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Jacques Cartier

Jacques Cartier

Titel: Jacques Cartier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Henri-Emile Chevalier
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aussi dure ! proféra-t-il en remettant le pied sur la grève.
—Nous avions toutes les peines du monde à résister au vent qui nous poussait d'un côté, tandis que la corde à laquelle vous étiez attaché nous entraînait de l'autre, dit l'un des hommes.
—Oh ! ç'a été pour vous une rude corvée ! reprit-il ironiquement.
—Non pas rude ; cependant...
—Bon, bon ; mais la seconde corde, celle que j'avais emportée à la main ?
—Cassée ! elle vient de casser !
—Comment ! elle a cassé ?
    —Oui, marquis, elle s'est rompue au moment même où elle se tendait et où nous pensions ramener ceux qui devaient s'y être amarrés.
—Mort de ma vie ! voici un vilain incident ! Alors la femme du pilote est perdue, car il fait noir comme dans le trou du Diable, et la mer est si méchante que pas plus maintenant que tout à l'heure nous ne pourrions mettre une embarcation à flots.
Comme pour confirmer ces paroles, une vague gigantesque vint, en meuglant, fondre sur eux. Pour n'être pas emportés par cette vague, ils n'eurent que le temps de se réunir en un groupe serré, en entrelaçant leurs bras et leurs jambes, et formant ainsi une inébranlable colonne de muscles et d'os.
Le libérateur de Constance tenait, pressée contre sa poitrine, la jeune fille à demi évanouie.
—Ça, mes gars, dit-il, quand la lame se fut retirée, tant pis pour ceux qui sont lâchés ; allons nous réchauffer.
Et, passant devant les hommes avec sa protégée, il escalada quelques roches qui le conduisirent au sommet de la Conchée, dont le plateau fort étroit était coupé par une crevasse, au fond de laquelle on apercevait de la lumière.
Guidés par cette lumière, nos gens descendirent dans la crevasse, où les quatre matelots quittèrent l'individu qui avait arraché Constance à l'abîme ; et celui-ci entra aussitôt dans une espèce de grotte, éclairée par une torche de résine.
—Maharite ! Maharite ! appela-t-il d'un ton dur.
—Maharite y est pour le maître, rien que pour son maître ; la joie soit avec lui ! répondit, en bas-breton, une voix qui semblait monter des entrailles de la terre.
Et l'on vit surgir d'un coin de la grotte un corps étrange, si courbé vers le sol qu'on eût dit qu'il marchait à quatre pattes.
    —Mort de ma vie ! que faisais-tu donc ? fut-il repris impérieusement.
—Maharite préparait le louzou [Plante douée de vertus magiques, que l'on va cueillir, le samedi, à minuit.] pour la pennèrès [Jeune fille à marier.].
—Toujours tes magies, hein ? tu finiras sur un bûcher !
—Et toi, mon maître, repartit railleusement Maharite, toi tu finiras au bout d'un écheveau de chanvre !
—Tais ta langue ! tais ta langue, femme ! et fais du feu pour cette jeune fille !
Le monstre tourna à demi sa tête, dont les cheveux tombants balayaient la terre, et un sourd grognement sortit de sa bouche :
—Encore une victime !
Ce n'est pas sans raison que nous l'appelons monstre, car il est impossible d'imaginer quelque chose de plus hideux que cette pauvre créature. Non-seulement une affreuse difformité l'obligeait de marcher à la manière des bêtes, mais son visage n'avait plus rien d'humain. Il n'était que cicatrices d'un rouge sombre, violacé, on le nez apparaissait seulement comme les deux cavités qui trouent celui d'une tête de mort, où les yeux saillissaient entre des bourrelets de chair sanglants comme des phlegmons, où, pour en finir tout de suite avec ces horreurs, la bouche, dépouillée de ses lèvres, montrait une double rangée de dents magnifiques, mais dont la blancheur même augmentait encore l'odieux de cet épouvantable masque.
—Dépêche ! et fais du feu, te dis-je, répéta l'homme, en étendant Constance sur un lit de plantes marines sèches.
Sans avoir tout à fait perdu connaissance, la jeune fille n'avait plus, depuis l'engloutissement de la barque, le sentiment exact de son être.
    Elle voyait et entendait à demi, mais ne pouvait apprécier les objets ou les choses.
Dans une petite niche de la caverne, son sauveur prit une bouteille d'eau-de-vie, dont il versa quelques gouttes sur les lèvres et sur les tempes de Constance, qui aussitôt s'agita, frissonnante, sur sa couche.
—Où suis-je ? demanda-t-elle, en promenant ça et là des regards étonnés.
—Vous le saurez dans un instant, répondit-il d'un ton courtois. Mais soyez assurée toutefois que vous êtes en sûreté.
—Ah ! c'est vous ! s'écria-t-elle en frémissant au

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