Histoire du Consulat et de l'Empire
des ministres comme Cretet ou des soldats comme le maréchal Lannes, morts au service de l'État. Les grandes figures du régime sont associées au développement d'un culte impérial qui sert de ciment à une monarchie encore jeune et sans véritable racine.
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Les fondements du régime
L'une des caractéristiques du régime napoléonien est l'attention portée à la construction d'un État solide et durable. Le chantier des réformes entreprises à l'époque du Consulat se poursuit sous l'Empire et laisse percevoir ses premiers résultats vers 1810.
1. L'ESSOR DE L'ADMINISTRATION
Avec l'Empire, l'appareil d'État se renforce. La fonction publique, telle qu'on la connaît aujourd'hui, naît véritablement à l'époque de Napoléon. Sous la Révolution, l'officier d'Ancien Régime se mue en administrateur, avant de devenir sous le Consulat et l'Empire un
« fonctionnaire public ». Le terme désigne alors « quiconque exerce une fonction de gouvernement et touche un traitement de l'État 1 ».
Les fonctionnaires détiennent le pouvoir, tandis que les employés, chers à Balzac, exécutent leurs ordres. Les uns et les autres forment la fonction publique. Les fonctionnaires reçoivent leur nomination du chef de l'État ; ils doivent en retour lui prêter serment de fidélité, geste en partie formel, mais qui n'en recèle pas moins la volonté d'attacher le fonctionnaire à l'État, incarné dans la personne de Napoléon.
Cet essor de la fonction publique se manifeste d'abord par l'organisation des départements ministériels. Chacun se dote d'une administration plus ou moins étoffée, mais toujours hiérarchisée. Les ministères sont divisés en sections sur lesquelles règnent les directeurs du ministère dont le rôle ne cesse de s'affirmer ; ils sont secondés par des chefs de bureau qui régentent une nuée de plus en plus importante d'employés, composés de rédacteurs, huissiers, expéditionnaires et autres commis. À chaque fonction correspond un traitement, selon une échelle qui va de huit cents francs par an à 202
LES FONDEMENTS DU RÉGIME
douze mille francs pour les directeurs de ministère, sans compter les éventuelles gratifications qui viennent s'y rajouter. Chaque département est administré, sur ce plan, de façon autonome. De l'entrée dans un ministère ne répond à aucune règle précise ; elle est le plus souvent le résultat de recommandations de personnages haut placés. Les places sont convoitées, d'autant plus que le renforcement de l'administration ouvre des perspectives aux jeunes gens ayant quelque instruction et de nombreuses relations.
Le ministère de l'Intérieur, avec ses deux cent cinquante employés, est le plus imposant. Il gère aussi le budget le plus important, si l'on met la guerre à part, plus de cinquante-huit millions de francs à la fin de l'Empire, soit plus du quart des dépenses civiles, le remboursement de la dette excepté. Installé depuis 1795 rue de Grenelle, dans l'actuelle mairie du VIP arrondissement, il continue de se développer, malgré l'autonomie acquise par certaines de ses directions qui accèdent au rang de ministères : les cultes en 1804, le commerce en 181 1. Il s'organise autour d'un secrétaire général, chargé de répartir l'énorme correspondance qui arrive chaque jour au ministère ; c'est lui aussi qui assure la coordination entre les diverses sections et directions. Deux d'entre elles ont conservé un très grand poids tout en étant relativement autonomes, la direction des Ponts et Chaussées et celle de l'Instruction publique, qui est entre les mains du chimiste Fourcroy de 1802 à 1808 et se décompose ellemême en trois bureaux. Les autres ministères fonctionnent selon le même schéma qui reproduit du reste l'organisation du travail au sein du gouvernement, le secrétaire général de chaque département jouant auprès de son ministre le rôle que remplit le ministre d'État auprès de Napoléon. Le ministère des Relations extérieures prend une importance d'autant plus grande sous l'Empire que la diplomatie est une des activités principales d'un régime sans cesse entre guerre et paix, et donc à la recherche d'alliances ou de traités.
Composé de six sections, dont deux territoriales, ce ministère emploie plus de soixantedix personnes dans ses bureaux et pilote l'action d'une quarantaine de diplomates et d'une cinquantaine de secrétaires d'ambassade ; il forme aussi des jeunes gens, environ quarantecinq, au
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