Histoire Romaine
roi
de Cœré, leur aurait fait subir une défaite désastreuse, et imposé un tribut
payable en vin : mais, après ces hostilités anciennes, la tradition
énumère avec complaisance les relations journalières et étroites, qui s’étaient
plus tard établies entre les deux centres commerciaux et maritimes des deux
peuples.
Nous disions que par la voie de terre, les Étrusques ne se
sont pas avancés au delà du Tibre. Nul vestige certain, du moins, n’indique qu’ils
soient allés plus loin. Nous les trouvons bien au premier rang dans l’armée
barbare, anéantie sous les murs de Cymé [ Cumes ] par
Aristodème, en l’an 230 de Rome [109] ;
mais tout ce que l’on peut en induire, à supposer vrais, jusque dans leurs
détails, les récits qu’on a faits de cet événement, c’est que des bandes
étrusiennes avaient pris part à cette expédition de flibustiers. On ne trouve
dans les terres, au sud du Tibre, aucun grand établissement étrusque ; et
l’histoire ne mentionne pas que les Latins se soient jamais vus attaqués et
refoulés sur leur propre territoire. Le Janicule, les deux rives du Tibre et
son embouchure sont toujours, et sans difficultés, demeurés entre les mains des
Romains. Veut-on parler d’immigrations dans Rome même ? Les annales
étrusques n’en mentionnaient qu’une seule : suivant elles, d’une bande, conduite
par Cœlius Vivenna de Vulsinies [ Volsinii , Bolsena ],
puis après sa mort, par son compagnon fidèle Mastarna , aurait
fini par entrer dans Rome, et s’établir sur le Cœlius. Nous admettons
volontiers la réalité du fait, sauf à rejeter la conjecture plus qu’improbable,
suivant laquelle ce même Mastarna serait plus tard devenu roi sous le nom de
Servius Tullius. Il faut, pour y ajouter foi, se convertir avec certains
archéologues au système du parallélisme des légendes. Le nom de quartier
Étrusque , donné à un groupe d’habitations situées au-dessous du Palatin,
semble aussi faire allusion à quelque immigration du même genre.
On ne peut pas, non plus, mettre en doute l’origine étrusque
des derniers rois de Rome, qu’ils soient venus de Tarquinies, comme le veut la
légende, ou plutôt de Cœré même, où la tombe des Tarchnas a été
récemment mise à jour [110] .
Enfin, le nom de femme Tanaquil ou Tanchvil [111] , mentionné dans
la légende, n’est point latin, et se rencontre fréquemment en Étrurie. Mais
aller croire avec les traditions reçues à Rome, que Tarquin l’Ancien était le
fils d’un Grec émigré de Corinthe à Tarquinies [112] , et qu’il était
venu lui-même se fixer à Rome : c’est embrouiller à la fois et l’histoire
et la légende ; c’est briser et confondre la chaîne des événements. N’acceptons
rien de plus de ce récit que le fait nu et insignifiant en lui-même, de l’introduction
dans Rome d’une famille de descendance étrusque, et à laquelle, un jour aurait
été remis le sceptre des rois. La royauté donnée à un citoyen originaire de l’Étrurie
n’implique nullement la conquête de Rome par les Étrusques, ou par une cité
étrurienne, pis plus qu’elle ne donne à conclure que Rome était alors maîtresse
de l’Étrurie méridionale. Il n’existe pas de raison suffisante pour accepter
soit l’une, soit l’autre, des deux hypothèses. Les Tarquins ont leur histoire à
Rome seulement ; et pendant le temps des rois, l’Étrurie n’a pas, que nous
sachions, exercé une influence décisive sur la langue ou sur les moeurs
romaines, ou arrêté dans leur cours également régulier, les progrès de l’État
romain et de la ligue latine. Qu’on ne s’étonne pas de l’état passif de l’Étrurie
en face de ses voisins : à cette même époque, les Étrusques avaient à
combattre les Celtes sur le Pô, que ceux-ci paraissent n’avoir franchi qu’à une
date postérieure à l’expulsion des rois. Puis, tous leurs intérêts s’étaient
tournés du côté de la mer et des expéditions maritimes. Ils visaient à la
domination des côtes, ainsi que le démontrent leurs établissements dans la Campanie,
sur lesquels nous reviendrons plus tard (ch. X).
Comme chez les Grecs et les Latins, les institutions
étrusques ont pour base l’association des diverses familles dans la cité. Mais
la nation étrusienne s’étant adonnée à la navigation, au commerce et à l’industrie,
de bien meilleure heure que les autres peuples de l’Italie, les institutions
urbaines se trouvèrent
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