incapable. Mais les deux araignées, madame la Duchesse et madame de Prie, des gens habiles, adroits, clients anciens de cette maison, arrangeaient tout et filaient le réseau.
    Dubois, avec tout son esprit, ses rires, ses airs d'audace, était au fond un plat petit coquin. S'il n'eût trembloté, vivoté, craignant tout, n'osant disputer rien à cette ligue, il nous aurait sauvé un précieux héritage: tout le meilleur des réformes de Law, nombre de choses excellentes, nullement chimériques, qui étaient faites ou commencées.
    Law se passait de la haute finance, qui revend à l'État le crédit que l'État lui donne. Law se passait de Fermiers généraux et de gros Receveurs, si fort payés, tripotant de l'argent des caisses. Il réduisait l'énorme armée bureaucratique. Il poursuivait l'idéede Renaut et des sages esprits du Languedoc, qui, voyant dans cette province les effets excellents de la taille réelle , assise sur les biens, sur un cadastre sérieux, l'essayaient, préparaient l'égalité d'impôt.
    Mais Dubois lâche tout. Tout au clergé; on va le voir. Tout aux nobles; il défend de continuer les essais de la taille territoriale (juin 1721). Tout à la finance. Il retourne aux plus misérables expédients de Louis XIV, la double usure: Samuel Bernard prête aux Fermiers généraux ce qu'ils vont prêter à Dubois.
    Sa maladresse fut telle, que le Parlement même (que M. le Duc et Conti avaient tant aidé à briser en 1718) se lie à eux. Sur quelques mots polis, les juges font fête à ces honorables voleurs. Au lieu d'être épluchés et jugés par le Parlement, ils y siègent, ils y trônent. Ils font les délicats, les scrupuleux, dans l'affaire de La Force, leur camarade en tripotage.
    Dubois eût dû, contre M. le Duc, chercher appui au moins dans un fort Conseil de régence, purgé, refait et réorganisé. Les hommes ne manquaient pas autant qu'on dit. Avec Noailles et d'Aguesseau, il fallait appeler ceux qui, au début de la Régence, avaient marqué dans les Conseils, des hommes jeunes et de mérite. Plusieurs des roués même, malgré leurs mœurs, étaient des gens d'infiniment d'esprit et fort capables. Par un tel Conseil de régence on eût jugé les juges du Visa; on les aurait fait marcher droit, et forcés de parler français sur les malpropretés de ceux qu'il fallait démasquer et rendre à jamais

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