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Il suffit d'un Amour Tome 2

Il suffit d'un Amour Tome 2

Titel: Il suffit d'un Amour Tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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l'aube, ce fut Pierre qui la secoua. Il devait aller au champ et il n'avait guère de temps à perdre. Elle vit d'ailleurs que Magdeleine était déjà levée et s'activait.
    — J'ai réfléchi, cette nuit, dit Pierre. Le mieux, pour t'éviter des mauvaises rencontres, c'est que tu te fasses passer pour une pèlerine en route pour la sainte abbaye du grand Saint-Benoît. On trouve de tout, pour notre malheur, dans nos pays de Puisaye, du bon et du mauvais. Tu es jeune... et belle. Le bâton de pèlerin te protégera.
    Tout en parlant, il sortait d'une armoire prise dans le mur un bâton auquel était accrochée une gourde de fer.
    — Un mien oncle a fait jadis le pèlerinage de Compostelle, dit-il en riant.
    Prends son bâton, tu auras l'air plus vraie !
    En même temps, sans rien dire, Magdeleine jetait sur les épaules de Catherine une sorte de mante grossière à capuchon en disant qu'avec cela elle serait mieux protégée. La jeune fille ajouta encore un gros quignon de pain et un petit fromage de chèvre puis elle embrassa Catherine.
    — Que Dieu te garde sur ta route, dit-elle gentiment, et qu'il t'aide à retrouver ton bien-aimé ! Si tu vois Colin, tu lui diras que je l'attends et que je l'attendrai toujours.

    Émue aux larmes, Catherine voulut se défendre d'accepter mais elle comprit vite que son refus leur serait une offense. De même, elle n'osa pas sortir ses trois pièces d'argent de peur de les blesser. Elle embrassa chaleureusement Magdeleine, sans trouver un seul mot tant sa gorge était serrée, puis suivit Pierre qui l'attendait au seuil. Dans le sentier, elle se retourna plusieurs fois pour adresser encore quelques signes d'adieu à la jeune fille.
    Debout sur sa porte, Magdeleine la regardait s'éloigner... Pierre, devant elle, marchait à grandes enjambées régulières, sans hâte. Elle revit l'endroit où il l'avait trouvée la veille puis, à travers champs, il la mena jusqu'à une sorte de chemin où de grandes dalles de pierre, verdies d'herbe et de mousse, affleuraient encore de loin en loin. Sur le bord de la route, une antique statue lépreuse qui représentait le buste et la tête bouclée d'un jeune garçon se voyait encore bien que les intempéries l'eussent plus qu'à demi rongée. Là, Pierre s'arrêta, le bras étendu vers l'occident.
    — Voilà ta route ! Va tout droit jusqu'à ce que tu trouves le grand fleuve.
    Elle leva vers lui son regard chargé de reconnaissance.
    — Comment vous remercier, toi et ta sœur ?
    — En ne nous oubliant pas tout à fait ! fit-il en haussant ses lourdes épaules. Nous, nous prierons pour toi...
    Comme s'il avait hâte de la quitter tout à coup, il se détournait pour reprendre son chemin à travers champs, mais, soudain, se ravisa, revint à elle.
    Et puis..., fit-il d'une voix sourde, au cas... sait- on jamais ? où tu ne retrouverais pas celui que tu aimes, je voulais te dire que tu pourrais revenir chez nous. On sera toujours heureux, Magdeleine et moi... moi surtout, tu sais, de t'avoir à la maison...
    Avant que Catherine eût réalisé le sens de cette si simple déclaration, Pierre avait tourné les talons et courait déjà à travers champs, comme on se sauve. Elle resta là un moment, regardant la silhouette massive se dissoudre peu à peu dans les grisailles du petit jour. Des larmes roulaient sur ses joues sans qu'elle songeât à les essuyer. Elle était sensible à cet amour fruste et pudique qui, né si soudainement, avait à peine osé se montrer. C'était comme une petite flamme amicale qu'elle allait emporter avec elle au long de sa route. Autour d'elle, le jour, en grandissant, sortait les choses de leur aspect indistinct, les ciselait de plus en plus vigoureusement. Elle pouvait voir, derrière elle, fumer les toits de Toucy, distinguer la bannière bleue sur le donjon du château. Les cloches s'éveillaient pour l'Angélus, répandant leurs notes frêles sur la terre grasse et déjà verdoyante de la campagne. Une alouette chanta, quelque part, et Catherine éprouva une joie profonde, simple et primitive comme la nature immense et vide qui l'entourait. Devant elle, la vieille route romaine s'enfonçait entre deux vallonnements. Murmurant une fervente action de grâce à la Sainte Mère de Dieu qui lui avait donné ce moment de réconfort, Catherine appuyée sur son bâton de pèlerin se mit en route.
    Au coucher du soleil, le lendemain, Catherine, assise dans les roseaux, regardait couler à ses pieds l'eau grise de la

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