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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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qu’on n’en eût pas le respect.
    Cette élection survint au moment où les esprits étaient les plus agités. La fermeture des ateliers nationaux était imminente. Chaque soir, des bandes d’ouvriers parcouraient les boulevards en acclamant la République démocratique et sociale. Les contre-manifestations étaient spontanées et il ne leur manquait qu’un cri et des chants. On peut dire que l’Empire commença par une « scie » de café-concert : « Poléon, nous l’aurons ! » et par-des romancés sentimentales : « Napoléon, sois bon républicain. » Un parti bonapartiste commençait à se former et, ce qui était encore plus important, un état d’esprit bonapartiste se formait aussi. Une nouvelle émeute socialiste allait le renforcer.
    Celle-là fut plus qu’une émeute : un véritable essai de guerre sociale, noyé dans le sang. La Commission exécutive, obéissant au vote de l’Assemblée, avait fixé au 21 juin la dissolution des ateliers nationaux. Le 22, la décision ayant été notifiée, une délégation ouvrière protesta auprès du gouvernement. La décision maintenue, l’insurrection éclata le lendemain.
    Elle fut d’autant plus violente qu’elle était anonyme. Elle n’eut pas de chefs. Le seul nom qui en soit resté est celui de Pujol, chef de section aux ateliers nationaux, qui donna le signal du soulèvement par une harangue aux ouvriers sur la place de la Bastille, au pied de la colonne de Juillet : la « sédition », comme l’Assemblée l’appelait, s’autorisait contre la République bourgeoise du souvenir des Révolutions qui avaient renversé la monarchie. Le soir même, la population ouvrière de Paris était sous les armes.
    On vit alors ce que, ni en 1789, ni en 1830, ni en février, on n’avait vu : un gouvernement résolu à se défendre, qui avait pris toutes ses précautions, arrêté même à l’avance un plan de combat et qui chargeait l’armée régulière de la répression. Écartant les cinq civils de la Commission exécutive, l’Assemblée délégua le pouvoir au général Cavaignac, c’est-à-dire à un dictateur républicain. En trois jours, l’insurrection, d’abord maîtresse de près de la moitié de Paris, fut écrasée. Des arrestations en masse, des condamnations par les conseils de guerre, des déportations en Algérie suivirent cette victoire de l’ordre. La troupe s’était battue avec discipline, les sections bourgeoises de la garde nationale avec fureur ; de province même, des renforts leur étaient venus. Au lieu d’être honorée, l’insurrection fut flétrie. Les insurgés ne furent plus des héros, mais des « barbares ». L’assassinat du général Bréa, la mort de l’archevêque de Paris, Mgr Affre, tué au moment où il intervenait entre les combattants, se racontèrent avec horreur. Partout l’impression fut profonde. Du moment que la Révolution attaquait l’ordre social et la propriété, Paris même cessait d’être révolutionnaire. Des journées de juin, le socialisme sortit affaibli et découragé, tandis que la réaction grandissait, des villes aux campagnes, avec la haine des « partageux ».
    Dès lors, les événements marchèrent très vite. La Constitution qui fut adoptée par l’Assemblée disait que la République aurait un président et que ce président serait élu par le peuple. Rares furent les républicains comme Grévy qui représentèrent que le plébiscite pouvait être mortel pour la République. La gauche même l’accepta ; la doctrine républicaine enseignait alors que le régime parlementaire était d’essence conservatrice et monarchique, et que le pouvoir exécutif, pour ne pas dépendre d’une Assemblée toujours capable de restaurer la monarchie, devait s’appuyer sur le suffrage universel : ce qui prouve que les théories politiques sont changeantes comme les circonstances qui les déterminent.
    Le plébiscite eut lieu le 10 décembre. Avec Lamartine et le général Cavaignac, Louis-Napoléon avait posé sa candidature. Il était rentré en France depuis peu de temps, sa présence à l’Assemblée avait été peu remarquée, mais son attitude avait été habile. Il avait nié qu’il fût prétendant au trône impérial. Au lieu de parler, comme dans ses premiers manifestes, comme presque tout le monde quelques mois plus tôt, de réformes sociales, il était devenu conservateur avec un vocabulaire démocratique, le mélange même dont les idées et les

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