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Histoire du Consulat et de l'Empire

Histoire du Consulat et de l'Empire

Titel: Histoire du Consulat et de l'Empire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques-Olivier Boudon
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juillet et le 22 septembre, en deux époques, l'été et l'automne, propices aux réjouissances populaires, et respectueuses du calendrier liturgique. Ces fêtes de souveraineté, organisées pour célébrer le monarque, dans sa naissance, son sacre et ses victoires militaires, ont pour but d'inscrire le régime dans la mémoire collective. Leur succès, difficile à mesurer, varie selon les régions. L'unanimité n'a jamais été complète, mais les réjouissances festives ont tout de même contribué à populariser le régime.
    La force et la durée du culte impérial tiennent aussi à la convergence entre un culte institutionnel, parfaitement encadré et réglé par les diverses autorités, et un culte populaire plus vivace qu'on ne le pense souvent. La distribution massive de médailles à l'effigie de l'Empereur, comme aussi la diffusion large de statues et de bustes le représentant ont contribué à ce développement. Les estampes représentant Napoléon se multiplient. On le montre sur le champ de bataille, mais aussi en homme de paix. La ferveur populaire, au cours de ses voyages, est un autre signe de l'attrait que suscite Napoléon. On veut le voir et le toucher comme un saint vivant.
    Victor de Broglie, très critique à l'égard de Napoléon, ne peut s'empêcher de noter, relatant le passage de l'Empereur dans une auberge, alors qu'il fait route vers l'Espagne : « Je ne dirai point, comme la servante de notre auberge que, dans tout ce qu'il fit, il avait la couronne sur la tête et le sceptre à la main. Je n'ai, quant à moi, rien vu de pareil ; mais, faisant nombre, comme un autre, parmi les badauds qui se pressaient à son entrée et à sa sortie, il me parut qu'en lui tout sentait l'Empereur, et l'Empereur des plus mauvais jours 1 1 . » George Sand, évoquant la vie au château de Nohant, rapporte ce souvenir : « Ma mère était comme le peuple, elle admirait et adorait l'Empereur à cette époque. Moi, j 'étais comme ma mère et comme le peuple 12. » Les exemples de cette vénération quasi irrationnelle sont nombreux. Ils expliquent la vigueur d'un culte impérial qui ne touche pas les seules classes populaires.
    C'est dans l'armée que la vénération à l'égard de Napoléon est la plus forte. Tous les témoignages concordent sur ce point, même s'il faut nuancer leur portée, dans la mesure où ils émanent de soldats qui ont survécu aux combats et ont écrit plusieurs années après, avec une tendance à idéaliser cette période. Par leur convergence même, ces témoignages révèlent la force de la ferveur napoléonienne chez les soldats de la Grande Armée. Les quelques préventions du début du Consulat ont disparu. Napoléon a, il est vrai, 197
     
    LA NAISSANCE D'UNE MONARCHIE (1804-1809)
    multiplié les gestes en faveur de ses troupes. Même si certains souvenirs ont pu être arrangés après coup, ils n'en témoignent pas moins de la vénération à l'égard du chef de guerre, proche de ses hommes. Ainsi, dans un passage de ses Cahiers, Jean-Roch Coignet, officier de la Garde sorti du rang, évoque l'image de Napoléon, alors que le froid régnait à la veille de la bataille d'Eylau, le 7 février 1807 : « L'Empereur nous fit allumer son feu au milieu de nos bataillons, il nous demanda une bûche et une pomme de terre par chaque ordinaire [ ... ] Il s'assit au milieu de ses vieux grognards sur une botte de paille, un bâton à la main. Nous le voyions retourner ses pommes de terre, en faire le partage avec ses hommes de camp 13. » La vénération naît de cette communion partagée, dans l'adversité, avec ses hommes. Geste naturellement exceptionnel, il frappe les esprits et contribue à la naissance du mythe. Napoléon au bivouac devient un des thèmes de la peinture napoléonienne.
    Dans le monde des écoles aussi, on communie en faveur de ce véritable héros national qu'est pour la plupart des jeunes gens Napoléon. Musset se fait l'interprète de cette génération qui a grandi au son des canons et des victoires : « C'était l'air de ce ciel sans tache, où brillait tant de gloire, où resplendissait tant d'acier, que les enfants respiraient alors. Ils savaient bien qu'ils étaient destinés aux hécatombes ; mais ils croyaient Murat invulnérable, et on avait vu passer l'Empereur sur un pont où sifflaient tant de balles, qu'on ne savait s'il pouvait mourir. Et quand même on aurait dû mourir, qu'est-ce que cela ? La mort elle-même était si belle alors, si grande, si

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