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Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814

Titel: Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: François-Auguste-Marie-Alexis Mignet
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convention en tribunal. Le parti de Robespierre se montra beaucoup plus conséquent, en ne faisant valoir que la raison d’état, et en repoussant les formes comme mensongères.
    La discussion s’ouvrit le 13 novembre, six jours après le rapport du comité. Les partisans de l’inviolabilité, tout en considérant Louis XVI comme coupable, soutinrent qu’il ne pouvait pas être jugé. Le principal d’entre eux fut Morisson   : il dit que l’inviolabilité était générale   ; que la constitution avait prévu bien plus que les hostilités secrètes de Louis XVI, mais une attaque ouverte de sa part, et n’avait prononcé dans ce cas que la déchéance   ; que la nation avait engagé sous ce rapport sa souveraineté   ; que la convention avait eu pour mandat de changer le gouvernement, et non de juger Louis XVI   ; que, retenue par les règles de la justice, elle l’était encore par les usages de la guerre, qui ne permettaient que pendant le combat, de se défaire d’un ennemi retombé sous la loi,   ; après la victoire   ; que, d’ailleurs, la république n’avait aucun intérêt à condamner Louis XVI   ; qu’elle devait se borner à des mesures de sûreté générale à son égard, le retenir captif, ou le bannir de la France. Cette opinion était celle de la droite de la convention. La Plaine partageait l’avis du comité   ; mais la Montagne repoussait à la fois l’inviolabilité et le jugement de Louis XVI   :
    « Citoyens, dit Saint-Just, j’entreprends de prouver que l’opinion de Morisson, qui conserve au roi l’inviolabilité, et celle du comité, qui veut qu’on le juge en citoyen, sont également fausses. Moi, je dis que le roi doit être jugé en ennemi   ; que nous avons moins à le juger qu’à le combattre   ; que, n’étant pour rien dans le contrat qui unit les Français, les formes de la procédure ne sont point dans la loi civile, mais dans la loi du droit des gens   ; que les lenteurs, le recueillement, sont ici de véritables imprudences, et qu’après celle qui recule le moment de nous donner des lois, la plus funeste serait celle qui nous ferait temporiser avec le roi. » Ramenant tout à des considérations d’inimitié et de politique, Saint-Just ajoutait   : « Les mêmes hommes qui vont juger Louis, ont une république à fonder   : ceux qui attachent quelque importance au juste châtiment d’un roi, ne fonderont jamais une république. Citoyens, si le peuple romain, après six cents ans de vertu et de haine contre les rois   ; si la Grande-Bretagne, après Cromwell mort, vit renaître les rois malgré son énergie, que ne doivent pas craindre parmi nous les bons citoyens, amis de la liberté, en voyant la hache trembler dans vos mains, et un peuple, dès le premier jour de sa liberté, respecter le souvenir de ses fers   ! »
    Ce parti violent, qui voulait remplacer une sentence par un coup d’état, ne suivre aucune loi, aucune forme, mais frapper Louis XVI comme un prisonnier vaincu, en faisant survivre les hostilités même à la victoire, était en très-faible minorité dans la convention   ; mais au-dehors il se trouvait fortement soutenu par les Jacobins et par la commune. Malgré la terreur qu’il inspirait déjà, ses meurtrières invitations furent repoussées par la convention, et les partisans de l’inviolabilité firent valoir, à leur tour, et avec courage, les motifs d’intérêt public en même temps que les règles de la justice et de l’humanité. Ils soutenaient que les mêmes hommes ne pouvaient pas être et juges et législateurs, et accusateurs et jurés. Ils voulaient, d’ailleurs, qu’on donnât à la république naissante le lustre des grandes vertus, celles de la générosité et du pardon   : ils voulaient qu’on suivît l’exemple du peuple de Rome, qui conquit sa liberté, et qui la conserva cinq cents ans, parce qu’il se montra magnanime   ; parce qu’il bannit les Tarquins, et qu’il ne les fit point périr. Sous le rapport politique, ils montraient les conséquences d’une condamnation à l’égard du parti anarchiste, qu’elle rendrait plus audacieux, et à l’égard de l’Europe, dont elle entraînerait les puissances, encore neutres, dans la coalition contre la république.
    Mais Robespierre, qui, pendant ce long procès, montra une audace et une obstination qui présageaient de loin sa toute-puissance, parut à la tribune pour soutenir l’avis de Saint-Just, pour reprocher à la

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