Il suffit d'un Amour Tome 2
chercher tout de suite, je saute.
— Vous n'êtes pas folle ? Qu'est-ce que ça peut bien vous faire qu'on s'amuse avec votre domestique ?
— Occupez-vous de ce qui vous regarde et faites ce que je vous dis.
Sinon...
Elle se glissait déjà sur l'appui de la fenêtre. Tranchemer hésita. Il avait bonne envie de lui sauter dessus et de l'assommer un bon coup pour la faire tenir tranquille. Mais le Diable seul savait ce qu'elle ferait en revenant à elle
! Et, de toute façon, tout ça, c'était beaucoup trop compliqué pour la cervelle simpliste du lieutenant. Il ne pouvait ni abîmer ni laisser se détruire une proie comme celle-là, une proie en or sur laquelle Fortépice comptait pour se faire une fortune. S'il arrivait quelque chose à cette diablesse de femme, Tranchemer savait bien que son chef lui arracherait la peau par minces lanières, comme il le faisait si volontiers quand il en voulait sérieusement à quelqu'un. Mieux valait encore prendre le risque de le déranger dans ses ébats.
— Tenez-vous tranquille ! fit-il de mauvaise grâce. J'y vais ! Mais n'en prenez qu'à vous de ce qui se passera...
Tandis que Catherine, lentement, reposait ses pieds à terre, Tranchemer sortit, non sans refermer soigneusement la porte. Restée seule, la jeune femme essuya la sueur qui perlait à son front. Elle avait eu un instant de vraie folie. A la pensée de sa fidèle Sara livrée à ces soudards ignobles, elle avait oublié tout ce qui n'était pas sa plus vieille amie. Elle se fût jetée au bas de la tour sans la moindre hésitation, pour le seul et bien mince plaisir de mettre Tranchemer dans une situation impossible. Mais, maintenant, il fallait qu'elle récupérât son sang-froid pour affronter Fortépice dont elle ne doutait pas de la prochaine venue.
Il arriva, en effet, quelques minutes plus tard, avec la mine hargneuse d'un chien à qui l'on vient de retirer son os, seulement vêtu de ses chausses et d'une chemise ouverte sur la poitrine et déchirée en plusieurs endroits.
— Qu'est-ce que vous voulez ? aboya-t-il du seuil. Est-ce que vous ne pouvez pas vous tenir tranquille ou bien faut-il vous mettre aux fers ?
Dans cet appareil sommaire, sa jeunesse frappait bien davantage que sous son harnais guerrier. Catherine s'aperçut qu'elle n'en avait plus peur du tout.
Elle se sentait tout à fait calme et parfaitement maîtresse d'elle-même.
— Les fers ne changeraient rien à ce que j'ai à vous dire, fit-elle froidement. Je vous ai fait venir pour vous prier de laisser Sara tranquille !
Que vous mettiez sur elle vos pattes sales me déplaît presque autant que si vous vous attaquiez à moi. Et la générosité de Monseigneur Philippe pourrait s'en ressentir...
Fortépice la regardait en dessous. Il eut un rire bref qui ressemblait à un hennissement.
— Vous parlez bien haut pour une prisonnière ! Quant à votre Sara, il se trouve que votre prière... arrive un peu trop tard. J'ajouterai qu'elle me plaît infiniment et que je n'ai aucune envie de la laisser. Je la garde.
— Je sais comment vous faites, cria Catherine que la colère emportait à nouveau. Vos hommes passeront après vous ! Eh bien, je vous fais serment, moi, que vous ne tirerez pas un sol de ma capture si vos affreux bandits y touchent, même du bout du doigt. Je veux la voir, vous entendez, je le veux...
Rapidement, le chef des contrebandiers s'approcha de Catherine. Avant qu'elle ait pu s'en défendre, il l'avait ceinturée, collée à lui. Il était blanc de rage.
— En voilà assez ! Je ne la livrerai pas à mes hommes, si ça peut te faire plaisir. Mais je te conseille de te taire si tu ne veux pas la remplacer dans mon lit...
— Je suis trop maigre !
— Voire ! Dans un costume de garçon peut-être. Mais cette robe change bien des choses et je pourrais oublier que tu vaux cher. D'autant plus que tu n'es plus pucelle, j'imagine, et que Philippe de Bourgogne n'y perdrait pas grand-chose si je m'amusais un peu avec toi. Alors, je te conseille de te taire.
Brusquement, de sa main libre, il la prit à la nuque, força son visage rouge de colère à s'approcher du sien et l'embrassa longuement. Il avait des doigts de fer et, malgré sa défense vigoureuse, Catherine dut subir jusqu'au bout ce baiser qui lui faisait horreur. Quand il la lâcha, elle tituba, recula jusqu'à une colonne du lit à laquelle elle s'accrocha.
— Tu as compris, je pense ? fit Fortépice avec une soudaine douceur. Je te conseille de
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