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Il suffit d'un Amour Tome 2

Il suffit d'un Amour Tome 2

Titel: Il suffit d'un Amour Tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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plus tôt vers moi ? Pourquoi ne m'avez-vous rien dit ? Pourquoi m'avez-vous laissé croire pendant si longtemps qu'il était perdu pour moi ?
    — Mais... Madame, fit le frère interloqué, je ne pouvais pas deviner que vous l'ignoriez. Les nouvelles passent, malgré la guerre, de la Cour du roi Charles à celle du duc de Bourgogne... et je vous rappelle que, banni, je ne pouvais venir vers vous. Mon prieur a obtenu que soit rapporté l'arrêt qui me frappait... et j'accours vers vous. Irez-vous prier le duc pour Orléans ?
    Les yeux de Catherine, fixés dans le vague, brillaient comme des étoiles.
    Frère Étienne sentit qu'elle lui échappait, qu'elle était déjà loin, partie rejoindre le rêve ancien qu'elle retrouvait avec délices.
    — Madame... reprocha-t-il doucement, vous ne m'écoutez pas ? Irez-vous vers Monseigneur Philippe ?
    Elle revint à lui, l'enveloppa d'un sourire si éblouissant qu'il suffoqua le moine. Devant ses yeux, cette femme morne se transformait à vue d'œil.
    C'était comme si elle avait rejeté de ses épaules un manteau lourd et noir qui éteignait sa lumière intérieure. Catherine, en quelques instants, s'était transfigurée. Elle secoua la tête.
    — Non, mon frère !... Jamais plus je n'irai vers Philippe de Bourgogne !
    Ne me le demandez pas, je n'irai pas ! Sans vous en douter, vous venez de m'apporter le signe du destin que j'attendais. C'est fini...
    — Mais Madame... Orléans...
    — Orléans ? J'y vais !... Dès demain je partirai d'ici pour rejoindre la ville assiégée. Vous m'avez dit qu'il était toujours possible d'y entrer, j'y entrerai...
    et j'y mourrai, s'il le faut !
    — Votre mort n'aidera en rien la cité, Madame, fit le moine sévèrement.
    Elle n'a aucun besoin d'un cadavre supplémentaire à ensevelir dans les ruines de ses murs. Elle a besoin que les Bourguignons s'en aillent.
    J'ai déjà prié le duc de retirer ses troupes, au mois d'octobre. 11 n'en a rien fait. Pourquoi donc pensez-vous qu'il en serait autrement aujourd'hui ? Le duc va se remarier. Mon pouvoir va cesser. Tout ce que je peux faire, pour vous, c'est écrire au duc, lui apprendre que je vais m'enfermer dans la ville assiégée et que, s'il tient à ma vie, il doit retirer ses hommes... Peut-être cela vous sera-t-il utile... peut- être que non ! Mais je ne peux pas faire plus !
    Elle s'était levée, frémissante de joie et déjà animée de. la hâte de se mettre en route. À pas rapides, elle se dirigea vers la porte, faisant voler derrière elle sa traîne de drap noir ourlée de renard.
    — Poursuivez votre repas, mon frère, dit-elle. J'ai des dispositions à prendre...
    Elle s'élança dans l'escalier pour rejoindre Ermengarde qui, justement, remontait. Les deux femmes se rencontrèrent à mi-hauteur. Incapable de se contenir plus longtemps, Catherine saisit son amie aux épaules et lui plaqua deux baisers retentissants sur les joues.
    — Ermengarde... embrassez-moi. Je pars !
    — Vous partez ? Mais pour où ?
    — Pour Orléans... et pour mourir si besoin est ! Jamais je n'ai été plus heureuse !...
    Avant que la comtesse, stupéfaite, ait pu placer un mot, Catherine avait continué de dégringoler l'escalier à la recherche de Sara qu'elle voulait charger de préparer ses bagages au plus vite. Son cœur sautait dans sa poitrine et, si elle n'eût été retenue par un ultime souci de respectabilité, elle eût chanté de bonheur. Elle savait, d'une profonde certitude, ce qu'elle devait faire maintenant : rejoindre Arnaud, par tous les moyens, lui crier une dernière fois son amour et s'ensevelir avec lui dans les ruines du dernier bastion de la royauté française. Orléans serait le tombeau gigantesque, à la mesure de son amour, où cet amour, enfin, reposerait en paix...
    Catherine ignorait, comme frère Étienne lui-même, que ce même jour une jeune fille de dix-huit ans qui venait des marches de Lorraine, vêtue d'un petit habit de garçon noir et rude, avait plié le genou devant Charles VII dans la grande salle du château de Chinon et lui avait dit: «Gentil Dauphin, j'ai nom Jehanne la Pucelle et je suis venue avec mission de donner secours à vous et au Royaume. Et vous mande le Roi des Cieux, par moi, que vous serez sacré et couronné à Reims... » On était, ce jour-là, le 8 mars 1429.
    À l'aube du lendemain, six cavaliers franchirent au galop de chasse le pont-levis du château. Debout sur l'une des tours d'entrée, une silhouette noire les regarda

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