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Imperium

Imperium

Titel: Imperium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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portant le sceau
de Pompée le Grand. Cicéron la décacheta et laissa échapper une exclamation de
surprise.
    — On a attaqué Rome ! annonça-t-il, faisant même
se redresser brièvement Pomponia de la banquette où elle était couchée.
    Il poursuivit rapidement sa lecture. On avait mis le feu à
la flotte de guerre consulaire à Ostie, où elle mouillait pour l’hiver. Deux
préteurs, Sextilius et Bellinus, avaient été enlevés avec leurs licteurs et
équipes au complet. C’était là l’œuvre de pirates qui cherchaient purement et
simplement à répandre la terreur. La panique gagnait la capitale, et le peuple
réclamait des mesures.
    — Pompée me veut tout de suite auprès de lui, dit
Cicéron. Il convoque après-demain un conseil de guerre dans sa propriété de
campagne.

XI
    Laissant les autres derrière nous et voyageant sans relâche
en voiture à deux roues (Cicéron ne montait à cheval que lorsqu’il ne pouvait
faire autrement), nous parcourûmes le chemin en sens inverse et arrivâmes à la
villa de Tusculum le lendemain, à la tombée de la nuit. La propriété de Pompée
se trouvait de l’autre côté des monts Albains, à seulement cinq milles au sud.
Le retour précipité de leur maître surprit les esclaves de maison en pleine
paresse, et ils durent se bousculer pour remettre tout en ordre. Cicéron prit
un bain et se mit directement au lit, mais je ne crois pas qu’il dormit très
bien : il me sembla l’entendre au milieu de la nuit remuer dans la
bibliothèque, et je trouvai le lendemain matin un exemplaire de l’Éthique à
Nicomaque d’Aristote à demi déroulé sur son bureau. Mais les hommes
politiques sont des créatures résistantes. Lorsque j’entrai dans sa chambre, il
était déjà habillé et impatient de découvrir ce que Pompée avait en tête. Nous
nous mîmes en route dès qu’il fit jour. Notre chemin nous fit contourner le
grand lac d’Albe et, dès que le soleil projeta ses lueurs roses sur les cimes
enneigées, nous vîmes des silhouettes de pêcheurs tirer leurs filets des eaux
rutilantes.
    — Y a-t-il au monde un pays plus beau que l’Italie ?
murmura Cicéron en inspirant profondément.
    Bien qu’il ne le dît pas, je sus ce qu’il pensait parce que
c’est ce que j’éprouvais aussi : c’était un soulagement d’avoir échappé à
la tristesse pénétrante d’Aprinum, et il n’y a rien de tel que la mort pour se
sentir en vie.
    Nous finîmes par quitter la route pour franchir une grille
imposante sur une longue allée de gravier blanc bordée de cyprès. Les jardins
symétriques qui s’étendaient de part et d’autre étaient peuplés de statues de
marbre, sans doute acquises par le général lors de ses campagnes. Des
jardiniers ratissaient les feuilles mortes et taillaient les bordures de buis.
Il se dégageait de l’endroit une impression d’opulence tranquille et assurée.
Juste avant de franchir l’entrée de la grande demeure, Cicéron me chuchota de
rester à proximité, et je me glissai discrètement derrière lui, porteur d’un
coffret à documents. (D’ailleurs, mon conseil pour quiconque voudrait passer
inaperçu est de toujours transporter des documents ; ils projettent comme
un manteau d’invisibilité sur celui qui les porte tout aussi efficace que ce qu’on
trouve dans les légendes grecques.) Pompée recevait ses hôtes dans l’atrium,
jouant les grands seigneurs campagnards avec, à ses côtés, sa troisième épouse,
Mucia, son fils, Gnaeus – qui devait avoir à peu près onze ans à l’époque –,
et sa petite dernière, Pompéia, qui venait d’apprendre à marcher. Mucia était
une belle matrone sculpturale de la gens Metellus, qui n’avait pas
encore trente ans et attendait visiblement un nouvel enfant. Je découvris par
la suite qu’une des particularités de Pompée était d’aimer sa femme, qui qu’elle
fût à l’époque. Mucia riait à une remarque qu’on venait de lui faire et,
lorsque l’auteur de la plaisanterie se retourna, je vis qu’il s’agissait de
Jules César. Cela m’étonna, et ne manqua pas de surprendre également Cicéron
dans la mesure où, jusqu’à présent, nous n’avions jamais vu dans l’entourage de
Pompée que le trio de Picenum : Palicanus, Afranius et Gabinius. De plus,
César venait de passer un an en Espagne, à accomplir sa questure. Mais il était
là, souple et bien bâti, doté d’un long visage intelligent, d’yeux bruns amusés
et de cheveux noirs

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