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Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Titel: Histoire De France 1758-1789, Volume 19 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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plus l'homme à la mode. Je l'en excuse fort, mais lui pardonne moins son infidélité pour la charmante femme qui l'eût dû toujours retenir.
    C'était alors la mode des inséparables amies , dont rit madame de Genlis. La reine le fut un moment de madame de Lamballe. Elle ne pouvait plus la quitter. Elle renvoyait tout le monde. Seule avec elle à Trianon, elle faisait de petit dîners, d'interminables promenades. On en riait, on en fit des chansons. Et pourtant quel plus heureux choix? quelle amie désintéressée, ne se mêlant de rien, prête à servir en tout, et même aux choses les plus dures (V. plus bas l'affaire du collier )! Elle était tout cœur, tout amour, sans vanité, se trouvant heureuse et comblée, toute princesse qu'elle était, des humbles privautés où la dame d'honneur était moins que servante [16] .
    Elle avait un attrait tout singulier d'enfance (elle n'a jamais eu que quinze ans), une fraîcheur éblouissante, avec la candeur de Savoie. La reine trouva délicieux d'abord d'être en ces douces mains. Sa nature vive et forte, le riche sang de Marie-Thérèse s'arrangeait à merveille de la faible petite amie. Mais trop faible peut-être. L'odeur de violette la faisait trouver mal (dit madame de Buffon). Son médecin Seetzen attribue sa faiblesse, ses spasmes singuliers, à l'éducation énervante, aux habitudes de couvent, dont les grandes dames, selon lui, ne se corrigeaient jamais bien.
    Cette mollesse plus que féminine n'est pas sans se marquer dans les arts de l'époque, à telles délicatesses, telles sensualités. Les petits bains obscurs, les secrets cabinets (comme à Fontainebleau), peuvent en donner l'idée, avec leurs glaces mal placées, leurs ornements de nacre, point de peintures obscènes, mais faibles etgalantes, comme de main de femme, et de femme énervée.
    On devina bientôt que la pauvre Lamballe, si tendre, mais passive, n'était pas pour répondre aux vives énergies de la reine. En la nommant Surintendante, lui donnant une place d'affaires qui la faisait le centre de la cour, elle-même finit le tête-à-tête, la sevra des soins personnels qu'elle eût aimés bien mieux. Leur amitié languit. Et, juste à ce moment (août 1776), on inventa la Polignac.
    Combinaison profonde. Le vrai chef des Choiseul, madame de Grammont, travaillant pour son frère croyant que la Lamballe ni Lauzun n'intrigueraient pour lui, désirait donner à la reine ou un amant ou une amie. Dans son expérience, jugeant par sa Julie, elle crut qu'une amie aurait bien plus de prise. Un jour, dans les salons Lamballe, la reine, en ses folles plumes, flottant au vent léger, arrête et fixe son regard sur un objet charmant, une jeune dame inconnue à la cour. Visage d'ange, de sourire enchanteur, et de simplicité touchante, sans diamants, sans parure; qu'une rose aux cheveux. Toujours en robe blanche. Sa pauvreté l'exilait en province. Quelle douce occasion! La reine s'attendrit, l'enrichit sur-le-champ, la garda, la mena partout. L'infortunée Lamballe tâcha d'abord de se soumettre et de subir cela. Mais c'était trop. Elle tomba malade, et eut dès lors des accès de catalepsie. Elle quitta Versailles. Elle alla à Plombières. Elle alla en Hollande, revint s'enfermer à Paris. Toujours inconsolable, elle pleurait dans les bois de Sceaux (V. Guénard, Hyde, etc.).
    Toute autre, la nouvelle amie, avec son abandon apparent, son air de bergère, était très-froide au fond. C'est ce qui la fit absolue. La Lamballe avait été moins que femme, un enfant. La Polignac fut un maître, doux, mais impérieux, comme un amant, qui maîtrisait la reine, par moment la faisait pleurer. «Plus avide que tendre,» disait Marie-Thérèse. L' ange avait un mari, qu'il fallut faire sur-le-champ grand officier de la couronne, en blessant toute la cour. L' ange avait un amant, Vaudreuil, un officier, à qui pour commencer on donna trente mille livres de rente. L' ange avait un ami, un certain Adhémar, qui ne voulait pas moins que l'ambassade d'Angleterre. Et son autre ami, Besenval, eût voulu seulement faire le gouvernement, faire nommer les ministres. Et pourquoi tous ces Polignac n'auraient-ils pas été au moins ministres adjoints ?
    En tout cela, la jolie femme était menée par deux démons, Diane, sa belle-sœur, bossue, galante, d'esprit malin, pervers, et son ami Vaudreuil, un violent créole, colère, emporté, provoquant. Voilà les maîtres de la reine.
    Était-elle asservie sans retour? On peut en

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