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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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nouvelle guerre était fatale et qu’il n’arriverait à ses fins qu’après avoir abattu la Russie comme il avait abattu la Prusse et l’Autriche, prépara pour l’année 1812 l’armée la plus vaste qu’on eût jamais vue, l’armée de « vingt nations » où entraient des hommes de tous les pays alliés ou soumis à la France, une sorte de croisade de l’Occident contre la Russie asiatique. À cette croisade, par la pente naturelle de son esprit autant que par politique, Napoléon donnait encore le mot d’ordre de la Révolution, la libération des peuples, dont la résurrection de la Pologne serait le gage, sans prendre garde que déjà les Espagnols luttaient pour leur indépendance et que l’esprit de nationalité, ranimé par les principes révolutionnaires, agitait les masses germaniques. Alexandre, habile à jouer tous les rôles, parlait de son côté un langage libéral, invoquait la justice, intéressait à sa cause les pays conquis et subjugués par la France ou insurgés contre elle, préparait se réconciliation avec la Prusse et l’Autriche par la complicité des trois États dans le partage des provinces polonaises. Napoléon allait donc tout jouer dans cette campagne de Russie à laquelle il ne pouvait échapper. Vainqueur, il serait le maître de l’Orient, de Constantinople, de l’Europe entière, il obligerait enfin l’Angleterre à capituler. Vaincu, il donnera lui-même le signal de la débâcle. Ainsi, la guerre entreprise en 1792, après avoir porté les Français jusqu’à Moscou, reviendra jusqu’aux portes de Paris par un brutal et rapide reflux. Il fallut aller à Moscou pour avoir voulu conquérir en une enjambée la Belgique et la rive gauche du Rhin, et l’un ne fut pas plus insensé que l’autre.
    En juin 1812, la Grande Armée franchit le Niémen, et les Russes évitèrent encore de lui offrir la bataille. Alexandre avait dit qu’il se retirerait s’il le fallait au-delà de Tobolsk. Napoléon se figurait que, de Moscou, il dicterait la paix à la Russie. Les Russes brûlèrent la ville et ne firent pas la paix. Alors commença une retraite qui, après le passage de la Bérézina, tourna en débâcle. Au mois de décembre, Ney et Gérard arrivaient presque seuls à Kœnigsberg. La Grande Armée avait fondu. L’empereur lui-même l’avait abandonnée en secret, comprenant l’étendue de la catastrophe, redoutant les effets qu’elle aurait en Europe et en France même, où la conspiration du général Malet, dont la nouvelle lui était parvenue en Russie, lui avait appris combien son pouvoir était précaire et son prestige affaibli.
    Désormais, l’histoire de l’Empire, c’est celle d’un rapide retour aux conditions dans lesquelles Napoléon avait pris la dictature en 1799. Pour sauver la Révolution et ses conquêtes, tâche dont les républicains eux-mêmes l’ont chargé au 18 brumaire, il a reçu de la France la permission de prendre la couronne, de fonder une dynastie, de s’emparer de la moitié de l’Europe, de lever et de tuer des hommes sans compter. Tout cela aura été vain. En quelques mois, on va être ramené au point de départ.
    Si, en 1809, les succès de l’insurrection espagnole avaient encouragé l’Angleterre à persévérer et ranimé le courage des peuples conquis, en 1813, le désastre de la Grande Armée devait, bien davantage encore, déterminer l’adversaire à en finir. Les Anglais se dirent qu’il ne s’agissait plus que d’ajouter quelques sacrifices à ceux qu’ils avaient déjà faits pour en recueillir le résultat. La déclaration de guerre des l’États-Unis, si longtemps espérée de Napoléon, qui survint à ce moment-là et qui était due à la tyrannie maritime de l’Angleterre bien plus qu’aux efforts de notre diplomatie, ne pouvait même plus changer la résolution du gouvernement britannique. Tout indiquait d’ailleurs un vaste retournement des choses en faveur de la cause dont l’Angleterre était restée, à un moment, le champion presque unique. La propagande nationaliste portait ses fruits en Allemagne. La Prusse, tout en protestant de sa fidélité à notre égard, avait tourné ses obligations et reconstitué en secret ses forces militaires. Un corps prussien mêlé à nos troupes et commandé par le général d’York passa aux Russes. Cette défection causa une sensation immense en Allemagne et hâta le repli des derniers débris de l’armée française qui ne s’arrêta plus qu’à

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