Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Il suffit d'un amour

Il suffit d'un amour

Titel: Il suffit d'un amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
devez avoir faim, dit-elle doucement. Il vous faudra des forces et j'ai profité de ce que ma sœur était allée chez une voisine pour descendre. La maison est vide pour le moment. Mon père est à la Maison-aux-Piliers, ma mère chez celle de Landry qui est en mal d'enfant et Marion la servante je ne sais où. Si cela continue, vous n'aurez aucune peine à quitter Paris cette nuit. Landry reviendra vers minuit. Il n'est que dix heures.
    — Cela sent bon, dit-il avec un sourire qui combla Catherine de joie. J'ai vraiment très faim...
    Tout en attaquant le mouton à belles dents, il bavardait.
    — Je ne peux pas encore croire à ma chance, petite Catherine !
    Tout à l'heure, quand on m'emmenait, j'ai tellement pensé ma dernière heure venue que j'étais réellement prêt à quitter la vie. J'avais dit adieu à tout. Et voilà que vous m'avez ramené sur terre. C'est étrange !
    Il avait l'air, tout à coup, très lointain. La fatigue et l'angoisse avaient tiré ses traits, mais, sous la lumière tremblante de la chandelle, ses cheveux brillaient autour de son beau visage. Il s'efforçait de sourire. Pourtant Catherine voyait dans ses yeux quelque chose de désespéré qui, soudain, lui fit peur.
    — Mais... vous êtes content, n'est-ce pas, d'être ici ?
    Il la regarda, la vit tout angoissée, frêle sous la parure brillante de sa chevelure répandue qui, en séchant, prenait tout son éclat. La robe verte qu'elle portait maintenant, lui donnait un aspect attendrissant île petite divinité des forêts, et aussi ces yeux immenses aux profondeurs liquides qu'elle ouvrait sur lui. Ils étaient semblables à ceux des biches qu'il aimait poursuivre à la course quand il était enfant.
    — Je serais bien ingrat si je n'étais pas content, dit-il doucement.
    — Alors... mangez un peu de miel. Et aussi, dites- moi à quoi vous pensiez, tout de suite. Vous aviez des yeux si tristes.
    — Je pensais à mon pays. Sur le chemin de Montfaucon, c'était aussi à lui que je pensais. Je me disais que je ne le reverrais plus jamais et c'était cela, surtout, qui me faisait mal.
    — Mais vous savez que vous le reverrez, maintenant, puisque vous allez être libre.
    Michel sourit, prit une bouchée de pain qu'il trempa dans le miel et mâcha distraitement.
    — Je sais, mais c'est plus fort que moi ! Il y a au fond de mon cœur quelque chose qui me dit que je ne retournerai jamais là-bas, à Montsalvy.
    — Il ne faut pas penser à ça, fit Catherine sévèrement. Vous avez des idées noires parce que vous êtes fatigué, affaibli. Quand vous aurez repris vos forces, cl que vous serez en sûreté, tout ira mieux.
    Mais le peu qu'il avait dit de son pays avait excité la curiosité de sa compagne. Elle était incapable de résister au besoin impérieux qu'elle avait d'en savoir davantage sur ce garçon qui la fascinait. Elle se glissa auprès de lui, le regardant avidement vider la-cruche d'eau.
    — Comment est-ce votre pays ? Vous voulez bien m'en parler ?
    — Bien sûr !
    Michel ferma les yeux un moment, peut-être pour mieux revoir les chères images de son enfance. Il les avait appelées si ardemment, durant son interminable voie douloureuse qu'elles se formèrent aisément sur l'écran sombre des paupières closes.

    Avec des mots simples, il évoqua pour Catherine son haut plateau battu des vents, sa lande granitique trouée de combes toutes ouatées de verts châtaigniers, son pays d'Auvergne hérissé de cratères éteints, le village de Montsalvy et ses maisons de lave tassées autour de leur abbaye, la forteresse familiale au flanc du puy et la petite chapelle de la Fontaine Sainte. En l'écoutant, Catherine croyait voir les champs de blé noir, les ciels lilas, au crépuscule, quand la chaîne des monts devient un cortège de fantômes bleutés, les eaux qui jaillissent, si blanches parmi les pierres toujours lavées, pour devenir noires en se perdant au fond des lacs, sertis de mousse et de granit comme de sombres escarboucles. Elle entendait aussi le vent du midi chantant de roche en roche, la plainte des tourmentes hivernales sur les chemins de ronde du château fort. Michel disait encore les troupeaux de moutons pâturant dans la lande, les bois hantés de loups et de sangliers et les ruisseaux tumultueux où sautaient les truites roses et argent. Et Catherine, fascinée, l'écoutait bouche bée, oubliant le lieu, oubliant l'heure qui passait.
    — Et vos parents ? demanda-t-elle quand il se tut. Vous les avez

Weitere Kostenlose Bücher