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Il suffit d'un amour

Il suffit d'un amour

Titel: Il suffit d'un amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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Mais, avant de refermer la porte la gitane se retourna, cherchant le regard de Catherine, espérant que l'ordre ne la concernait pas. Debout au milieu de la chambre, fixant les flammes de la cheminée, Catherine ne se retourna pas. Alors Sara sortit avec un soupir.

    Quand elle fut seule, la jeune femme alla à la fenêtre, repoussa les lourds volets de bois peints et dorés qui rappelaient la décoration des poutres du plafond. Son regard plongea dans la cour de l'hôtel comme au fond d'un puits. Aucune lumière ne s'y montrait. Chez Garin, tout était obscur. Elle eut envie d'appeler Sara pour lui demander d'aller voir ce que faisait son mari, mais l'amour-propre la retint. Si elle envoyait chez lui sa servante, Dieu sait ce que Garin imaginerait ?
    Peut-être qu'elle désirait sa présence, alors que, justement, elle craignait cette présence et souhaitait apprendre qu'il ne lui rendrait pas visite ce soir-là. Mais Catherine se tourmentait à tort. Ni cette nuit, ni les nuits suivantes, Garin de Brazey ne vint frapper à la porte de sa femme ! Parfaitement illogique, celle-ci en éprouva quelque dépit...
    Durant les jours qui s'écoulèrent entre son retour et la présentation de Catherine à la duchesse-douairière, Garin de Brazey sembla prendre plaisir à faire admirer à sa jeune femme toutes les merveilles cachées de son hôtel. Pendant son absence, celle-ci avait pu prendre possession de ses propres appartements et aussi de toute la partie réservée aux réceptions et à la vie publique. Après la grande salle au plafond doré et historié, tendue d'admirables tapisseries d'Arras à fils d'or qui retraçaient la vie des Prophètes, elle avait pu admirer plusieurs autres pièces qui lui faisaient suite, un peu plus petites mais décorées avec un luxe extraordinaire. Elles étaient toutes tendues de ce violet pourpré cher au maître de céans, décorées d'or et d'argent et, de plus, des merveilles d'orfèvrerie s'y entassaient avec des livres rares aux couvertures ornées de pierres fines, des coffres d'émail, des statues d'or, d'ivoire et de cristal, des tapis épais où le pied enfonçait jusqu'à la cheville, des instruments de musique taillés dans les bois les plus précieux et les plus rares. Elle avait aussi fait connaissance des énormes cuisines, agencées pour nourrir une véritable foule, du jardin planté de buis et de roses, des écuries, des resserres à provisions. Mais elle n'avait pas pénétré dans l'aile gauche que commandait une porte unique, en chêne aux énormes pentures de fer et toujours fermée à clef, ni dans les appartements de son mari. Cette aile s'ouvrait tout au fond de la grande galerie aux vitraux multicolores qui courait tout le long du premier étage de l'hôtel. Lorsque Garin, après avoir saisi un flambeau allumé, ouvrit la mystérieuse porte, Catherine comprit pourquoi on la gardait si soigneusement fermée. L'aile gauche, d'aspect très féodal, éclairée seulement par d'étroites meurtrières, n'était en fait qu'une vaste resserre dans laquelle le Grand Argentier entreposait une foule de choses venues de tous les coins du monde et qu'il faisait revendre ensuite, avec grand profit, par ses nombreux agents. Car, à ses nobles et très honorifiques fonctions, Garin joignait un commerce de grande envergure qui, pour être secret et gêné actuellement par la guerre, n'en était pas moins très lucratif.
    — Vous voyez, fit Garin mi-sérieux, mi-moqueur en la guidant à travers les salles bondées, je vous livre mes secrets. Dans l'unique but, d'ailleurs, que vous me fassiez la grâce de prendre ici tout ce dont vous aurez envie.
    Elle sourit pour le remercier puis, à sa suite, parcourut le vaste entrepôt les yeux grands ouverts d'admiration. L'une des chambres contenait des tapis, enroulés les uns sur les autres, répandant une odeur lourde et musquée, évocatrice de soleil et de pays lointains. Le chandelier que portait Garin faisait vivre un instant leurs couleurs chatoyantes. Tapis d'Asie Mineure, de Brousse, de Smyrne ou de Kusch aux teintes chaleureuses, vert sourd ou bleu profond pour mieux faire chanter l'éclat des pourpres, tapis du Caucase aux harmonieux dégradés, tapis persans de Herat, de Tabriz, de Meched ou de Kashan, fleuris comme des jardins de rêve, Boukhara somptueux, Samarcandes éclatants et jusqu'à d'étranges tapis de soie du Khotan, à trames lâches, venus de la Chine fabuleuse.
    D'autres pièces renfermaient les draps dorés de

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