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Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Titel: Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Ferro
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porter les armes, le respect des intérêts économiques des indigènes… » C’est la théorie du « drain », cette vampirisation de la richesse indienne qui surtout marque la différence… Au moins, les empereurs afghans et mogols dépensaient sur place les lourds impôts qu’ils levaient ; leur palais et leurs armées devaient être entretenus, ce qui servait à nourrir et à faire vivre les artisans indiens. Le revenu des impôts faisait fructifier le pays, même si ces travaux témoignaient de la vanité des souverains. Or, avec l’établissement de la domination de la Compagnie des Indes orientales, ce dispositif a pris fin… C’est l’Angleterre qui a tiré ses bénéfices du pays… Non plus l’Inde.
    Sans doute y a-t-il là une idéalisation du passé musulman et des institutions prémusulmanes, telle la communauté villageoise, un double détournement qui a pour objet d’occulter l’existence d’une hiérarchie à tous les niveaux, de taire l’existence du régime des castes, réduit, chez les historiens indiens, à une simple division du travail ; de faire observer que le ralliement à l’Islam d’une partie de lapopulation a tenu, précisément, à l’ordre qu’il instituait. Au début du XX e  siècle, cet « oubli » de l’importance du système des castes allait dans le sens de l’intérêt des hautes castes, qui dominaient le mouvement national : car la caste ne pouvait pas s’intégrer, non plus, au modèle historique de type occidental qu’on cherchait à imiter pour trouver les voies de l’indépendance. Gommer le rôle des castes avait ainsi pour fonction d’assurer la prééminence des plus élevées, de réduire les différences avec les musulmans, de favoriser une unification du pays sous l’égide des hindous, ainsi identifiés à l’Inde tout entière.
    La mémoire historique se souvient ainsi de l’appauvrissement dû aux Anglais, pas des changements sociaux que leur présence a déterminés : montée des castes marchandes et des brahmanes, déchéance des guerriers…
    Histoire et contre-histoire
    Ainsi, histoire et contre-histoire recèlent des silences et des tabous qui n’en ont pas moins contribué à substituer une représentation en partie imaginaire au réel de l’analyse. Dans L’Histoire sous surveillance (p. 71-135), nous avons essayé d’en établir une typologie, depuis leurs formes écrites que les Noirs américains ont inaugurées dès 1794, jusqu’à leur expression cinématographique, multiple depuis les années soixante du XX e  siècle. En ce domaine, les peuples colonisés ont joué les pionniers.
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    1 .
Cf. in C.A. Bayly (op. cit.) un inventaire de monographies indiennes sur l’Inde coloniale, pour la période 1945-1979. On lui préférera l’étude de Cl. Markovits, analysée plus loin.

CHAPITRE VII
Les mouvements d’indépendance-colon
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    On appelle ici mouvements d’indépendance-colon les actions qui ont abouti ou non, et dont l’initiative appartient aux colons, à des Blancs ; cette première « décolonisation » marquant ainsi un apogée de l’expansion — alors que les autres mouvements indépendantistes, ceux des peuples colonisés, en marquent au contraire le reflux.
    On constate en effet que depuis ses origines jusqu’à la fin du XX e  siècle, ou presque, le rapport des colons à leur métropole d’origine a été ambigu : certes, le plus souvent, celle-ci les soutenait contre les rivaux, contre les indigènes ; mais les conflits qui les heurtaient ont pu néanmoins dégénérer au point que les colons ont choisi de rompre avec leur métropole — pour disposer d’une plus grande liberté d’action…
    C’est en ce sens que l’on peut considérer cette série de luttes indépendantistes comme le stade le plus avancé de l’expansion blanche aux colonies.
    Les conflits de ce type éclatent dès les origines ; tel est, par exemple, le mouvement pizarriste contre Charles Quint (en 1544-1548) avec des caractéristiques qu’on retrouve ailleurs. On décèle tout un itinéraire de mouvements de ce type jusqu’à la fin de la colonisation. Les enjeux sont variés — et, bien sûr, on ne saurait confondre ceux de la « révolution américaine », en 1783, avec ceux de l’indépendance des colonies espagnoles entre 1819 et 1825, voire avec ceux de la Rhodésie du Sud, devenue Zimbabwe qui se réclame des principes de la Révolution américaine. On ne saurait non plus confondre les

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