Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Imperium

Imperium

Titel: Imperium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
Vom Netzwerk:
la journée commençait lorsque le
soleil tombait à l’ouest de la Colonne de Ménius. Je ne doutais pas que cet
instant était imminent, et que l’employé chargé de constater la position du
soleil était déjà en route pour annoncer l’heure au consul. Il était en effet
interdit au Sénat de siéger après le coucher du soleil. De toute évidence,
Hortensius et ses amis projetaient de garder la parole pendant toute la
dernière heure de la séance afin d’empêcher que la motion de Cicéron fût
soumise au vote. J’eus à peine le temps de vérifier par moi-même la positon du
soleil, de retraverser le forum en courant et de me glisser parmi la foule
jusqu’au seuil de la curie que Gellius annonçait :
    — La dernière heure !
    Cicéron se leva aussitôt afin de soulever un point de
procédure, mais Gellius ne voulut rien entendre, et la parole était toujours à
Catulus. Celui-ci retraçait interminablement l’histoire du gouvernement
provincial, partant pratiquement de l’époque où la louve allaitait Romulus. (Le
père de Catulus, également consul, était mort de façon tristement célèbre en s’enfermant
dans une pièce hermétique où il fit brûler du charbon de bois pour s’asphyxier
avec la fumée ; Cicéron soutenait qu’il avait sûrement fait cela pour ne
plus avoir à écouter les discours de son fils.) Lorsque celui-ci finit par
atteindre une sorte de conclusion, il céda aussitôt la parole à Quintus
Metellus. À nouveau, Cicéron se leva, mais il fut cette fois encore battu par
la règle du rang. Metellus jouissait de la dignité prétorienne et, à moins qu’il
ne choisît de lui céder la parole, ce qui n’entrait évidemment pas dans ses
intentions, Cicéron n’avait aucun droit de la lui prendre. Pendant un instant,
Cicéron voulut insister malgré un rugissement de protestations, mais les hommes
qui l’encadraient – dont l’un était Servius, son ami juriste qui
avait ses intérêts à cœur et voyait qu’il risquait de se ridiculiser – tirèrent
sur sa toge et le firent asseoir.
    Il était interdit d’allumer une lampe ou un quelconque feu à
l’intérieur de la curie. À mesure que l’obscurité tombait, le froid s’intensifiait
et les formes blanches des sénateurs, immobiles dans le crépuscule de novembre,
commençaient à évoquer une assemblée de fantômes. Lorsque Metellus eut parlé
pendant ce qui sembla durer une éternité puis se fut assis en cédant la parole
à Hortensius – qui était capable de discourir sur n’importe quoi
pendant des heures –, tout le monde savait que le débat était terminé, et
Gellius ne tarda pas à clore la séance. Il descendit l’allée en boitillant,
vieillard pressé d’aller dîner, précédé par quatre licteurs porteurs de sa
chaise curule. Une fois qu’il eut franchi la porte, les sénateurs le suivirent
tandis que Sthenius et moi battions en retraite dans le forum pour y attendre
Cicéron. Peu à peu, la foule autour de nous se clarifia. Le Sicilien ne cessait
de me demander ce qui se passait, mais je jugeai plus sage de ne rien lui
répondre, aussi patientâmes-nous en silence. Je me représentais Cicéron, assis,
seul, sur un banc du fond, attendant que la curie se vide pour n’avoir à parler
à personne. Je craignais en effet qu’il n’eût sérieusement perdu la face. Mais,
à ma grande surprise, il sortit en bavardant avec Hortensius et un autre
sénateur plus âgé que je ne reconnus pas. Ils s’entretinrent un moment sur les
marches du Sénat, se serrèrent la main et se séparèrent.
    — Savez-vous qui c’était ? demanda Cicéron en nous
rejoignant. (Loin d’être abattu, il paraissait profondément amusé.) C’était le
père de Verres. Il a promis d’écrire à son fils pour le presser d’abandonner
les poursuites si nous acceptions de ne pas porter cette affaire devant le
Sénat.
    Le pauvre Sthenius parut si soulagé que je crus qu’il allait
mourir de gratitude. Il tomba à genoux et se mit à embrasser les mains du
sénateur. Cicéron fit la grimace et le releva doucement.
    — Vraiment, mon cher Sthenius, gardez vos remerciements
pour quand j’aurai effectivement obtenu quelque chose. Il a seulement promis d’écrire,
c’est tout. Nous n’avons aucune garantie de quoi que ce soit.
    — Mais vous allez accepter la proposition ?
    — Quel choix avons-nous ? demanda Cicéron en
haussant les épaules. Même si je représente la motion, ils continueront

Weitere Kostenlose Bücher